Fiche du document numéro 34657

Num
34657
Date
Vendredi 15 novembre 2024
Amj
Auteur
Taille
86303
Titre
Procès en appel de Philippe Manier à la Cour d’assises de Paris - Jour 8
Sous titre
Compte rendu de l’audience du 14 novembre 2024
Nom cité
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Source
Type
Page web
Langue
FR
Citation
Cette huitième journée d’audience a commencé par l’audition d’Angélique TESIRE, secrétaire du commandant de la gendarmerie de Nyanza en 1994. Elle a commencé par vouloir parler d’un épisode dont elle n’avait jamais parlé auparavant. Elle raconte que l’accusé l’a emmenée à l’hôpital un jour pour vérifier qu’elle n’avait pas subi un avortement volontaire. Le test était finalement négatif. Elle lui en veut de l’avoir exposée de cette manière. Sur demande du Président, elle a ensuite rappelé la hiérarchie au sein de la gendarmerie. L’accusé était sous-officier d’unité en charge d’organiser les missions des gendarmes. C’est lui qui répartissait les gendarmes qui allaient en patrouille. Le Président lui a demandé si l’accusé sortait pour effectuer ses missions. Elle a affirmé que oui, il passait contrôler les gendarmes en poste, avant comme pendant le génocide. S’agissant de rivalités entre gendarmes du Nord et gendarmes du Sud, elle affirme que les gendarmes du Nord avaient plus d’opportunités que les autres, ils étaient favorisés. Elle affirme également que les gendarmes du Nord disaient souvent aux gendarmes du Sud et aux gendarmes Tutsi qu’ils allaient les tuer.

Le Président lui a ensuite demandé ce qu’il s’était passé à la gendarmerie après l’attentat du 6 avril. Elle a répondu que même avant la chute de l’avion il y avait des meetings politiques qui encourageaient la population à haïr les Tutsi. C’est après le discours de Butare le 19 avril et la réception du communiqué de ce discours que les massacres ont commencé. Ce discours encourageait la population à commencer les tueries à Butare. Le sous-lieutenant adjoint du commandant Birikunzira était le plus virulent à cet égard. Il travaillait selon elle en collaboration avec le sous-préfet. Comme Birikunzira était un Hutu du Sud, il n’était au départ pas « chaud » dans ces affaires. La hiérarchie a été bouleversée, c’était le sous-lieutenant, n°2 de la gendarmerie qui était le chef, et Philippe Hategekimana et lui travaillaient d’un commun accord. Le Président l’a également interrogé sur ces déclarations concernant l’érection de barrières. Elle avait notamment dit que Birikunzira avait demandé que des barrières soient érigées dès le 6 avril que du 8 au 20 avril les barrières étaient tenues par des gendarmes déployés sur ordre de Philippe Hategekimana. Elle confirme. Ces barrières servaient au départ à maintenir la sécurité, elle ne savait pas qu’elles allaient servir à tuer. Elle a également expliqué dans ses réponses qu’après le 6 avril les gendarmes extrémistes étaient très en colère et « se lamentaient » tout le temps jusqu’au discours du 19 avril. Le 21 avril, des militaires de l’Ecole des Sous-Officiers (ESO) sont arrivés à la gendarmerie à bord de deux camionnettes. Philippe Hategekimana et le sous-lieutenant Gaëtan les ont accueillis. Philippe leur aurait donné des ordres et ils seraient ensuite partis tuer. Le Président l’a ensuite interrogée sur le bourgmestre Nyagasaza qu’elle a dit avoir vu à la gendarmerie. Elle a précisé l’avoir vu quand elle est sortie de son bureau et que tous étaient déjà sortis de la voiture. Ce sont d’autres personnes qui lui ont dit que c’est Philippe Hategekimana qui l’avait amené. Elle s’est dit à ce moment-là en le voyant qu’il avait probablement été sévèrement battu. Ils sont venus faire le plein d’essence et manger avant de repartir à bord du pick-up de couleur blanche. Elle a vu des civils mais n’a pas pu les compter. Un gendarme, escorte de Birikunzira, qui aurait assisté à la scène, lui aurait raconté que l’accusé avait exécuté le bourgmestre. Le Président l’interroge ensuite sur ses déclarations lorsqu’elle a affirmé que Philippe Hategekimana a un jour pris un mortier de 60 et a dit : « Je vais aller m’occuper des gens de l’ISAR Songa ». Elle confirme. Le Président s’interroge car devant le TPIR elle avait déclaré que ce n’était pas un mortier mais une mitraillette. Elle affirme avoir tout le temps parlé de mortier de 60. Le Président lui lit ensuite ses déclarations sur l’attitude de l’accusé : il était très préoccupé par ce qu’il se passait à l’extérieur, il sortait souvent, il était acharné et content de ce qu’il se passait à l’extérieur pendant le génocide, il lui tardait que ce qui se passait à Kigali arrive à Nyanza. Elle confirme. Selon elle, Philippe Hategekimana et les gendarmes extrémistes avaient « soif du commencement des massacres à Nyanza ».

