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La Croix L’Hebdo : Zénith, Olympia, petites salles, plein air : vous êtes en tournée depuis cet été. Qu’est-ce que ça fait de retrouver la scène après une si longue période de confinement ?
Gaël Faye : Depuis presque un an et demi que je n’étais pas monté sur scène, j’avais peur de ne plus savoir comment faire. Rien que se retrouver avec les musiciens était compliqué. L’un vit à Kigali, deux autres habitent à Paris. Sans compter les équipes techniques un peu partout… Pendant la tournée, nous sommes une quinzaine sur la route. On a fait que reporter, reporter la tournée, ne sachant pas jusqu’à la dernière minute si ce serait assis, masqués, avec ou sans jauges…
J’avais la crainte qu’on nous annonce au dernier moment qu’on ne pouvait plus monter sur scène. Nous avons préparé un Olympia en quatre jours, ce qui ne m’est jamais arrivé. Difficile de présenter quelque chose qui tienne la route aux gens dans une telle incertitude. Mais ce qui est fou, c’est que les gens ont tellement envie de revoir des concerts que ça leur est égal si ça n’est pas parfait. Et c’est là que ça devient parfait ! La présence des gens, l’envie de revoir de la musique en live, de sentir l’énergie du collectif, ça nous porte et ça rend cette tournée magique.
Vous aimez dire qu’un concert, c’est l’addition de nos solitudes…
G. F. : Je crois qu’on se rend à un concert pour sentir une communion, pour ressentir la même émotion que son voisin inconnu. Je me souviens d’un de mes premiers concerts, c’était le chanteur congolais Bonga au Bataclan. Tout à coup, il nous a invités à danser ensemble, on s’est tous mis à se tenir la main, on passait de personne en personne… Je me souviens de ce moment où la liberté se trouvait autant dans le public que sur scène. En concert, je me sens un peu comme un maître de cérémonie, un MC, comme on dit dans le hip-hop. Je dis au public : « OK je viens, je fais mes chansons, je vous raconte une histoire, mais ce qui va se passer ce soir, c’est autant votre énergie que la mienne. » Un peu comme lorsqu’on reçoit des invités à dîner chez soi.
Vous avez grandi au Burundi. En quoi croit-on, là-bas ?
G. F. : C’est toujours délicat de parler de moi d’une façon générale, j’étais métis et j’avais donc une place particulière dans la société burundaise. Mon père est français, ma mère rwandaise tutsie. Ma mère est partie assez tôt, j’ai grandi avec mon père. Il était herpétologiste, spécialiste des reptiles, donc nous avons passé beaucoup de temps avec les populations autochtones, les Pygmées, qui vivent près de la forêt, ou dedans.
Nous allions à la chasse au serpent. Ces populations ne croyaient pas en Dieu et n’allaient pas à l’église. Elles avaient des croyances animistes. Pour moi, ça restait assez flou, je ne comprenais pas tout, mais je sentais que, pour elles, il y avait d’autres forces. Vu de France, quand on parle de ça, ça fait tout de suite très exotique, mais ça l’était moins au Burundi dans mon enfance. Lorsque quelqu’un était malade, on ne l’emmenait pas à l’hôpital mais voir le sorcier. Cela brouille un peu nos croyances.
Quelles croyances ?
G. F. : J’ai grandi dans le catholicisme. Mon arrière-grand-mère avait vu l’arrivée des premiers colons. Avant ça, elle croyait à la divinité Imana, un dieu unique du Burundi et du Rwanda, qui ont d’ailleurs été appelés les « pays du Christ-Roi », car les populations n’étaient pas animistes. Cela a permis de les convertir très facilement. Imana a été remplacé par le dieu unique de la Bible. Quand les premiers colons ont évangélisé le pays, tout s’est un peu mélangé dans l’esprit de mon arrière-grand-mère. Trois générations plus tard, dans mon enfance à moi, il y avait des églises pleines à craquer. Le dimanche, on était sapés terrible…
Je me souviens de la visite de Jean-Paul II en 1990. Nous étions en bord de route sur des kilomètres et des kilomètres, avec des tee-shirts à l’effigie du pape. Mon père, lui, était anarchiste, il n’avait pas voulu nous baptiser, ma sœur et moi. Mais il nous envoyait tous les week-ends chez ma grand-mère rwandaise qui, elle, était très pieuse.
Lorsqu’elle nous emmenait à l’église, on nous mettait à part, parce qu’on n’était pas baptisés. On ne pouvait pas recevoir l’hostie, et c’était la honte pour ma grand-mère. Je me sentais exclu. Déjà que j’étais métis, je n’étais pas non plus baptisé… Un jour, vers mes 9 ans, on s’est rebellés avec ma sœur, pour faire du catéchisme. C’est ma grand-mère qui a tout organisé. On a fait de l’intensif pour rattraper notre retard… (Il s’en amuse.) Je me suis fait baptiser. J’étais très fier, vraiment très fier.
Est-ce qu’il reste une place pour Dieu dans votre vie aujourd’hui ?
