Fiche du document numéro 35843

Num
35843
Date
Vendredi 29 février 2008
Amj
Taille
461320
Titre
Audition de Faustin Rwamakuba, caporal dans la garde présidentielle [Traduction]
Nom cité
Nom cité
Source
Fonds d'archives
PAT
Type
Audition
Langue
FR
Citation
Témoin N° 2 : Caporal RWAMAKUBA Faustin

1. Nom et prénom: RWAMAKUBA Faustin
2. Date d'entrée dans l'armée : 1977
3. Grade et N° Matricule : Caporal
4. Camp militaire de résidence le 6/4/1994: Bataillon Garde présidentielle
5. Lieu d'emplacement le 6/4/1994: Aéroport Kanombe
6. Lieu de résidence actuelle : Nyabihu, centre Byangabo
7. Lieu d'audition : Rubavu Ville
8. Date d'audition : 29/02/2008

9. Personnes ayant recueilli le témoignage : Tous les Membres du Comité d'Experts

Dr BIZIMANA Jean Damascène (Vice président du Comité d'experts): Merci d'être venu
nous donner ton témoignage en réponse à notre invitation. Tu nous avais dit que tu avais
beaucoup de travail, nous te remercions pour t'être privés de tes activités en réponse à
notre invitation et d'avoir fait le trajet de Ruhengeri jusqu'à Gisenyi. C'est une bonne chose
qui nous aide dans notre tâche. Je voulais commencer par là. Deuxièmement, comme je te
l'ai dit hier lors de mon premier contact, je souhaite te rappeler l'objet de notre mission
puisqu'hier nous nous sommes vus à deux, et maintenant nous sommes sept. Nous
composons une commission mise en place par l'Etat rwandais pour qu'elle recueille toute
information en rapport avec le crash de l'avion qui transportait le président Habyarimana en
1994 pour que nous essayions d'établir la vérité sur les causes et circonstances de ce crash.

Pour que la vérité soit établie, il est justement nécessaire de chercher partout toutes les
preuves chez les personnes qui pourront en avoir qu'elles soient au Rwanda ou à l'étranger,
que ce soit dans l'armée ou dans la population civile. Bref, dans tout lieu où nous pourrons
trouver tout élément d'information qui nous permettra d'établir la vérité. Il ne s'agit pas
d'une enquête judiciaire destinée à accuser telle personne. Non. D'ordinaire, les lois
internationales régissant le transport aérien prévoient que lorsqu'il y a un incident qui
touche l'avion, le pays dans lequel il s'est déroulé, est tenu de mener une enquête pour
éclairer toutes les circonstances de cet incident. Voilà très clairement ce que nous sommes
en train de faire. Nous sommes au tout début de notre enquête.

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Tu commenceras par nous donner ton identité, nous dire les lieux où tu as vécus année par
année, puis tu continueras par ton témoignage en te basant sur des faits que tu as vus, que
tu connais. Une fois que cela est terminé, tu poursuivras avec ce que tu as entendu et qui te
semble être utile. Si tu connais d'autres témoins qui étaient avec toi et qui pourraient nous
nous donner le témoignage de nature à nous éclairer dans non tâche, tu nous les indiqueras
afin que nous puissions les auditionner. Voilà en gros l'objet de notre rencontre.

Il est utile que je te présente mes collègues, car lorsque les gens dialoguent en se
connaissant les uns et les autres, ça aide les échanges. Je commence par ton côté droit :
cette dame que tu vois s'appelle Judith Mbabazi, elle est membre de la Commission. A côté
de lui, il y a Mvano Jean Baptiste, puis Mukama Augustin. Celui qui manie les appareils
s'appelle Alain, c'est un agent de la commission. Les trois autres sont également des
membres de la Commission : celle-là s'appelle Alice Rugira, elle est secrétaire de la
commission. Celui-ci s'appelle Peter Mugenzi, il est également membre de la commission.

