Résumé
In this text which announces the breakup of the Coalition for the Defense of the Republic (CDR) with Habyarimana, the French ambassador expresses his disapproval of the peace agreements, both the recent ceasefire agreement and that on sharing of power signed in January. He supports the CDR, which represents in his eyes the "Hutu nationalism" inherited from the revolution of 1959 and considers like CDR that President Habyarimana, "a head of state who finally failed everything", is to be replaced. He thus shows that French leaders, allied with Hutu extremists, have considered replacing President Habyarimana. Pierre Joxe, Minister of Defense and Marcel Debarge, Minister of Cooperation, also consider that Habyarimana is responsible for the rout of his army, which was saved at the end of February 1993 by the French military intervention of which Colonel Tauzin prides himself. This analysis is dissonant compared to the concert of testimonies of support for Habyarimana that French politicians will make hear after his death. The support of the ambassador to the CDR, representative of "Hutu nationalism", shows that he considers Rwanda, like the French military, like the Hutu country, therefore that the Tutsi are foreigners and enemies there.
Citation
MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
5.6. TD Kigali, 11 mars 1993, Position du CDR sur les accords
de Dar es Salaam
Déclassifié
OBJET : POSITION DU C.D.R. SUR LES ACCORDS DE DAR ES SALAM
LE PARTI CDR A PUBLIÉ POUR LA PREMIÈRE FOIS HIER UN COMMUNIQUÉ DE
PRESSE DANS LEQUEL IL CONDAMNE À LA FOIS LE PRÉSIDENT HABYARIMANA ET
LE PREMIER MINISTRE. CE COMMUNIQUÉ INSISTE SUR TOUS LES ASPECTS DES
ACCORDS DE DAR ES SALAM QUI AFFAIBLISSENT LA CAPACITÉ DE DÉFENSE DU
PAYS : L'ARRÊT DES RECRUTEMENTS MILITAIRES ET DES ACQUISITIONS
D'ARMEMENTS, LA RENONCIATION À LA DÉFENSE CIVILE ET SURTOUT À LA
PROTECTION DES ÉTRANGERS, CETTE DERNIÈRE RENONCIATION ÉTANT
CONSACRÉE PAR LE DÉPART DES FORCES FRANÇAISES.
''LE PARTI CDR, EST-TL PRECISE, A ETE PROFONDEMENT CHOQUE PAR
L'ATTITUDE DE M. HABYARIMANA JUVENAL, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, QUI A
APPROUVE LE CONTENU DU COMMUNIQUE QUI LESE MANIFESTEMENT LES INTERETS DU
PEUPLE RWANDAIS. CECI MONTRE CLAIREMENT QUE M. HABYARIMANA JUVENAL,
PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, NE SE PREOCCUPE PLUS DES INTERETS DE LA
NATION, IL A PLUTOT D'AUTRES INTERETS À DEFENDRE''.
CETTE RUPTURE AVEC LE PRÉSIDENT HABYARIMANA, MÊME SI ELLE N'EST PEUT
ÊTRE ENCORE QU'APPARENTE, POURRAIT BIEN MARQUER UN TOURNANT DANS
L'ÉVOLUTION POLITIQUE DU RWANDA. SI LA REPRISE DES NÉGOCIATIONS
D'ARUSHA SE PRÉCISE, ELLE NE POURRA ABOUTIR QU'À LA CONFIRMATION
D'UNE CLÉ DE PARTAGE DU POUVOIR, À LAQUELLE LES OBSERVATEURS
OCCIDENTAUX ONT ACCORDÉ LEUR BÉNÉDICTION, QUI CONSACRE NON SEULEMENT
L'EFFACEMENT POLITIQUE DU PRÉSIDENT HABYARIMANA, MAIS AUSSI REND
ALÉATOIRE LA DIRECTION QUE POURRAIT MAINTENIR LE PREMIER MINISTRE ET
SON MOUVEMENT DÉMOCRATIQUE RÉPUBLICAIN AU SEIN DU GOUVERNEMENT. SUR
VINGT POSTES MINISTÉRIELS EN EFFET, CINQ SERONT ATTRIBUÉS AU FPR ET
TROIS AU PARTI LIBÉRAL, DONT LES CHEFS DE FILE SE DISTINGUENT DE
MOINS EN MOINS, DANS LEURS PROPOS, DE L'OPPOSITION ARMÉE. AINSI
CELLE-CI DISPOSERA D'UNE MINORITÉ DE BLOCAGE DONT LE CHEF DE L'ÉTAT
SERA LUI-MÊME PRIVÉ ET DONT LE MDR NE POURRA S'ASSURER
ÉVENTUELLEMENT QU'EN SE TROUVANT DES ALLIANCES.
