Fiche du document numéro 35176

Num
35176
Date
Mercredi 4 juin 2025
Amj
Taille
95424
Titre
Réaction d’Ibuka France aux propos tenus sur le génocide des Tutsi au Rwanda dans l’émission Arrêt sur images
Nom cité
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Source
Type
Communiqué
Langue
FR
Citation
Ibuka France exprime sa plus vive indignation après les propos gravement révisionnistes tenus par Daniel Schneidermann dans l’émission Arrêt sur images du 19 mai 2025 intitulée « Plenel aux risques du journalisme », diffusée sur un média qui revendique précisément un travail critique des récits médiatiques.

Au cours de cette émission, le journaliste a affirmé : « Il me semble, dans mon souvenir, que Corine Lesnes est allée au… Rwanda, euh, pour le deuxième génocide. C’est-à-dire quand les…, les génocideurs se sont fait eux-mêmes génocider ». Ibuka France constate que ces propos n’ont fait l’objet d’aucune contestation de la part d’Edwy Plenel, qui participait à l’émission, alors même que Mediapart a, à de nombreuses reprises, produit des enquêtes de fond sur le génocide des Tutsi au Rwanda.

La thèse évoquée par Daniel Schneidermann, parfois désignée sous le nom de « double génocide », reprend un argumentaire forgé à l’origine par les génocidaires et leurs soutiens. Avant et pendant le génocide des Tutsi au Rwanda, les extrémistes hutu ont diffusé l’idée que les Tutsi représentaient une menace pour le « peuple majoritaire » hutu, cherchant à justifier l’extermination des Tutsi comme un acte de légitime défense face à un ennemi intérieur présumé.

Après le génocide des Tutsi au Rwanda, cette propagande a évolué sous la forme de la théorie du « double génocide », consistant à présenter les victimes tutsi comme ayant à leur tour commis des massacres des Hutu, afin de brouiller la réalité des faits et de relativiser la responsabilité des génocidaires et de ceux qui leur ont apporté leur soutien. En entretenant cette théorie complotiste, ces discours cherchent à masquer qu’il s’est agi d’une tentative d’extermination planifiée et systématique du groupe tutsi.

Daniel Schneidermann a également évoqué des « massacres interethniques », contribuant à entretenir une confusion grave sur le mobile génocidaire. Ibuka France rappelle que le génocide des Tutsi au Rwanda a été reconnu sans ambiguïté par les juridictions internationales et françaises. Ce génocide n’est en rien assimilable à une guerre civile. Il est la mise en exécution directe d’une idéologie anti-tutsi entretenue pendant des décennies. En outre, à aucun moment, le terme de « génocide des Tutsi au Rwanda » n’a été employé, lui, préférant l’expression imprécise de « génocide au Rwanda », brouillant encore davantage la distinction fondamentale entre les victimes et les bourreaux.

Les propos tenus infligent une violence morale aux rescapés, fragilisent le travail des chercheurs et désorientent l’opinion publique en obscurcissant la compréhension des mécanismes de haine organisée qui ont conduit à l’extermination des Tutsi. Il est regrettable que, plus de trente ans après les faits, il faille encore, face à des journalistes, réaffirmer des vérités juridiques et historiques pourtant incontestables.

Paris le 4 juin 2025

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