Le Président l’a ensuite interrogé sur sa mutation à Kigali. Elle explique avoir été mutée le 14 ou 15 mai, avant Philippe Hategekimana. Elle dit avoir la preuve que l’accusé était encore à Nyanza après cela. Sa grande-sœur est venue avec son enfant lui rendre visite au camp pensant qu’elle était encore là. Elle a demandé un moyen de transport et Philippe les a transportés jusqu’à un camp de réfugiés. Elle a finalement expliqué au Président que ce n’était pas par rapport à l’épisode de son avortement clandestin qu’elle accusait Philippe Hategekimana, elle ne souhaite pas se venger. Le Président lui a finalement demandé si elle subissait une quelconque pression pour faire son témoignage. Elle a répondu que non, tout ce qu’elle dit vient d’elle.

Le ministère public l’a également questionnée sur ces déclarations antérieures. Elle a dit devant le TPIR que dans les années 1990 des personnes étaient ramenées à la gendarmerie et sauvagement battues et enfermées en raison de leur ethnie Tutsi. Elle répond qu’elle a vu cela à Kigali. A la question de savoir si ces gens étaient notés sur un fichier, elle mentionne un groupe de gendarmes dédié à cela. Ce fichier s’appelait le fichier central. L’ethnie y figurait. L’avocate générale a ensuite demandé si Philippe Hategekimana avait aussi un surnom. Elle dit que oui, Biguma. Elle a ensuite demandé s’il était victime de menaces de la part de gendarmes extrémistes. Elle répond que non au contraire c’était avec eux qu’il travaillait. En revanche elle dit ne pas l’avoir vu donner d’ordres. Elle l’a simplement entendu dire qu’il se rendait à l’ISAR Songa et qu’il avait participé à l’attaque des militaires de l’ESO.

Me Guedj a ensuite interrogé le témoin. Il lui a demandé comment elle savait que Philippe Hategekimana n’avait pas empêché la commission des massacres. Elle répond qu’elle savait qu’il partait tuer. Il lui a demandé si elle avait vu l’accusé partir en voiture avec le bourgmestre Nyagasaza et les civils Tutsi. Elle dit que non mais qu’il n’était plus dans le camp quand ils sont partis. On lui a dit qu’il était avec eux. Me Guedj insiste sur le fait que ses déclarations ne sont pas claires du tout. Il dit : « on comprend que certains souvenirs sont très clairs et d’autres non ».

Avant d’interroger le second témoin, le Président a souhaité rendre la décision de la Cour s’agissant de l’incident soulevé par la défense hier sur l’autorité de la chose jugée. La Cour a décidé de ne pas faire droit à cette demande, au regard des faits qui sont portés devant la Cour et qui ne l’étaient pas devant le tribunal de première instance de Butare (les barrières, le site de l’ISAR Songa et la colline de Nyabubare). Egalement, l’accusé n’a jamais subi la peine prononcée par le tribunal et le jugement rendu n’est pas définitif.

Pélagie Uwizeyimana a ensuite été entendue. Infirmière au camp de la gendarmerie de Nyanza en 1994, elle est également citée par l’accusation. Elle déclare avoir travaillé avec Philippe Hategekimana jusqu’à ce que celui-ci parte en mai pour Kigali. Elle-même est partie en juin avec le reste des gendarmes quand on leur a demandé d’évacuer. Elle pense que l’accusé était très actif dans le génocide. Il faisait partie des trois chefs principaux avec le commandant Birikunzira et le sous-lieutenant. Philippe Hategekimana s’occupait du placement du personnel. Pendant le génocide, c’est lui qui plaçait ceux qui allaient tuer à l’extérieur et aussi du matériel utilisé. Elle a remarqué qu’il faisait de la ségrégation raciale entre Hutu et Tutsi. Il avait un langage qu’elle qualifie de méchant. Il disait par exemple « ces chiens de Tutsi ». Elle ne l’a pas vu personnellement en train de tuer, mais les équipes qui partaient se vantaient en revenant d’avoir tué et d’avoir ramené des biens qu’ils avaient pillés.