Quant à moi, je m'étais déjà présenté, je me nomme Bizimana Jean Damascène, je suis vice-président de la Commission. Mais, il y a aussi le président de la commission, il est à Kigali, il
n'a pas pu venir, il s'appelle Jean Mutsinzi. Toute la commission compte sept membres.
Maintenant que la présentation est faite, je voudrais sans tarder te passer la parole. Tu
commenceras par nous donner ton identité, les lieux où tu as vécus et travaillés ; puis tu
continueras sur ton témoignage que tu as à nous confier.

Le témoin Rwamakuba : En fait je m'appelle Rwamakuba Faustin, je suis né en 1958, dans la
cellule de Gasekera, je suis fils de.... Je suis entré dans l'armée en 1977 à Bugesera. Après, je
suis allé à Bigogwe. Puis j'ai été affecté au bataillon para commando en 1979. Puis j'ai quitté
le bataillon para vers celui de la garde présidentielle. Maintenant à ce qui concerne les
informations qui vous intéressent, c'était le 5 avril à l'aube vers 5h. Le président
Habyarimana a pris l'avion vers Arusha.

L'heure qui nous avait été donnés par nos supérieurs pour venir attendre le président à son
retour était 14h de la journée. Nous sommes allés là, nous avons attendu en vain. Ils ont
téléphoné ceux qui étaient à Arusha et ces derniers ont annoncé que le retour était fixé à
20h25. Près de 20h25, mon collègue qui était avec moi qui s'appelait Karasanyi a vu l'avion
et a dit : voilà l'avion qui arrive. Moi j'étais chauffeur, je me suis directement précipité sur le volant de mon véhicule de marque Jeep. Je devais transporter les bagages du président.

Après que je venais de mettre le véhicule en marche, j'ai entendu Karasanyi s'exclamer en
disant : Eh ! Je viens d'apercevoir quelque chose qui ressemble à une étoile filante qui s'est
dirigée vers l'avion. Dans le même moment, il a dit : les choses se passent autrement, on
vient de tirer sur l'avion. C'était deux coups. Le Falcon 50 avait trois moteurs, celui d'en haut
et celui de côté. Les coups étaient au nombre de deux. Le premier a pris le moteur situé sur
le côté et sur celui d'en haut. L'avion a immédiatement pris feu. Il s'est enflammé une fois
qu'il était près de sa résidence. Les soldats qui étaient là sur la défensive ont vite couru.
L'avion s'est ensuite écrasé sur la clôture de telle manière que.... Puis, nous autres qui nous
trouvions à l'aéroport, nous attendions là. On parlait de la situation. Le chef qui nous

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commandait s'est renseigné auprès de ceux qui étaient à la résidence en demandant s'ils
n'avaient pas trouvé les corps. Ils ont répondu qu'ils étaient toujours en train de les
chercher. Au moment où ils étaient en train de chercher les corps, des tirs d'armes
automatiques ont été lancés en direction de l'endroit d'où venait l'avion.

Au bout d'un certain temps, ils nous ont annoncés que certains corps venaient d'être
récupérés et qu'on était toujours en recherche de ceux qui restaient. A ce moment où on
nous annonçait la découverte de ces corps, nous avons reçu l'ordre de bloquer l'aéroport ;
nous nous trouvions à l'aéroport. Comment avons-nous bloqué l'aéroport ? Nous avons
utilisé nos véhicules, puis avec tous les autres objets comme les chariots qui étaient destinés
à charger les bagages dès l'atterrissage de l'avion. Nous avons pris tous ces objets et nous les
avons déposés sur la piste d'atterrissage. Il y avait un avion belge qui voulait atterrir, qui
venait ravitailler les soldats belges ; nous lui avons refusé d'atterrir. Ces soldats belges qui
étaient basés à l'ancienne aérogare ont tiré sur nous, mais sans utiliser des projectiles
mortels, c'était dans le but d'éclairer la piste.

