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Tous les efforts, tant des organisations humanitaires que de l'ONU et des nouvelles autorités de Kigali, convergent pour tenter d'éviter un exode massif des réfugiés rwandais vers le Zaïre, à six jours du retrait, du sud-ouest du pays, des troupes françaises engagées dans l'opération « Turquoise ». A ce jour, cet exode tant redouté n'a pas eu lieu. Ainsi, le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) a estimé qu'entre deux et trois mille Rwandais seulement avaient traversé la frontière.
Les tentatives des organisations humanitaires de rapatrier vers leur région d'origine les Rwandais réfugiés dans les pays voisins se sont cependant heurtées aux rumeurs et aux menaces dont ils ont été l'objet. Ainsi le premier convoi, organisé mardi 16 août par l'Office international des migrations et le HCR, à partir de Goma vers Kigali, est parti à vide, les candidats au retour ayant finalement refusé de monter à bord des camions.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a dû renoncer, lundi, à rapatrier par avion de Bukavu au Rwanda plus de mille enfants non accompagnés _ pour la plupart orphelins _ le personnel rwandais s'occupant d'eux ayant refusé de laisser partir un premier groupe de 150 enfants, et « étant prêts, selon le chef adjoint de la délégation du CICR à Kigali, à user de la force pour les en empêcher ».
Le gouvernement de Kigali a multiplié les visites dans la « zone humanitaire sûre » pour tenter de convaincre les réfugiés de rentrer chez eux et leur expliquer qu'ils n'ont rien à redouter du nouveau pouvoir. Mardi, trois ministres se sont rendus à Gikongoro. Dimanche, ils étaient à Kibuye. Une autre délégation devait se rendre, jeudi, à Cyangugu.
Pas d'impunité
La Mission des Nations unies pour l'assistance au Rwanda (MINUAR) commence à prendre le relais des Français dans la « zone humanitaire sûre » : 170 soldats éthiopiens, premiers éléments d'un bataillon d'environ 750 hommes, qui sont arrivés lundi à Kigali devaient rejoindre, mercredi, Cyangugu.
Le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme a estimé mardi à Genève qu'il n'y aurait ni paix ni réconciliation sans jugement des responsables du génocide. José Ayala Lasso, qui doit se rendre cette semaine au Rwanda et au Burundi, discutera à Kigali de l'établissement d'un tribunal international ainsi que de « la mise sur pied d'une administration judiciaire au-dessus des partis et [du] rétablissement de l'autorité de l'Etat ». A son avis, « l'important est qu'il n'y ait pas d'impunité. Lorsque l'on compromet la justice pour servir une situation politique, on risque de n'avoir ni paix ni justice du tout ».
Vingt-six observateurs des droits de l'homme de l'ONU doivent être déployés au Rwanda à partir du 22 août, pour enquêter et pour rassurer les réfugiés candidats au retour. Ce nombre est très insuffisant, mais correspond au budget disponible de 1,4 million de dollars, a souligné M. Ayala Lasso. Ce déploiement coïncidera avec le retrait des troupes françaises de la « zone humanitaire sûre ».
Pour sa part, le CICR a recensé 527 prisonniers arrêtés par les nouvelles autorités rwandaises qui les soupçonnent d'avoir pris part aux massacres commis depuis avril dernier. Ses délégués en ont visité, au cours du dernier week-end, quelque 300 détenus à Kibungo, dans le sud-est du pays. Les autres suspects sont incarcérés à Kigali et à Rilima, dans le sud du pays. (AFP, Reuter.)