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Depuis 1994, il n'est pas un jour où nous n'avons pas prononcé le mot 'génocide'", cette phrase plane sur toute la BD. Elle est un constat et un combat. Le couple Dafroza et Alain Gauthier poursuit, depuis près de trente ans, les génocidaires qui ont échappé à la justice. En 1994, plus d’un million de personnes meurent au Rwanda dans des conditions atroces, exterminées parce que "Tutsis". Pendant près d’une centaine de jours, les massacres s’enchaînent sous les yeux horrifiés du monde. C’était "le dernier génocide du XX
e siècle". Parmi les donneurs d’ordres, et/ou ceux qui ont tenu eux-mêmes les machettes, des officiels "hutus". Parmi les victimes, de nombreux proches de Dafroza Gauthier. En 1994, la jeune chimiste d’origine rwandaise vivait à Reims avec son mari et leurs trois enfants. Leur vie est bouleversée à jamais par ce génocide.
Un long combat
Dafroza et Alain Gauthier apprennent assez vite que des Rwandais, accusés d’avoir participé au génocide, se sont réfugiés en France. Un long combat commence, un combat pour la mémoire et la justice. Ils se lancent à leur poursuite. Ils seraient nombreux, entre 200 et 400. Objectif : réunir assez d’informations pour les traduire en justice en France. Ils fondent le Collectif des parties civiles pour le Rwanda. Le roman graphique
Rwanda, à la poursuite des génocidaires (éditions Les Escales/Steinkis) suit donc le couple qui se rend plusieurs fois par an dans ce petit pays enclavé d'Afrique de l'Est pour recueillir des témoignages et des preuves. Le temps urge : les témoins vieillissent et disparaissent. Dafroza et Alain Gauthier connaissent des petites victoires et de grandes frustrations.
La justice est lente. "
Il faudra probablement encore plus de vingt ans pour arriver à juger tous les gens contre lesquels nous avons déposé plainte, et d'ici là beaucoup ne seront plus en vie", déplore Alain Gauthier. Au titre de la "compétence universelle" exercée sous certaines conditions par la France pour juger les crimes les plus graves commis hors de son sol, la justice française a déjà condamné définitivement plusieurs Rwandais.
Rwanda, à la poursuite des génocidaires s’attache à raconter une aventure humaine, familiale, sur fond d’une tragédie historique. Thomas Zribi et Damien Roudeau ont signé une œuvre d’utilité publique. Il y avait
Deogratias de Jean-Philippe Stassen, il y a aussi désormais
Rwanda, à la poursuite des génocidaires, la première œuvre narrant le génocide, la seconde le combat pour la justice.
"Rwanda, à la poursuite des génocidaires", Thomas Zribi et Damien Roudeau, éditions Les Escales/Steinkis, 24 euros