Un lieutenant belge est venu vers nous et nous a demandés ce qui venait de se passer pour
voir s'il y avait quelque chose à laquelle il pouvait nous aider. Nous l'avons laissé, en lui
disant qu'il ne pouvait nous aider en rien car ce qui venait de se passer était déjà terminé.
Après cela, l'avion belge a continué à circuler dans le ciel, puis il est allé atterrir au Burundi.
Nous sommes restés là en attendant les nouveaux ordres de nos supérieurs. Ils nous ont dit
que c'était la mort qui venait d'arriver, qu'il fallait rester à l'aéroport, que des ordres
suivants allaient nous être donnés par après. Le lendemain, vers 14h nous avons reçu l'ordre
de quitter les lieux. Nous avons quitté cet endroit et nous sommes allés au camp. Arrivés là,
j'ai trouvé qu'il y avait beaucoup de véhicules dans le camp à tel point que je n'ai pas pu
trouvé de passage pour amener mon véhicule dans sa place habituelle où je le garais au
parking. Voilà en bref.

Vers 6h du matin, j'ai été blessé à la balle et j'ai été hospitalisé. A la sortie de l'hôpital, en fait je n'étais même pas guéris ; simplement ils regardaient ceux qui se remettaient et lui donnaient du travail en tenant compte de son état de santé. C'était pour qu'ils cèdent de la place aux nouveaux blessés. A ce moment là, ils m'on fait sortir de l'hôpital à Gasiza et m'ont demandé de conduire la jeep. J'ai un peu résisté, c'était vers 22h, et la guerre faisait rage à Kigali. Ils m'ont dit que je devais partir impérativement coûte que coûte et amener le véhicule. Je leur dit : pourriez-vous accepter que je parte le matin, vous voyez bien que je suis fatigué. J'avais des blessures. Ils m'ont répondu : Non. C'était Protais Mpiranya qui me disait cela. Je leur dit : si c'est ainsi, laissez-moi, je partirai le lendemain très tôt. Ils m'ont répondu : très tôt c'est quoi ? Que va-t-il se passer si la route est fermée ? Prends la route, amène le véhicule et tu partiras seul. Ils m'ont dit : prends cette arme, si par hasard, ils tirent sur ton véhicule, tu l'utiliseras pour te tirer dessus.

C'est ainsi que j'ai pris le véhicule, je suis parti, c'était vers 22h et je suis arrivé là à Gasiza vers 2h du matin. Voilà en peu de mots comment j'ai amené le véhicule au camp Gisenyi. Je l'ai stationné là bas et je suis allé me coucher. Ils ont téléphoné et ont demandé : est-il arrivé ? Ils ont répondu que j'étais arrivé. Ce qui a suivi, c'est que nous avons pris nos objets, après que nous avions reçu l'ordre d'évacuer le pays, en nous disant que c'était terminé.

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Nous avons pris nos véhicules et nous nous sommes dirigés vers Cyangugu où nous avons
passé un jour. Puis, des gens sont venus et nous ont dit que nous devions fuir. Nous avons
quitté le pays et nous sommes allés au camp Panzi. Voilà ce que je vous, c'est ça que je
connais.

Dr BIZIMANA : Je te remercie beaucoup. Nous allons te poser des questions. Comme je t'ai
dit au début de cette audition, il y a beaucoup d'années qui viennent de s'écouler, il est vrai
que c'est difficile de se rappeler des choses qui se sont passées il y a seize ans. Il est normal
que tu puisses ne pas te rappeler de certaines choses maintenant, mais cela n'est pas un
problème ; en pareil cas, tu pourras nous les communiquer plus tard. Moi, la question que
j'ai à te poser est simple : Quelle était ta fonction au sein de la garde présidentielle ?

RWAMAKUBA : Ma fonction dans la garde présidentielle, quand j'y suis arrivé, je faisais du
travail ordinaire ; puis je suis devenu chauffeur après trois années. En 1990, j'ai suivi une
nouvelle formation sur la conduite routière et nous avons réussi au nombre de huit. C'est
ainsi que nous avons été affectés dans le service d'escorte du président. Moi, je travaillais
dans le service d'escorte depuis 1990.

Dr BIZIMANA : Escorte ?

RWAMAKUBA : Présidentiel

Dr BIZIMANA : Du Président ?

