Résumé
- Defense Minister François Léotard confirmed the departure today of the last French soldiers still present in Rwanda. Belgium has also taken the decision to withdraw all its blue helmets deployed in its former colony.
- Fighting resumed this morning in the capital Kigali and the airport was bombarded with rockets.
- Kigali in the eye of the storm. Here are some of the Rwandan Patriotic Front rebels posted on the hills surrounding Kigali. The main body waits at the gates of the city until the evacuations of foreigners are completed to go on the offensive.
- At dawn, fighting broke out against the government forces which still control the center of the city, the southern suburbs and the airport. Six mortar shells fell on the tarmac without injuring the French, Belgian soldiers and foreign nationals.
- Kigali lives in terror: the Hutu, soldiers or civilians, fear being in turn massacred by the Tutsi rebels in retaliation after the carnage which caused thousands of deaths. 30 members of the Red Cross were also murdered.
- Yesterday [April 13], on the road to the airport, Belgian soldiers had to open fire to protect compatriots evacuated in an emergency. This time it was government army soldiers gone hysterical who targeted the Blue Helmets.
- So Belgium decided to repatriate its strong contingent of 400 men, leaving its former colony to dissolve in chaos. The last French soldiers also left the country, 500 in total had come to help the United Nations force.
- The rebels gave the foreign troops 24 hours to pack up. Refusing for the moment to negotiate with the government forces, they barely hide behind their smile their thirst for revenge.
- In Kigali misfortune adds to misfortune: the capital of Rwanda is indeed one of the cities most affected in the world by the AIDS virus. It is estimated that one in three adults is infected. And it was precisely to take care of some forty orphans, themselves affected by AIDS, that a young Frenchman had come to Rwanda on a humanitarian mission. He refused to be evacuated and therefore to abandon the children entrusted to him.
- Marc Vaiter: "When you see children crying because you're being picked up, I think you can't help but stay. I've been with the children for seven months. They know me, I can't abandon them. It's love, it's not courage. There are deaths every day in my area. Finally when there is a major shooting, we all go into a small corridor and then we protect ourselves with the mattresses. There are traumatized children, there are those who have seen their parents die in front of their eyes. We have a three-year-old child who does not stop crying, he does not eat. So we try a little little to relieve him of the fears he has. And then we also had a child who was beaten, his forehead was cut open. He received a blow from an ax. […] I don't know how we are going to do to the rest because we have very, very little money. The situation is really very, very difficult".
Citation
[Bruno Masure :] Le ministre de la Défense François Léotard a confirmé le départ aujourd'hui des derniers militaires français encore présents au Rwanda. La Belgique a également pris la décision de retirer tous ses Casques bleus déployés dans son ancienne colonie.
Les combats ont repris, euh, ce matin dans la capitale Kigali et l'aéroport a été bombardé à la roquette. Florence Mavic.
[Florence Mavic :] Kigali dans l'œil du cyclone. Voici quelques-uns des rebelles du Front patriotique du Rwanda postés sur les collines qui encerclent Kigali [on voit des soldats du FPR en train de préparer un tir d'artillerie ; une incrustation "Hauteurs de Kigali (Rwanda)" s'affiche à l'écran].
Le gros des troupes attend aux portes de la ville que les évacuations d'étrangers soient terminées pour passer à l'offensive [on voit un soldat du FPR en train de scruter une carte du Rwanda plaquée sur la porte de son véhicule ; derrière lui, des militaires chantent et dansent].
À l'aube, des combats se sont engagés contre les forces gouvernementales qui contrôlent toujours le centre de la ville, les faubourgs du sud et l'aéroport [on voit notamment un soldat du FPR en train de tirer à l'arme lourde]. Six obus de mortier sont tombés sur le tarmac sans faire de blessés parmi les soldats français, belges et les ressortissants étrangers [on voit un convoi des Nations unies puis une voiture chargée de miliciens faire signe à la caméra qui les filme depuis un véhicule].
Kigali vit dans la terreur : les Hutu -- soldats ou civils -- craignent d'être à leur tour massacrés par les rebelles tutsi en représailles après le carnage qui a fait des milliers de morts. 30 membres de la Croix-Rouge ont été également assassinés [on voit un blindé et une voiture Toyota des FAR devant une barrière de miliciens].
Hier [13 avril], sur la route de l'aéroport, les soldats belges ont dû ouvrir le feu pour protéger des compatriotes évacués dans l'urgence. Cette fois c'étaient des soldats de l'armée gouvernementale devenus hystériques qui ont pris comme cible les Casques bleus [on voit des soldats belges, probablement de l'opération Silver Back, effectuer des tirs de défense depuis leurs véhicules marqués "UN"].
Alors la Belgique a décidé de rapatrier son contingent fort de 400 hommes, laissant son ancienne colonie se diluer dans le chaos. Les derniers militaires français ont également quitté le pays, 500 au total étaient venus aider la force des Nations unies [on voit le convoi belge rouler à vive allure pour échapper aux tirs des FAR].