G. F. : J’ai été un enfant du catéchisme, j’associais Dieu aux livres, à la Bible, au clergé. Et 1994, ça a été une déflagration. Quand nos familles ont été massacrées dans des églises, quand des prêtres qui nous avaient baptisés ont été impliqués… Ça a été une grande remise en question de l’honnêteté et de l’humanité des êtres qui nous avaient enseigné l’amour de Dieu. Au Rwanda, beaucoup ont d’ailleurs changé de religion. Les hommes et les femmes d’Église sont faillibles, c’est ce que cette période de l’Histoire m’a appris. En 1994, j’avais 11 ans et l’Église représentait tout. Et, donc, tout s’est effondré.
Je suis aujourd’hui dans un collectif qui s’appelle le CPCR, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda. Nous travaillons à poursuivre, entre autres, des hommes et des femmes d’Église qui ont participé activement à cette élimination. Alors pour vous répondre, Dieu, oui. La religion, j’y vais avec plus de prudence. J’ai eu besoin de me marier à l’église, de faire baptiser mes enfants. Je chemine. Mais je n’ai pas encore rencontré de prêtre ou de religieux capable de poser des mots sincères et profonds sur ce qu’on a traversé. J’ai l’impression qu’il y a encore trop d’éléments de langage de la part de l’institution.
Comment avez-vous vécu l’année que nous venons de passer, consacrée à la commémoration du génocide des Tutsis ?
G. F. : La France et le Rwanda sont mes deux pays, mais ils ont une histoire liée par la violence. Il y a eu un déni pendant longtemps des responsabilités des pouvoirs français à l’époque. Donc j’ai vécu ces derniers mois comme une avancée extraordinaire, entre le rapport Duclert, le déplacement de Macron et son discours…
Attention, ça ne reste qu’une avancée, et non un chapitre qu’on peut refermer. Pour nous, Franco-Rwandais, un génocide ne s’arrête jamais. Ça poursuit des générations, ça poursuit les mémoires. On a reconnu ce qu’on aurait déjà dû reconnaître il y a trente ans, mais nous sommes un peuple patient, et nous patienterons encore. Aujourd’hui il reste des procès à faire, il y a encore des zones d’ombre et des excuses à fournir que le président n’a pas fournies. Il y a encore du chemin, mais il y a eu une avancée extraordinaire, et ça, il faut le reconnaître.
Vous êtes partis vivre au Rwanda il y a quelques années, avec votre femme franco-rwandaise et vos filles de 8 et 11 ans. Comment le vivez-vous ?
G. F. : C’est une découverte. J’ai grandi au Burundi, le Rwanda je ne connaissais pas. C’est un pays jeune, parce que l’an 1994 est là-bas comme une année zéro. Le Rwanda d’aujourd’hui n’a rien à voir avec le Rwanda d’avant. Tout a changé. L’âge médian est autour de 19 ans, tous ces jeunes n’ont pas vécu le génocide. Je suis dans la découverte tous les jours, parce que le pays lui-même se découvre tous les jours, se cherche. Il a ses défis, il a ses fantômes aussi.
L’exercice de la mémoire y est très délicat. Depuis le génocide des Tutsis au Rwanda, les mentions ethniques ont été interdites et il est interdit de se définir en tant que Hutu ou Tutsi. Tout le monde est rwandais. Les mots « hutu » et « tutsi » sont des mots que les enfants ne connaissent plus. Lorsque ma fille m’a demandé « C’est quoi tutsi ? », il m’a fallu lui répondre qu’aujourd’hui nous n’étions plus hutus ou tutsis, qu’on était tous rwandais, mais qu’il fallait quand même qu’elle sache que ça avait existé. Le pays se cherche, voilà. Au Burundi voisin, c’est l’inverse, il y a des quotas. Il faut 60 % de Tutsis, 40 % de Hutus dans toutes les instances représentatives.
Jusqu’où a-t-on besoin de rage pour porter son combat ?
G. F. : Mon maître d’espérance, c’est René Depestre. Il disait que l’homme doit osciller entre la tendresse et la révolte. Il n’y a pas de grande tendresse sans grande révolte. Lorsqu’on est révolté avec de la haine, on court à son propre péril. Il ne peut donc y avoir que des révoltes pleines de tendresse. C’est ce que je ressens avec le rap. On entend souvent les gens dire que c’est une musique violente. Vraiment ? Moi, je n’entends que des chanteurs appartenant à un endroit, étant attachés à des gens, tenant à une histoire, à leur dignité.
Plus jeune, quand j’écoutais certaines chansons de variété, je me disais : « Mais ils vivent dans quel monde ? » Aligner des mots pour aligner des mots, je n’ai jamais compris. J’ai toujours cette impression que lorsqu’on fait une phrase, il faut qu’elle pèse lourd. Pour moi, en ce sens, Ferré, Brel, Brassens appartiennent au monde des rappeurs. Leurs textes sont ancrés, ils ont un pied dans le sol. Mon père me racontait que Brel effrayait les adultes dans sa jeunesse. Il y avait trop de mots, trop de densité. Moi j’aime cette densité-là, j’aime les poètes denses.