RWAMAKUBA : Oui. Nous vivions à Kanombe, chez le président. Nous étions toujours une équipe de trois personnes pour cette fonction. Chaque équipe de trois y passait un mois, puis c'était la relève. C'était nous qui étions chargés de l'accueil des visiteurs qui venaient de l'extérieur, pour les transporter. Bref, lorsque je ne me trouvais pas dans l'escorte, je conduisais les visiteurs qui venaient de l'extérieur ou bien je conduisais la jeep dont je vous ai parlé qui servait à transporter les bagages du chef de l'Etat lorsqu'il voyageait à l'étranger.

Dr BIZIMANA : Qu'est-ce qui se trouvait dans la jeep que tu conduisais ?

RWAMAKUBA : Cette jeep était équipée d'un porte-bagage où on mettait ses habits ou ceux
de quelqu'un d'autre qu'il me confiait pour le conduire.

Dr BIZIMANA : Au début de ton audition, tu nous as dit qu'après le crash de l'avion, vous
avez bloqué l'aéroport en y mettant des objets. Tu as dit : ils nous ont donnés l'ordre d'agir
ainsi. Qui précisément vous a donné cet ordre de bloquer l'aéroport?

RWAMAKUBA: C'est le major Mpiranya. Mpiranya a dit: « combat au trans », ce qui veut
dire combattre à tout prix. Il nous a dit de faire en sorte qu'aucun avion ne puisse plus
atterrir. C'est ainsi que mes collègues qui savaient comment éteindre l'électricité sont allés
l'arrêter. Et nous, nous avons fait le travail de mettre nos véhicules sur la piste
d'atterrissage.

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Dr BIZIMANA : Donc, c'est Mpiranya qui vous a donné l'ordre d'éteindre l'électricité ?

RWAMAKUBA : OUI

Autre commissaire : Tu confirmes bien que c'est Mpiranya qui a donné cet ordre ?

RWAMAKUBA : C'est bien lui qui a donné l'ordre.

Dr BIZIMANA : Dis-nous : lorsque vous vous trouviez à l'aéroport, y-avait-il des membres de
la garde présidentielle qui étaient positionnés à la tour de contrôle ou qui s'y rendaient ?

RWAMAKUBA : Lorsque nous nous trouvions à l'aéroport, certains se positionnaient à une
extrémité ; d'autres à l'autre extrémité et ainsi de suite jusqu'à contrôler tous les axes de
l'aéroport. Un petit nombre d'entre nous se positionnaient à la tour de contrôle ; d'autres au
salon d'honneur ; d'autres se tenaient prêts pour se rendre à l'avion et entourer le chef de
l'Etat dès sa descente pour assurer sa sécurité et le protégeaient ainsi jusqu'à son entrée
dans le véhicule.

Dr BIZIMANA : Y-avait-il des communications entre la tour de contrôle de Kanombe et le
camp de la Garde présidentielle à Kimihurura ?

RWAMAKUBA: Oui, il y en avait.

Dr BIZIMANA : Est-ce que ces communications pouvaient permettre de connaître là où
arrivait le président ?

RWAMAKUBA : Ce qui se passait à l'aéroport.

Dr BIZIMANA : Ce qui se passait à l'aéroport ?

RWAMAKUBA : Oui

Dr BIZIMANA : As -tu pu te rendre à la résidence présidentielle après la chute de l'avion ?

RWAMAKUBA : J'y suis allé à ma sortie de l'hôpital

Dr BIZIMANA : A ta sortie de l'hôpital, c'est-à-dire à peu près dans quel mois ? Vers mai ?

RWAMAKUBA : Oui

Un membre du Comité (MUKAMA) : Je voudrais te remercier pour le témoignage que tu
viens de nous donner. Je trouve qu'il est intéressant, il pourra nous aider. Je souhaite te
rappeler qu'il s'agit d'un échange qui a pour but de nous permettre d'établir la vérité sur le
crash de l'avion. Comme le vice-président te l'a expliqué, nous souhaitons connaître la vérité
sur comment l'avion du président Habyarimana a été abattu, les circonstances exactes dans
lesquelles l'avion a été abattu ; c'est sur cela que nous voulons que tu nous aides. Tu as dit

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que tu te trouvais avec un militaire qui s'appelait Karasanyi. Où vous trouviez-vous ? Où
étiez-vous placé exactement ?

