Comment avez-vous commencé à intervenir en milieu scolaire ?
J’habite en France depuis 15 ans, d’abord à Lyon puis dans les Vosges et maintenant à Bar-le-Duc. Partout où je m’installe, de par mon histoire et mon témoignage, si ce n’est pas moi qui cherche, certaines écoles ou associations m’invitent à témoigner. C’est parfois compliqué d’enseigner le génocide sans avoir de témoin.
Donc, j’interviens pour parler de ce que c’est, de mon histoire. Depuis peu, le génocide perpétré au Rwanda est rentré dans les manuels scolaires. J’ai pensé que c’était important de continuer de parler de ça dans les lycées et les collèges.
Comment êtes-vous venu à écrire votre livre, Vivant ?
Je l’ai écrit après les attentats de Paris, en 2015. À ce moment-là, j’étais bénévole avec des éducateurs dans la région lyonnaise.
Certains jeunes justifiaient cet attentat. Ça me mettait en colère. Donc j’ai commencé à leur raconter mon histoire. J’essayais de leur expliquer qu’il n’y avait aucune justification à tuer quelqu’un.
J’ai voulu écrire mon livre pour les jeunes. Lors du génocide, j’avais 7 ans, donc j’ai essayé d’écrire en fonction de ce que je me rappelais. J’ai écrit ce que je voyais, ce que je sentais, ce que je comprenais. C’est un livre d’un adulte qui raconte ce qu’il a vécu en tant qu’enfant.
Qu’en disent les jeunes que vous rencontrez ?
Pour les enfants, ça paraît lointain : c’était il y a trente ans en Afrique. J’ai l’impression que d’en parler, ça devient réel pour eux. Il y en a qui peuvent ressentir de l’émotion. J’essaye d’aborder la question de la discrimination car elle précède le génocide au Rwanda. Cette question leur parle. Je leur explique que quand on arrivait en classe, on nous demandait de nous lever pour nous humilier.
Normalement, les élèves lisent le livre et sont préparés par leurs professeurs. Ils peuvent me poser toutes les questions qu’ils veulent. On m’a déjà demandé « quel bon moment as-tu vécu pendant le génocide ? ». Il a duré cent jours mais on ne vit pas tous les jours l’horreur.
Êtes-vous retourné au Rwanda ?
Oui, j’y suis retourné en 2021, après avoir quitté le Rwanda en 2007 après le bac. L’année dernière, j’y suis allé deux fois pour préparer un documentaire : en février pour faire du repérage, en août pour le tournage. J’y retourne en février pour faire le montage.
Je veux que tout le travail soit fait au Rwanda. La sortie de mon documentaire se fera au cinéma Confluences le 25 mai, à l’occasion des commémorations des 30 ans du génocide.