Citation
Paris, le 18 novembre 2025
Monsieur Laurent Correau
Rédaction-en-Chef Afrique de RFI
80 rue Camille Desmoulins
92130 Issy-les-Moulineaux.
Nous avons découvert avec effarement l’article, « RDC, Nous résisterons jusqu’à ce que Kigali accepte un dialogue avec nous ». Ainsi, le journaliste Patient Ligodi rapporte et diffuse sans nuance et sans commentaire les déclarations d’un responsable des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda). Il omet notamment de dire ce qu’est ce mouvement armé, à savoir, une émanation de l’armée et du gouvernement qui a commis le génocide contre les Tutsi du Rwanda en 1994. Il commet une faute historique lourde en le présentant à l’opinion publique comme une force de résistance « nous résisterons », un groupe qui s’est constitué sur la base d’une idéologie violemment raciste et génocidaire.
Faut-il rappeler que l’usurpation cynique de la notion de la résistance était déjà présente au moment du génocide ? Dans une émission diffusée le 3 juin 1994 sur les antennes de la tristement célèbre Radio des Mille collines (RTLM), les idéologues du génocide rangeaient les Inkotanyi dans le camp des Nazi et les miliciens Interahamwe dans celui des « résistants ».
Nous voilà revenus dans les années de l’immédiat après génocide, lorsque la matrice des FDLR régnait encore sur les camps établis dans les régions de Goma et de Bukavu et empêchait les réfugiés de rentrer dans leur pays en exigeant comme condition préalable une négociation avec Kigali et un retour dans l’honneur dans le pays qu’ils avaient transformé en une vaste fosse commune pour plus d’un million d’enfants, de femmes et d’hommes assassinés pour ce qu’ils étaient, nés Tutsi.
Patiemment, le Rwanda se reconstruit et se réconcilie avec lui-même. Il ne pose aucune condition à la liberté de mouvent et d’installation de ses ressortissants. Il n’évoque plus le motif de la pauvreté et la taille du territoire pour maintenir ses citoyens à l’exil. Les FDLR peuvent donc rentrer comme l’ont fait nombre de leurs recrues. Ils n’ont pas besoin d’avoir les armes à la main et il n’y a pas besoin de dialogue préalable. Sur quoi devrait-il porter ? Sur l’impunité ?
Sur le retour aux comptages ethniques ? ou sur l’opportunité de « finir le travail » en exterminant les Tutsi qui leur ont échappé en 1994 et en massacrant les Hutu qu’ils accusent d’avoir trahi en s’alliant aux Tutsi ?
Le devoir d’informer va de pair avec l’éthique de l’information. Peut-on imaginer un journaliste tendant son micro à des débris même lointains du parti Nazi ou de la Wermacht ? Ou faut-il accepter que ce qui est interdit de ce côté-ci des Pyrénées devrait être autorisé de l’autre côté ?
Au nom des victimes, nous demandons un rectificatif ou le retrait de cet article.
Marcel Kabanda, Président d’Ibuka France