RWAMAKUBA : A l'aéroport. Nous nous trouvions à l'endroit où passent les véhicules qui
assurent l'escorte. Cet endroit est fait par des blocs ciment sur le sol et par des fers à bétons
au-dessus. Les véhicules de l'escorte passent au milieu de ces fers à bétons et l'aérogare.
C'est à cet endroit où nous étions stationnés.

Question : Avant d'entrer à l'aéroport ?

RWAMAKUBA : Non, les véhicules entrent dans l'aéroport. Regardes là où est situé
l'aéroport, il y a un endroit presque clôturé à l'intérieur près de la piste, c'est là où
stationnent les véhicules qui assurent l'escorte.

Question : C'est donc là où vous vous trouviez ?

RWAMAKUBA : C'est effectivement là où nous nous trouvions.

Question : Avec Karasanyi ?

RWAMAKUBA : Oui, avec Karasanyi. Les autres militaires étaient là où je vous ai dit en
assurant la sécurité.

Question : Et Karasanyi t'as dit qu'il venait d'apercevoir quelque chose qui ressemble à une
étoile filante qui est partie en direction de l'avion. As-tu entendu le bruit de cette étoile
filante au moment de son départ quand tu étais à côté de Karasanyi ?

RWAMAKUBA: Non

Question : Aucun bruit de tir ?

RWAMAKUBA : Non

Question : Que ce soit le premier ou le second ?

RWAMAKUBA : Oui, j'ai vu deux.

Question : Deux ?

RWAMAKUBA : Oui

Question : Mais sans qu'il y ait de bruit auparavant ?

RWAMAKUBA : Non

Question : Tu n'as pas entendu de bruit ?

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RWAMAKUBA: Non



Question : Aucun bruit ?

RWAMAKUBA: Non aucun

Question : L'étoile filante allait-il vers l'avion au moment où il s'apprêtait à atterrir ?

RWAMAKUBA : Non, l'avion n'avait pas encore entamé la descente. Simplement, il était dans le ciel. Tu vois les phares de l'avion qui font comme ça, c'est cela que j'ai vu. Puis, comme l'heure de son arrivée qu'on nous avait indiquée approchait, nous avons commencé à nous préparer lorsqu'on nous a annoncé que l'avion était sur le point d'atterrir. Quand l'avion a ouvert ses phares signalant les préparatifs de son atterrissage, c'est à ce moment-là que l'éclairage blanc, comment on l'appelle encore ? En fait, c'est une image que j'utilise. L'éclairage est parti à la rencontre de l'avion. Celui-là, je ne l'ai pas vu moi-même. C'est Karasanyi qui a dit : Eeh ! Voilà une étoile filante qui se dirige vers l'endroit d'où vient l'avion. Puis, les deux coups, mais ce n'est pas deux coups en fait ; moi je ne les ai pas entendus, j'ai vu les choses qui se dirigeaient vers l'avion, mais sans que j'entende les coups. Puis, l'avion s'est immédiatement enflammé en se dirigeant vers l'emplacement des militaires.

Question : L'avion était dans le ciel en provenance de Masaka ?
RWAMAKUBA : Oui
Question : Après cela, vous avez-vu les deux tirs ? Toi-même tu as bien vu une étoile filante ?
RWAMAKUBA : Oui
Question : Partaient-elles en direction de l'avion, à sa rencontre vers l'endroit d'où il
provenait ou bien ?
RWAMAKUBA: Ils partaient vers l'avion
Question : lis étaient devant l'avion vers la direction d'où il provenait ou quoi?
RWAMAKUBA : Oui
Question : Ils ne provenaient pas de derrière de l'avion ?
RWAMAKUBA: Non
Question : Est-ce que tu te souviens très bien ? indiques-nous clairement : ils sont partis en
direction de l'avion en venant de ce côté-ci ou de celui-là ?