Le Président lui a posé une question s’agissant rivalité nord/sud entre gendarmes. Elle n’a pas vraiment répondu, elle a surtout parlé de persécutions qui ont commencé pendant le génocide à l’égard des gendarmes Tutsi. C’est notamment ce qui est arrivé à ses collègues Angélique Tesire et Déogratias Mafene (un collègue infirmier). Tesire était persécutée selon elle par Philippe Hategekimana. Pour elle, il faisait partie des gendarmes extrémistes, il n’aimait pas les Tutsi. Elle déclare également qu’il était proche du gendarme NTAWILINGIRA. Pendant le génocide, ils partaient ensemble sur une barrière et ils ramassaient des gens pour les ramener à la brigade. Ces gens étaient enfermés et une fois qu’ils étaient assez nombreux ils étaient amenés pour se faire tuer ailleurs. Elle dit le savoir grâce notamment au gendarme Fidèle NDAMYUGABE qui lui a dit.

Interrogée par le président sur la venue des militaires de l’ESO, elle dit que c’est à partir de là que les tueries ont commencé. Ils étaient mélangés aux miliciens. Elle ne se rappelle pas si l’accusé a eu un rôle dans leur accueil. Interrogée sur le bourgmestre Nyagasaza, elle dit les avoir vus sortir du camp à bord d’une Toyota Hilux. Le véhicule revenait du bureau du commandant où le bourgmestre avait été présenté à Birikunzira. Elle ne se rappelle pas avoir vu des civils Tutsi à bord. C’est ce même jour que des combats violents ont eu lieu à Ntyazo où beaucoup de Tutsi sont morts. Interrogée sur l’attaque de la colline de Nyabubare, elle dit en avoir entendu parler car deux gendarmes y ont été légèrement blessés. Elle ne sait rien sur la colline de Nyamure. S’agissant de l’ISAR Songa, elle sait que des militaires y sont allés tuer avec des armes de gros calibre. Elle dit avoir vu l’accusé sortir du stock d’armes au camp de la gendarmerie avec un mortier. Le Président lui a demandé si l’accusé avait tenté d’empêcher les massacres. Il ne les a pas empêchés selon elle puisque c’est lui qui les dirigeait.

Le Président a ensuite voulu savoir vers quelle date l’accusé avait quitté la gendarmerie de Nyanza. Le témoin affirme qu’il est parti vers le 15 mai. En tout cas il était présent au mois d’avril et il était parti lorsqu’ils se sont fait évacuer en juin. Le Président lui fait ensuite remarquer qu’il lui avait posé des questions qui ne lui avaient jamais été posées auparavant. Il lui demande pourquoi est-ce que c’est la première fois qu’elle parle de tout cela. Elle répond qu’il arrive parfois qu’on ne se rappelle pas tout, parfois il faut qu’on nous mentionne certaines choses pour qu’on s’en souvienne. Le Président lui a finalement posé la même question qu’Angélique sur d’éventuelles pressions pour faire ce témoignage. Elle a répondu que tout ce qu’elle avait dit, personne ne l’a jamais forcée à le dire.

Le Président a donné la parole en premier à la défense. Me Guedj lui a demandé comment elle pouvait affirmer aujourd’hui devant la Cour que Philippe Hategekimana était un extrémiste alors que lors de son audition en 2016 elle avait été incapable de dire s’il avait tenu des propos extrémistes. Elle répond qu’on ne lui a jamais posé des questions dessus. C’est au fur et à mesure des questions que l’on nous pose que l’on se souvient de ce qu’on a vu et entendu. En 2016, on a été auditionné un peu par surprise, pas le temps de mettre ses idées en ordre. Me Guedj se demande alors laquelle des trois versions (elle a été auditionnée deux fois) qu’elle a donnée on doit croire, il ne comprend pas. Il lui a ensuite fait remarquer qu’elle n’avait jamais mentionné la mort du bourgmestre Nyagasaza en 2016. Il lui rappelle qu’elle est sous serment, et que vraisemblablement elle ment à la Cour et aux jurés. Le Président insiste pour avoir une réponse du témoin sur cette question du bourgmestre. Elle répète qu’elle n’avait à l’époque pas encore mis ses idées en ordres. Le Président lui demande si on l’a aidé à organiser ses idées, ce qu’elle nie. Elle dit s’être assise et avoir réfléchi seule. Elle avait vu beaucoup de choses qu’elle n’avait pas réalisées. Me Sarah Marie lui a ensuite demandé dans quel camp est-ce qu’elle s’était réfugiée une fois arrivée au Zaïre et si on lui avait dit de changer de nom. Elle a affirmé s’être réfugiée au camp de Panzi et qu’on ne lui a jamais dit de changer son nom. Elle est revenue s’installer au Rwanda sous son vrai nom et dit avoir été bien accueillie.