Les rebelles avaient donné 24 heures aux troupes étrangères pour plier bagages. Refusant pour le moment de négocier avec les forces gouvernementales, ils cachent mal derrière leur sourire leur soif de vengeance [gros plan sur des soldats du FPR en train de chanter et danser].
[Bruno Masure :] À Kigali le malheur s'ajoute au malheur : la capitale du Rwanda est en effet l'une des villes les plus touchées au monde par le virus du SIDA. On estime qu'un adulte sur trois est infecté. Et c'est pour s'occuper précisément d'une quarantaine d'orphelins, eux-mêmes touchés par le SIDA, qu'un jeune Français était venu au Rwanda en mission humanitaire. Il a refusé d'être évacué et donc d'abandonner les enfants qui lui avaient été confiés. Patricia Coste a réussi à joindre au téléphone cet homme qui ne cache pas sa peur -- vous allez l'entendre. Je vous propose d'écouter ce témoignage tout à fait poignant.
[Patricia Coste interviewe à présent par téléphone Marc Vaiter.]
Patricia Coste : Et c'est extrêmement courageux de votre part d'être resté, comme ça ?
Marc Vaiter [durant tout l'entretien une incrustation "Monsieur Vaiter, Kigali - par téléphone" s'affiche en bas de l'écran] : Oh non, c'est de l'amour, hein. Je pense que y'a…, y'a pas de courage, c'est l'amour. Parce que quand vous voyez des enfants pleurer, euh, parce qu'on vient vous chercher, je crois que on ne peut pas faire autrement que de partir…, que…, que de rester, hein. Vous savez, bon, euh, ça fait sept mois que je suis avec les enfants. Bon, ils me connaissent. Bon, je…, je peux pas les abandonner, hein. C'est de l'amour, c'est pas du courage.
Patricia Coste : Dans votre zone à vous est-ce qu'il y a des combats autour de votre maison ?
Marc Vaiter : Ah oui, naturellement ! Vous savez, y'a…, y'a des morts tous les jours, hein, dans…, dans…, dans ma zone, hein. Enfin quand y'a surtout des…, euh, des…, une fusillade importante, on rentre tous dans un petit couloir puis on…, on se protège avec les matelas. Voilà comment qu'on fait.
Patricia Coste : Avec les matelas ?
Marc Vaiter : Oui avec les matelas [sourire]. Bah oui ! On [sourire]…, vous savez on a que ça, hein, je…
Patricia Coste : Et comment réagissent les enfants ?
Marc Vaiter : Bah, euh, ça va parce que je suis là, alors donc, euh…, je crois que c'est…, c'est important pour eux que je sois resté. Vous voyez je me dis, euh…, voilà, bon [inaudible].
Patricia Coste : Est-ce qu'ils sont traumatisés, euh… ?
Marc Vaiter : Ah oui ! Il y en a qui le sont, hein. Il y en a… Ah oui, oui, oui. Ben vous savez, y'en a qui ont vu leurs parents, euh, mourir devant leurs yeux, hein. Ça il faut être conscient de…, de ça, hein.
Patricia Coste : Ouais.
Marc Vaiter : On a…, on a un enfant, je sais pas, il a…, il a trois ans, bon il arrête pas de pleurer, il mange pas. Vous voyez. Donc on essaie de…, on essaie un petit peu de…, de lui enlever les frayeurs qu'il a. Et puis là, on a eu aussi un enfant qui a été battu, il a le front ouvert. Vous voyez, bon c'est… Il a reçu un coup de…, de hachette et puis voilà, bon. Qu'est-ce que vous voulez.
Patricia Coste : Et vous avez les moyens de le soigner ?
Marc Vaiter : Bon, on avait les…, les…, des compresses, on avait des…, du sparadrap. On a des…, du mercurochrome, voilà.
Patricia Coste : Comment est-ce que vous êtes ravitaillés ?
Marc Vaiter : Eh bien, je vous dis, y'a…, y'a des gens qui vont au marché pour nous, actuellement. Et puis, euh…, après, ben, je…, je sais pas comment que les choses… Parce qu'on a très, très peu d'argent. La…, la situation est vraiment très, très…, très, très difficile, quoi.
Patricia Coste : Et vous…
Marc Vaiter : Et je ne sais pas jusqu'à quand on pourra, euh, tenir, hein.
Patricia Coste : Et vous êtes protégés par qui alors ?
Marc Vaiter : Ah ! Par Dieu. Ah ça, je…, je reconnais… Moi…, moi, vous savez, moi, j'y pense très fortement à Dieu. Et je…, je crois [inaudible], bon, Dieu nous protège [pendant toute la durée de l'interview sont diffusés des gros plans de visages d'enfants en pleurs mais également des images de maisons dévastées, de réfugiés et de miliciens].