RWAMAKUBA : C'est ce côté-ci. C'est l'endroit qui s'appelait.... ils provenaient en dessous
de... Enfin dans le sens situé vers la rencontre de l'avion, vers là où vient l'avion.

Q: Essayons de nous placer à l'endroit où tu te trouvais à l'époque. Selon ce que tu as vu, ils
venaient de derrière là où on ne voit pas très bien ?
RWAMAKUBA : Là où on ne voit pas très bien ?

Q: Oui, je veux savoir si tu ne pouvais pas t'apercevoir le lieu précis de provenance de
l'étoile filante par ce que c'était loin.

RWAMAKUBA: Regardes. Pour que le tir soit bien entendu

Q: La trajectoire, je voudrais que tu m'expliques sa trajectoire ?

RWAMAKUBA : Le tir part comme ceci. Tu t'en aperçois quand il se dirige vers sa cible,
l'objectif. Toi quand tu tires, tu vises l'objectif, et quand c'est raté, cela veut dire que tu as
échoué. Les tirs sont donc partis à la rencontre de l'avion, l'avion venait comme ç a.

Q: Ils venaient de quel côté ?

RWAMAKUBA : Ils venaient en dessous de l'aéroport et se dirigeaient vers l'avion.

Q: Les gens qui étaient à la tour de contrôle, tu nous as indiqués plusieurs positions où ils se
trouvaient. S'agit-il d'un seul ou de deux ou trois qui sont entrés dans la tour de contrôle ?
As-tu vu ceux qui sont allés dans la tour de contrôle car il est d'habitude que des membres e
la garde présidentielle se rendent à la tour de contrôle à l'approche de l'avion présidentiel.
Ce jour-là, combien de militaires sont-ils entrés dans la tour de contrôle ? Un ou deux ?

RWAMAKUBA: C'est normal. Nous, nous savions qu'ils s'y rendaient, mais je ne peux pas te
dire que c'était tel ou tel. Vous pouvez poser la question au capitaine Murenzi qui était chef
des opérations, le poste qu'on appelle S3. Mais, maintenant, il n'est plus capitaine, il est
rentré, il a obtenu le grade de colonel. C'est lui qui en avait la charge, mais il était au camp.
Lorsque nous étions en mission en dehors, toutes les communications lui parvenaient que ce
soit celles de l'endroit où nous étions, que ce soit celles au camp. Il recevait des informations
de tous ces endroits-là. C'est lui qui peut vous donner de plus amples éclaircissements sur
cet aspect ; je ne sais pas où il vit maintenant, mais il est colonel.

Dr BIZIMANA: Il vit à Cyangugu.

Q: Tu nous a parlé d'un avion belge qui a continué à tourner dans le ciel de l'aéroport, vous
lui aviez refusé l'atterrissage. Combien de temps a-t-il passé en tournant ?
RWAMAKUBA : Il a passé un long moment et les belges étaient fâchés jusqu'à ce qu'ils nous
tirent dessus avec..... Il a passé un long moment.

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Q: Donc, pour que les Belges sachent que des objets avaient été mis sur la piste, ils ont dû
éclairer ?

RWAMAKUBA : Oui, et ils ont tiré sur nous, mais pas des balles mortelles, c'était pour voir ce
qui s'était passé.

Q: Puis, vous l'avez vu partir ?

RWAMAKUBA: Oui

Q: Comment as-tu appris qu'il s'était dirigé à Bujumbura ?

RWAMAKUBA : Il y avait nos hommes qui étaient là. Leurs noms, ce n'est pas nécessaire.
Parmi les membres de la délégation qui étaient partis à Dar-es-Salam, les uns sont restés;
deux ont laissé la place au président du Burundi, et ce sont eux qui sont partis à Bujumbura.
Ils nous ont dit qu'ils avaient vu l'avion à Bujumbura.

Q: L'avion belge ?

