Fiche du document numéro 34915

Num
34915
Date
Lundi 17 mars 2025
Amj
Taille
368322
Titre
Le Rwanda rompt ses relations diplomatiques avec la Belgique après l’adoption de sanctions européennes
Sous titre
Selon Kigali, Bruxelles aurait « pris parti » pour Kinshasa, « bien avant et pendant le conflit en cours » dans l’est de la République démocratique du Congo. Conséquence : tous les diplomates belges ont 48 heures pour quitter le Rwanda.
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M23
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Selon Maxime Prévot, vice-premier ministre belge et ministre des affaires étrangères, « la Belgique ne cherche ni à punir ni à affaiblir le Rwanda » (Ici, à Bruxelles le 17 mars 2025). NICOLAS TUCAT / AFP

Alors que l’Union européenne (UE) venait d’adopter, lundi 17 mars, un train de sanctions contre des chefs militaires rwandais et un responsable du secteur minier en raison de l’offensive du groupe armé M23, soutenu par Kigali, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), le Rwanda annonçait la rupture de ses relations diplomatiques avec la Belgique. Bruxelles aurait, selon les autorités de Kigali, « pris parti » pour Kinshasa, « bien avant et pendant le conflit en cours » en RDC.

L’ensemble des diplomates belges ont été priés de quitter le pays dans un délai de 48 heures, une décision assortie d’une critique des « tentatives pitoyables » de leur pays pour « maintenir ses illusions néocoloniales ». Les autorités de Bruxelles ont à leur tour déclaré personae non gratae tous les diplomates rwandais présents sur le sol belge.

Pour le Rwanda, le gouvernement belge est le principal instigateur des sanctions européennes qui visent neuf personnes, dont trois hauts gradés de l’armée rwandaise – Ruki Karusisi, Eugène Nkubito et Pascal Muhizi. Le directeur général de l’Office rwandais des mines, du pétrole et du gaz, Francis Kamanzi, est également ciblé. Comme quatre citoyens congolais cadres du M23, dont le chef du mouvement, Bertrand Bisimwa. Tous ne pourront plus se rendre dans l’Union européenne et leurs avoirs y seront gelés.

La Belgique avait réclamé dès la fin janvier des sanctions contre le Rwanda, accusé de violer la souveraineté de la RDC après l’offensive lancée, le mois précédent, dans l’est de la RDC. Goma, capitale du Nord-Kivu, et Bukavu, capitale du Sud-Kivu, sont ensuite tombées aux mains du M23, soutenu par Kigali, qui dément toutefois toute présence de ses militaires sur le terrain.

Des propos virulents tenus par Paul Kagame



En guise de réplique aux demandes de Bruxelles, le régime du président Paul Kagame avait annoncé, en février, la suspension des programmes belges d’aide au développement. La Belgique était également accusée de contrarier l’accès du Rwanda à des financements internationaux et de compliquer un processus de médiation de l’Union africaine pour résoudre le conflit en RDC.

Des menaces et les pressions exercées par des agents rwandais sur la diaspora présente en Belgique et les manœuvres de Kigali pour empêcher la nomination du diplomate belge Bernard Quintin comme représentant de l’UE pour la région des Grands Lacs avaient fortement envenimé les relations entre les deux pays. Elles n’étaient toutefois pas totalement rompues, même si le Rwanda ne possédait plus d’ambassadeur en Belgique depuis 2023 et si Bruxelles n’avait plus désigné de représentant à Kigali depuis l’été 2024.

Les propos virulents tenus dimanche 16 mars par M. Kagame laissaient, en revanche, envisager une rupture complète. Lors d’un événement public, il avait critiqué un pays qui « nous a tués tout au long de l’histoire et revient sans cesse nous tuer davantage ». La Belgique est régulièrement mise en cause par les responsables rwandais pour avoir, selon eux, favorisé la division ethnique qui a abouti au génocide des Tutsi en 1994.

« L’un des plus gros problèmes auxquels nous avons été confrontés est notre colonisation par un petit pays comme la Belgique, qui a découpé notre pays pour qu’il soit aussi petit qu’elle », avait lancé M. Kagame.

Décision « disproportionnée » du Rwanda



Lundi, l’ancien colonisateur était encore accusé de « se mobiliser systématiquement contre le Rwanda dans différents forums, utilisant mensonges et manipulations pour créer une opinion hostile injustifiée (…), dans le but de déstabiliser le pays et la région ».

Lundi, Maxime Prévot, le ministre des affaires étrangères et vice-premier ministre belge, a publié un long communiqué après l’adoption du plan européen de sanctions. Regrettant la décision « disproportionnée » du Rwanda, il a regretté que son homologue Olivier Nduhungirehe ait refusé de le rencontrer, la semaine dernière. « La Belgique ne cherche ni à punir ni à affaiblir le Rwanda, poursuivait le ministre, et encore moins en fonction d’un passé colonial par rapport auquel elle a pris ses distances depuis longtemps. »

« La seule boussole de la Belgique continuera à être le respect des droits humains, de l’Etat de droit et du droit international humanitaire », insistait M. Prévot. « La Belgique a condamné sans la moindre ambiguïté le génocide contre les Tutsi et a assumé sa part de responsabilité, notamment en demandant pardon pour ses manquements », soulignait encore le ministre.

Il concluait en s’adressant aussi aux dirigeants congolais, invités à « prendre leurs responsabilités », non seulement pour permettre la résolution des conflits, mais aussi pour réformer leur propre mode de gouvernance.

Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, correspondant)

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