ON PEUT IMAGINER QUE LE FPR, MOUVEMENT STRUCTURÉ ET DISCIPLINÉ,
FORMÉ DANS LA LUTTE ARMÉE, POURRA, S'IL CONSERVE SA COHÉSION
ACTUELLE, JOUER UN RÔLE DÉTERMINANT DANS UN GOUVERNEMENT DONT LES
AUTRES MINISTRES RESTERONT HÉSITANTS ET DIVISÉS. IL POURRA AUSSI
FACILITER L'INFILTRATION DANS LES ALLÉES DU POUVOIR -- CIVIL ET
MILITAIRE --, D'UNE MINORITÉ TUTSI DONT LES ÉLÉMENTS INTÉRIEURS
SERONT RENFORCÉS PAR LE RETOUR, AU MOINS PARTIEL, DE LA DIASPORA.
DANS CE SCÉNARIO, IL N'Y A PLUS DE PLACE POUR LE
NATIONALISME HUTU. C'EST POURTANT LUI QUI A ÉTÉ LE COURANT
PORTEUR DE LA PREMIÈRE RÉPUBLIQUE ET QUI A SOUS-TENDU LA SECONDE.
IL S'APPUIE SUR DES THÈMES ANCESTRAUX FACILES À DÉVELOPPER, ET DONT
L'ÉVOLUTION SOCIO-CULTURELLE DES TRENTE DERNIÈRES ANNÉES N'A PAS
RÉUSSI À EFFACER LA MARQUE. LE CDR QUOIQU'ANIMÉ PAR DES
INTELLECTUELS QUI NE SE DISTINGUENT GUÈRE, SUR LE PLAN
ANTHROPOLOGIQUE, DE LEURS HOMOLOGUES DES AUTRES PARTIS, EXPLOITE CE
COURANT PORTEUR. OR, CE MOUVEMENT A ÉTÉ EXCLU, DE FAÇON TOUT
À FAIT ARBITRAIRE, DU POUVOIR POLITIQUE DE TRANSITION. IL NE PEUT
QUE SE RECONNAÎTRE DE MOINS EN MOINS DANS UN CHEF D'ÉTAT QUI
A FINALEMENT TOUT RATÉ, AUSSI BIEN LA GUERRE QUE LA
RÉCONCILIATION, ACCUSÉ PAR LES UNS D'AVOIR FAVORISÉ LES TUTSI DANS
LES PREMIÈRES ANNÉES DE SON MANDAT, ÉTIQUETÉ PAR LES AUTRES COMME UN
DICTATEUR SANGUINAIRE.
SI LE FPR NE PARVIENT PAS À L'ÉLIMINER PAR LA VIOLENCE, ET SI LA
RÈGLE DU JEU DÉMOCRATIQUE DÉFINIE À ARUSHA TROUVE SON APPLICATION,
LE CDR, PRIVÉ DE TOUTE PARTICIPATION À LA GESTION DE L'ÉTAT, APPUYÉ
PAR UNE GRANDE PARTIE DE L'ARMÉE QUI SE JUGERA TRAHIE ET PAR DES
POPULATIONS DU NORD DU PAYS QUI ONT ÉTÉ SCIEMMENT FRAPPÉES PAR LE
FPR PARCE QU'ELLES ÉTAIENT LES PLUS ``DURES'', AURA TOUT LOISIR DE
CRITIQUER DES MINISTRES DONT LES PRÉOCCUPATIONS, PENDANT LA PÉRIODE
TRANSITOIRE, SERONT PLUS INFLUENCÉES PAR LA PRÉSERVATION DE LEURS
INTÉRÊTS POLITIQUES QUE PAR LES IMMENSES PROBLÈMES, FINANCIERS,
ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX, QUE LE PAYS VA DEVOIR RÉSOUDRE À TRÈS COURT
TERME.
IL RESTERA AU CDR À SE TROUVER UN AUTRE CHEF QU'UN PRÉSIDENT
USÉ PAR VINGT ANNÉES DE POUVOIR ET PAR UNE CAMPAGNE DE
DIFFAMATION INTERNATIONALE TELLEMENT PERFORMANTE QU'ELLE EN FAIT
OUBLIER L'UTILITÉ DE RECHERCHER LES PREUVES SUR LESQUELLES ELLE
S'APPUIE.
MARTRES