RWAMAKUBA : Oui, l'avion belge

Q: A quel moment vous ont-ils dit cela ?

RWAMAKUBA: Ce n'est pas le jour même parce qu'ils n'y sont pas arrivés ce jour--là.
L'aéroport était fermé, ils sont revenus en voiture, je ne me rappelle pas le jour où ils me
l'ont dit.
Q: Peux-tu nous dire leurs noms ?
RWAMAKUBA : C'était Nzariturande Michel qui était chauffeur et un autre qui avait le grade
de caporal.
Q,: Nzabirinda ?
RWAMAKUBA : Non, ce n'est pas Nzabirinda, c'était un caporal qui était maigre comme moi.
Q: C'est Bavuga ?
RWAMAKUBA: Non, ce n'est pas Bavuga
Q: Si un jour tu te souviens de lui, tu nous tiendras informés.
RWAMAKUBA : Je pourrais même demander à mes anciens collègues
Q: Où vit Nzariturande ?

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RWAMAKUBA : Je ne sais pas où il vit, mais sa famille est à Kinyinya
Q.: Sa famille est à Kinyinya près de Kigali ?

RWAMAKUBA : Oui
Q.: C'était Munyemana

Un membre du Comité (Mvano Jean Baptiste) : Il cherchera et il nous dira s'il se souvient.
Mvano : As-tu vu combien de projectiles qui se sont dirigés vers l'avion ?
RWAMAKUBA: Deux
Q.: Ils étaient deux ?
R : Oui
Q.: Ils provenaient de l'endroit que tu as indiqué, en dessous de l'aéroport
R : Oui, ils se dirigeaient vers l'avion
Q.: Vers l'avion ?
R : Oui
Q : Sans faire de bruit
R: Non, pas de bruit. Les militaires dont je vous ai parlés qui étaient à la résidence ont eu
peur et ont commencé à tirer de tout côté.
Q.: Ils tiraient vers qui ? Tu ne connais pas contre qui ils tiraient ?
R : Avec personne. Ils ont tiré n'importe comment sans cible précise

Dr BIZIMANA : Dis-nous, tu empruntais souvent la route allant au camp de la Garde
présidentielle et tu passais près du CND. Tu sais qu'il y a un bataillon du FPR qui s'y est
installé. Peux-tu nous dire la situation qui régnait sur cette route après l'arrivée de ce
bataillon du FPR ?

R: Il n'y avait de barrière à cet endroit-là, ce n'était pas une vraie barrière, mais il y avait des militaires qui les gardaient, mais pas de problème, pas de barrière.

Dr BIZIMANA : Même à Remera, il n'y en avait pas ?
R : A Remera non.

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Dr BIZIMANA : Peux-tu nous dire là où il y avait des barrières?
R: Les barrières ?
Dr BIZIMANA : Disons en 1994, lorsque vous avez conduit le président Habyarimana, il n'y
avait pas de barrières de vos soldats ?
R: De nos soldats ?
Dr BIZIMANA : Oui

R : Non, il n'y en avait pas, sauf... il y avait ce qu'on appelait le service d'itinéraire qui
surveillait le trajet où devait passer une personnalité importante. Il y avait des gens qui y
étaient placés, et ils rentraient après son départ.

Dr BIZIMANA : Sur cette route-là, tu vois la route qui va à Rwamagana, Kabuga, Kanombe,
Remera à l'endroit appelé «Au panneau MUTZIG » à la bifurcation descendante qui va à
Rwamagana et à Kibungo.
R : Sur la route principale ?

Dr BIZIMANA : Oui, sur la route macadamisée, y avait-il des positions militaires ? Le long de
la route ?

R: Non, je n'en voyais pas

Dr BIZIMANA : A quel moment tu y es passé pour la dernière fois ?