Me Tapie a notamment rappelé les déclarations de Régine Waintrater, qui affirmait que les survivants pouvaient avoir des flous. Me Karongozi est ensuite revenu sur la question des mutations. Le témoin a affirmé que Mafene, Tesire et l’accusé sont tous partis le même mois mais Angélique est partie avant Philippe Hategekimana. Elle a également indiqué que Mafene et Tesire ont été mutés car persécutés, ils étaient les « adversaires » de Philippe. L’avocate générale lui a ensuite demandé si l’accusé avait un surnom. Elle répond qu’on le surnommait Biguma. C’était le seul qui était surnommé comme ça à la gendarmerie de Nyanza.

Me Guedj lui a ensuite demandé si elle avait vu l’accusé dans les camps de réfugiés au Zaïre. Elle a expliqué l’avoir vu mais qu’elle est restée et lui a continué sa route. Me Guedj a demandé au témoin décrire l’accusé. Elle le décrit comme pas très grand, de forte corpulence et qui sourit beaucoup. L’avocat demande à l’accusé de se lever pour que la Cour apprécie s’il est vraiment de forte corpulence. Il dit lui demander ça car elle dit dans ses auditions l’avoir vu au camp de Bukavu alors que lui était au camp de Kashusha. Elle explique que pour aller au camp de Kashusha il faut obligatoirement passer par Bukavu. C’est là qu’elle l’a vu. L’avocat a demandé à l’accusé de s’exprimer. Philippe Hategekimana a confirmé ce qu’a dit le témoin.

L’audience a ensuite repris vers 15h30. Le Président a souhaité entendre l’accusé sur ce qu’il s’était dit dans la matinée. Il affirme ne pas être extrémiste. Il conteste ce qu’ont dit les témoins ce matin et maintien qu’il était menacé par ceux qui l’était. Le Président a ensuite voulu revenir sur la date de son départ de Nyanza, car aucun témoin n’a confirmé la date qu’il a donnée, à savoir le 19 avril. Pour lui, les témoins mentent car elles sont là uniquement pour le charger. Ce sont des gendarmes qui ont intégré le FPR ensuite. À la question de savoir s’il sortait souvent du camp, il a répondu que oui quand il accompagnait les gendarmes pour les relèves ainsi que pour leur apporter de la nourriture. Le Président lui a ensuite demandé s’il se rappelait avoir croisé Pélagie au cas de Bukavu. Il a répondu que non car elle était au camp de Panzi. Le Président lui demande alors s’il a conscience que pour l’instant tout ce que vous dites contredit les déclarations des témoins. Il dit ne pas comprendre la question. Sur la question de l’épisode de l’avortement de Tesire, il insiste sur le fait que l’initiative ne venait pas de lui mais de Birikunzira, il n’aurait jamais pu le faire seul. Le Président lui fait remarquer que dans le dossier il ne l’a jamais raconté comme cela. Il est ensuite revenu sur les armes présentes à la gendarmerie. L’accusé parle d’armes individuelles, d’une mitrailleuse et d’un mortier. Le Président lui demande comment cela se faisait qu’à l’époque des civils soient armés d’armes à feu. Il affirme que c’était illégal pour les civils, mais peut-être que les militaires leur en ont donné.

