Fiche du document numéro 34257

Num
34257
Date
Lundi 11 septembre 2023
Amj
Taille
110934
Titre
Allocution d’ouverture de la session de Paris du colloque international
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Discours
Langue
FR
Citation
En Sorbonne, le 11 septembre 2023

Madame Chrysoula Zacharopoulou
Secrétaire d'État auprès de la ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, chargée du développement et des partenariats internationaux

Monsieur le ministre,
Monsieur le professeur, cher Vincent Duclert,
Mesdames et Messieurs les chercheuses et chercheurs, étudiantes et étudiants

Patrick Boucheron disait que l’histoire, c’est l’art de se souvenir de ce dont on est capable : du pire comme du meilleur.

Le travail historique est donc un art. Mais c’est surtout un devoir pour chaque nation.

Vous le savez mieux que personne. Nous avons le devoir de comprendre, de commémorer et de transmettre le souvenir de cette nuit interminable qu’ont traversé les Tutsi au Rwanda.

Durant ces trois mois, l’humanité s’est éclipsée. Le pire s’est banalisé.

Les traques, les fuites, les coups, les chants, les cris, les fosses, les plaies, les blessures. Des cicatrices profondes et durables au cœur de la nation rwandaise.

Alors oui, nous avons un devoir de nous souvenir.

Nous souvenir de ce million de vies ôtées, de ces millions de destins brisés et d’enfants traumatisés.

Nous souvenir de tous ces noms, ces visages, ces innombrables histoires tragiques qu’il y a derrière le terme de génocide.

Nous souvenir de cet engrenage mortel qui a mené de la stigmatisation à la haine, puis à la persécution, et au génocide perpétré contre les Tutsi.

Nous devons, comme a su le faire le peuple rwandais, trouver sans cesse le courage de comprendre l’impensable, de nommer l’indicible, et d’enseigner l’effroyable.

Nous devons regarder cette histoire en face : droit dans les yeux. Nous devons avoir le courage d’en voir toute la complexité, tous les silences, et d’en tirer toutes les leçons.

Et c’est ce que nous faisons, depuis quelques années.

Bien sûr, il a fallu du courage politique : celui des Présidents Emmanuel Macron et Paul Kagamé.

Sous leur impulsion, nous marchons ensemble, résolument, sur le chemin de la vérité, de la lucidité et du courage.

Nous avons engagé un dialogue mémoriel indispensable.

Et ce chemin, il est tracé grâce à vous, les historiens, qui en êtes comme souvent les éclaireurs.

Sans l’ouverture des archives et le travail de la recherche historique, rien n’aurait été possible.

Je tiens donc à saluer, une nouvelle fois, le travail approfondi, précis, et exigeant, qu’a mené la commission d’historiens, présidée par le professeur Vincent Duclert que je veux particulièrement saluer et remercier. Au même moment, le gouvernement rwandais recevait la conclusions du rapport Muse qui allaient dans le même sens que celles du rapport Duclert.

Ce travail historique a permis la reconnaissance officielle de nos responsabilités. Des responsabilités lourdes et accablantes, comme l’a reconnu le Président de la République à Kigali le 27 mai 2021, pendant un déplacement historique dont nous gardons tous un souvenir particulièrement émouvant.

Ce travail historique a aussi permis des actes concrets.

En commençant par des actes judiciaires.

Il n’y a pas de paix, ni d’avenir possible, sans une justice pleinement efficace.

Monsieur le ministre de la justice, je sais l’importance de ce sujet pour vous et le peuple rwandais. C’est pour cela que la France s’est engagée à renforcer notre coopération pour la lutte contre l’impunité.

Et ce travail historique a aussi permis des actes mémoriels concrets.

Le 7 avril dernier, nous nous sommes engagés à ériger un mémorial au cœur de la ville de Paris. Il […] un hommage national, visible et permanent à la mémoire des victimes du génocide perpétré contre les Tutsi.

Et je veux saluer la mairie de Paris, l’association Ibuka, ainsi que le ministère de la Culture, pour ce travail qui permettra de graver la mémoire du génocide des Tutsi dans le marbre parisien.d’un monument national.

Ce travail historique, mesdames et messieurs, nous a permis d’ouvrir une nouvelle page de la relation franco rwandaise. La reprise de nos relations, la réouverture du centre culturel francophone, le redémarrage de nos échanges sont d’excellentes nouvelles pour nos deux pays, la naissance d’une communauté scientifique entre nos deux pays, unie dans la recherche de la vérité scientifique comme en témoignent la premier session de votre colloque au Rwanda en septembre dernier et cette seconde session qui s’ouvre aujourd’hui à Paris.

Grâce à votre travail sur le passé, nous regardons l’avenir ensemble.

Mais ce travail historique, il doit se poursuivre. La recherche de la vérité, le travail de dialogue et l’effort de lucidité doivent se poursuivre.
Parce que la commission Duclert a ouvert de nouvelles perspectives, et que ses membres eux-mêmes expriment une volonté d’approfondir leur travail.

Ce colloque est un très bel exemple. Il nous rappelle le succès du premier colloque, organisé à Kigali l’année dernière.

Il témoigne surtout de l’excellence de la coopération scientifique entre les chercheurs de nos deux pays. Et je me réjouis de voir notamment de nombreux jeunes historiens dans la salle.

C’est à vous qu’il reviendra de reprendre le flambeau

C’est vous qui porterez la plume du souvenir.

C’est vous serez les garants, dans les années à venir, le chemin du dialogue et de la vérité.

Vous poursuivrez ainsi un travail historique. Historique, dans tous les sens du terme, en reconnaissant le legs de grands anciens, ce fait d’avoir compris le risque inouï de génocide et de ne pas avoir été entendus. C’est notre douleur, qu’aujourd’hui vous apaisez par ce travail commun qui se poursuit, aujourd’hui sous les ors de la Sorbonne.

Et nous continuerons d’écrire cette nouvelle page de l’histoire franco-rwandaise, une histoire désormais commune, et pour longtemps. .

Je vous remercie.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024