R : Immédiatement après le crash de l'avion
Dr BIZIMANA : Et avant?
R : Avant, je t'ai dit que j'y suis passé pour aller conduire et pour attendre le chef de l'Etat.
J'y passais souvent. Je ne faisais pas quelques jours sans que je n'aille à Kanombe.
Dr BIZIMANA : Moi, je parle de la route qui va à Kabuga.
R : Celle d'en dessous
Dr BIZIMANA : Oui, celle qui passe en dessous
R : A ce moment concerné, il n'y avait pas de militaires, sauf qu'ils y sont venus après,
comme à Remera, la barrière y a été placée après.
Dr BIZIMANA : Après le crash de l'avion ?

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R: Oui
Dr BIZIMANA : Maintenant, dans ce que tu aurais entendu en échangeant avec tes
collègues, j'imagine qu'après la mort du président vous avez eus des discussions entre vous.
Ça devait être quelque chose de triste. Vous n'en avez pas parlé entre vous ? Ou bien vos
supérieurs ne vous ont-ils pas réunis pour vous donner des informations sur l'incident qui
venait d'avoir lieu ? Sur le responsable de cet acte ? Y-a-t-il eu une réunion ? N'avez-vous
pas reçu quelques ordres ?

R : Franchement, le temps a manqué, sauf que la première chose été celle de dire que c'était
la mort, qu'il fallait se battre pour la vie ou la mort : « combat au trans ». Que vous sauviez
cet aéroport ou que vous mourriez là, il faut le faire. Voilà ce que je me rappelle.

Dr BIZIMANA : Ce fut le mot d'ordre de Mpiranya ?

R : Oui. Mais il était avec..... De toute façon il y a eu des militaires qui ont été attristés par la mort à tel point que tu voyais quelqu'un d'adulte pleurait ; même plusieurs pleuraient à cet endroit-là oui. Mais, nous ne sommes pratiquement plus revus ; chacun se débrouillait, c'était la guerre. Nous nous sommes battus, et moi j'allais mourir dedans. Je vous ai dit que le FPR a commencé à tirer vers le camp Kimihurura vers 15h d'abord avec des balles d'armes lourdes puis des bombes ont suivi ces balles.

Q.: Y-avait-il des militaires français qui vivaient au camp de la Garde présidentielle ?
R : Il y en avait deux
Q: Deux ?
R: Oui

Q: Il y avait notamment un major qui s'appelait Roux.

R: Roux Denis

Q: Roux Denis y était ?

R : Il y était, mais il n'habitait pas dans le camp. Il venait donner ses cours, puis rentrait. Il y avait aussi un adjudant-chef qui s'appelait Thierry. J'oublie son autre nom.

Q : Thierry ?

R : Il y avait un adjudant chef aussi qui venait à Kimihurura

Q: Lorsque l'avion a été abattu, le major Roux était-il toujours présent au camp ces jours là ?

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R: Le jour où l'avion est tombé, je ne connais pas le travail qu'il a fait, mais en réalité il
travaillait dans le camp à Kimihurura.

Q.: Ces jours-là, il était encore ici ? Il venait ?

R : Il était ici, je confirme. Je ne connais pas la date exacte de son départ, mais il était ici.

Dr BIZIMANA : Je ne sais pas s'il y a ceux qui ont d'autres questions à te poser. Je vois qu'il
n'y en a pas. Je voudrais vraiment te remercier pour être venu nous donner ton témoignage.
Il est probable que nous ayons besoin de toi pour un complément d'informations, sois prêt.

R: Je vous ai dit que je conduisais la jeep du Chef de l'Etat. J'ai même franchi la frontière
avec elle.

Q : Je parle de ton départ de Kigali vers Gisenyi.

R: Quand j'ai quitté Kigali vers Gisenyi, j'étais malade. J'avais été blessé. Ils venaient voir
ceux qui étaient moins blessés et les amenaient au front. Moi, ils m'ont cherché et ont
trouvé que j'étais malade. Ils m'ont donné le véhicule pour que j'aille à Kigali. J'y suis arrivé
vers 8h et à 10h ils m'ont ordonné de retourner.

Q: Tu n'as rien emporté pendant ce trajet ?

R: Non, rien

Q: Tu es venu avec rien ?

R: Non, je n'ai rien transporté.

Q : Je te remercie beaucoup

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024