Me Philippart a ensuite demandé à l’accusé des précisions sur la date de son départ au regard de l’épisode avec la soeur d’Angélique. En effet, Hategekimana a dit lors de la confrontation avec le témoin qu’il situait cet événement fin avril, mais il a affirmé aussi être parti de Nyanza le 19 avril. L’accusé a répondu être parti en avril et qu’il a toujours dit ne pas se souvenir de la date exacte. Me Philippart rétorque qu’il a donné comme repère de son départ le discours du président à Butare où il disait être à Kigali. Il répond ne pas vouloir commenter. Le Président insiste car nous sommes dans le flou sur quelque chose d’essentiel, mais il n’aura pas plus de réponse. Me Epoma a cité ensuite les autres témoins qui ont affirmé que l’accusé était parti plus tard que ce qu’il raconte. Le Président lui demande ensuite comment cela se faisait qu’il affirme avoir empêché la commission des massacres par les gendarmes tout en affirmant être parti avant les grands massacres. L’accuse rétorque qu’il a empêché les massacres après le 6 avril. Ils ont même rassemblé les gendarmes pour dire de ne pas aller massacrer des civils qui n’ont rien à voir avec la politique. Me Epoma a ensuite rappelé qu’il avait affirmé dans ses déclarations que des gendarmes tuaient des Tutsi et revenaient en se vantant de leurs exploits. Le Président a lu suite à cela, les passages des déclarations où il affirmait avoir « peur » car ils étaient « fous ». Il y disait également avoir vu des gens morts aux barrières. Le Président fini par dire : « on comprend que vous étiez présent au début des massacres le 21 avril ». L’accusé dira ne pas vouloir faire de commentaire.

Me Karongozi lui a demandé ensuite pourquoi c’était à lui que l’on avait demandé d’interroger Tesire. Après avoir répété sans cesse qu’il fallait le demander à Birikunzira, il a fini par répondre que c’est parce qu’il s’occupait du personnel. L’accusé a affirmé qu’il sortait régulièrement lors des relèves le matin et le soir. Le Président a rebondi en lui demandant pourquoi alors est-ce que devant le juge d’instruction il a affirmé ne jamais être sorti du camp. Il répond qu’il n’a pas pu dire ça.

L’avocat général lui a demandé s’il y avait eu un apport d’armes pendant le génocide. Il a répondu que non il s’agissait des mêmes depuis des années. Répondant à la question de l’avocat général, il a affirmé avoir lu aussi qu’il participait aux missions de sécurisation des meetings politiques. L’avocate générale lui a ensuite demandé à partir de quel événement il se raccrochait pour estimer son départ. Il répond à aucun. Le colonel Rutayisire a affirmé qu’il était arrivé mi-mai. Il a répondu que lui, avait été pendant 2 ou 3 semaines avant dans un bataillon. Le Président s’étonne car l’autre jour il a dit qu’il y était resté 1 semaine. L’accusé ne donnera pas plus de précisions.

Le dernier témoin de la journée est Fidèle MVUYUKURE, entendu en vertu du pouvoir discrétionnaire du Président à la demande de la défense depuis Kigali. Au départ, il dit ne pas connaitre l’accusé, jusqu’à ce qu’on lui donne le nom de Biguma. A l’époque, il était chauffeur-motard (taxi-moto précise le Président) et il le voyait comme le chef de la gendarmerie de Nyanza. Il ne savait rien de ses fonctions exactes ou de son grade. Il dit au départ ne pas l’avoir croisé entre avril et juillet 1994. Le Président lui demande ensuite pour quelles raisons est-ce qu’il a été condamné. Il répond avoir été condamné par la juridiction Gacaca à 16 ans de prison pour avoir gardé une barrière, celle de Rwesero. Il dit ensuite avoir croisé l’accusé une fois lorsqu’il était à la barrière. Il était à bord du véhicule Toyota avec d’autres gendarmes. Il n’a pas non plus fait attention s’il y avait été à Nyagasaza. Il n’a rien vu de ses propres yeux s’agissant de ce qu’a fait l’accusé pendant le génocide à Nyanza. Il dit en revanche ensuite l’avoir vu à la barrière de Rwesero en juillet, mais c’était il y a longtemps. Me Lotte pour la défense lui a demandé s’il connaissait Albert Kabera. Si au départ il affirme ne pas le connaitre, l’avocat a lui rappelé qu’il a affirmé que c’était quelqu’un qui mentait, qui faisait des accusations mensongères. Il affirme qu’effectivement, c’était son voisin et il était l’un des témoins dans son procès durant lequel il a menti.

Pour terminer la journée, le Président a lu le témoignage d’un témoin anonyme devant le TPIR. Il s’agissait d’une femme qui avait affirmé que Philippe Hategekimana était adjudant-chef de la gendarmerie de Nyanza dont la population s’était plainte. Ce serait pour cette raison qu’il aurait été muté, après qu’une enquête ait eu lieu. C’est le seul témoin qui parle de cela. Interrogé par le Président, l’accusé répond ne pas savoir de quoi elle parle.

Par Léna Jaouen, Stagiaire Commission Juridique Ibuka France

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024