Citation
La dernière guerre civile et régionale en République démocratique du
Congo (RDC), de 1998 à 2003, aurait fait 183.000 morts et non quatre
millions, un chiffre souvent cité, affirment deux démographes belges,
cités mercredi par le journal La Libre Belgique.
Ces deux démographes affirment, dans une étude intitulée La
surmortalité au Congo (RDC) durant les troubles de 1998-2004, que le
chiffre de quatre millions de morts est burlesque
- tout en
soulignant cependant que ce sont des morts de trop
.
Guerres civiles
La RDC a été le théâtre de deux conflits au cours de la dernière
décennie: la rébellion de 1996-1997, qui a mené au renversement du
maréchal Mobutu Sese Seko et son remplacement par Laurent-Désiré
Kabila, le père du président actuel, puis une guerre civile et
régionale qui a vu surtout le Rwanda et l'Ouganda soutenir différents
rebelles congolais.
L'organisation non gouvernementale américaine International Rescue
Committee (IRC) avait à l'époque estimé que cette guerre avait fait
quatre millions de morts
au Congo. Si l'ONG précisait qu'il
s'agissait principalement de victimes indirectes du conflit, elle ne
comparait pas ce nombre avec celui des morts avant la guerre.
Le chiffre de quatre millions
a été repris par Kinshasa et,
propagande de guerre oblige, se transforma en nombre de tués
par
l'Ouganda et le Rwanda, souligne La Libre Belgique, qui le compare au
million de morts lors du génocide de 1994 au Rwanda (selon Kigali,
l'ONU évoquant plutôt 800.000 victimes).
Chiffres
André Lambert et Louis Lohlé-Tart, se sont livrés à une estimation
des décès en surnombre
durant la guerre en RDC, qu'ils estiment
scientifiquement fondée
et arrivent au chiffre de 183.000 personnes
ayant péri du fait des hostilités. MM. Lambert et Lohlé-Tart sont deux
des trois démographes experts auxquels la Commission européenne avait
demandé de contrôler les procédures d'enregistrement des électeurs
congolais en 2005-2006.
Ils ont combiné ces chiffres à ceux du dernier recensement (1984), de
la première grande enquête démographique au Congo (1956) et à
l'évolution de l'espérance de vie entre 1956 et les années 1990 telle
que fixée par l'Onu (sur base de chiffres congolais).
Selon les deux auteurs, la totalité des décès au RDC entre 1998 et
2004 a été de quelque 7.700.000. Si on leur enlève les quatre millions
de morts qui seraient dus à la guerre, cela signifierait que
l'espérance de vie au Congo, ces années-là, aurait été de 60 ans,
alors qu'en dehors de ces dates elle stagne aux environs de 42 ans
.
Régime de Mobutu
Poursuivant leur démonstration, les deux démographes admettent
l'hypothèse selon laquelle la guerre a épargné Kinshasa et les
provinces du Bas-Congo (ouest) et du Bandundu (ouest); qu'elle avait
lieu dans la totalité (ce qui est exagéré) de la province orientale
(nord-est), des deux Kivu et du Maniema (est); qu'elle touchait la
moitié - ce qui est trop - du Katanga (sud-est), des Kasaï (centre) et
de l'Equateur (nord-ouest) .
L'étude de l'espérance de vie dans les provinces en paix plaide en
faveur de l'idée selon laquelle les morts du Congo - même dans l'est
du territoire - sont plus la conséquence de la déliquescence du régime
Mobutu que celle de la guerre à l'est
, soulignent les deux démographes.
Si les auteurs de l'étude stigmatisent les affirmations délirantes et
malheureusement universellement reprises
sur les quatre millions de
morts, c'est pour s'indigner du silence de la communauté
internationale
sur les désastres du régime Mobutu. Ils soulignent
toutefois que les 183.000 décès liés à la guerre sont toujours des
morts de trop
. (belga/ca)
31/12/08 18h40