Le français est une langue qui a été créée pour peser. C’est une langue qui propulse, ce n’est pas une langue intérieure, qui ronronne. C’est une langue percussive qui tape, qui frappe. Je sais qu’il y a des gens que ça rebute. J’ai toujours eu l’impression que le rap, c’était comme si on enfilait des perles d’aphorismes. Je suis tombé dedans à l’adolescence, un âge de l’absolu, j’avais besoin d’une musique frontale. Les mots ont un poids, un sens, une résonance, une histoire. Ils doivent tout porter à la fois. Moi-même j’avance à tâtons lorsque j’écris.
Votre chanson « Irruption » s’attaque avec férocité à des stéréotypes qui perdurent en France : « On nous appelle pédés, blancos, bougnoules ou bien nègres »… À qui parlez-vous ?
G. F. : J’ai écrit cette chanson à la suite d’une autre, « Je pars », qui avait été détournée par des sites de la fachosphère disant : « Enfin un qui a décidé de partir par lui-même, tant mieux. » La chanson évoquait pourtant un « je pars » rimbaldien, je ne parlais pas de moi en particulier… Mais peu importe, ce qui surtout m’a fait bondir, c’est le flot d’injures et de racisme. Je me suis dit qu’il fallait que je leur réponde. Voilà ce que je leur ai dit : « Vous savez quoi ? On est là, et on restera. Vous pensez que nous, enfants de l’immigration et des minorités, nous arrivons de l’extérieur, mais nous sortons d’une terre en irruption. Comme un volcan que vous ne pourrez pas contenir. »
J’ai employé leurs mots à eux, pour que leur arme résonne contre eux-mêmes. Quand je chante : « Le tirailleur t’emmerde, il a fécondé ta grand-mère », c’est violent, dit comme ça, mais en fait, c’est beau. Les tirailleurs sénégalais, en venant libérer la France, ont eu des histoires d’amour avec des femmes dans des villages. Ça veut dire qu’aucun racisme ne vaincra ces amours. Je ressens une peur et un risque dans notre société de ne plus arriver à dialoguer. On finit par être dans une position « pour et contre », on ne cherche pas à comprendre l’autre, alors qu’il faudrait toujours penser contre soi. C’est la clé de la démocratie, réussir toujours à penser contre soi. J’essaie parfois de comprendre comment pense un facho, de me mettre dans ses baskets, de comprendre sa haine. Je ne l’excuse pas, mais je peux le comprendre.
Dans « Petit pays », vous écriviez : « La poésie n’est pas de l’information. Pourtant c’est la seule chose qu’un être humain retiendra de son passage sur terre. Je détourne le regard de ces images, elles disent le réel, pas la vérité. » Cette réflexion interroge sur le lien ténu entre poésie, information, et vérité. Qu’est-ce qui, de tout ça, raconte le mieux le réel ?
G. F. : Gabriel, le personnage principal de mon livre, voit le traitement qui est fait de l’information des réfugiés qui arrivent sur le sol européen, c’est là qu’il dit ça. Il constate qu’on nous parle toujours de chiffres, de statistiques. On parle des gens comme de dossiers, alors que ce sont des vies humaines, avec leurs aspérités, leurs contradictions, leur complexité. L’information déteste la nuance.
Même sans avoir à écrire un article de journal, décrire les choses dans toutes leurs aspérités est difficile. Je l’ai vu avec le traitement fait sur le Burundi et le Rwanda, on l’a réduit à un conflit ethnique. Ça arrange les partis politiques qui, quels qu’ils soient, s’appuient sur cette grille qui rend la société lisible en un clin d’œil. On sépare les gens en leur faisant croire que les groupes sont toujours homogènes, alors qu’à l’intérieur il y a des tensions, des différences, de la complexité. On ne pourra jamais tout englober, tout raconter.
Malheureusement, tellement d’histoires sont perdues à jamais.
Mais, en tant qu’écrivain, j’essaie de sauver quelques silences. Je viens d’un monde où ce sont des millions d’histoires qui se sont tues à jamais. Au Rwanda, c’est vertigineux, toutes ces petites histoires de tant de gens. J’essaie de faire advenir un peu de ces mondes disparus. Le monde continue d’avancer, s’il n’y a pas quelqu’un qui s’arrête à un moment avec une épuisette pour recueillir ces échos, ils se perdront à jamais.
Vous vous sentez investi d’une mission ?
G. F. : Je pense que l’écrivain accompagne le travail des historiens, des chercheurs, de la société, dans un devoir de mémoire. J’ai été un témoin, mais je ne me sens pas victime. Je n’ai pas une histoire lourde au point d’être incapable d’en parler. Cet équilibre-là est assez rare dans la région. Il y a des gens qui auraient beaucoup à dire mais qui n’ont pas la force. Je les côtoie. J’ai vu, j’ai ressenti, j’ai éprouvé ce qui les traverse. Finalement, je suis dans une position particulière qui me pèse parfois.
Je m’en suis rendu compte avec mon roman Petit pays. Avoir fait le tour du monde avec un livre, avoir fait découvrir une histoire à tant de gens qui l’ignoraient. On m’avait dit : « Tu ne vas pas encore écrire un livre sur le Rwanda ! » Et c’est vrai, j’en avais lu tellement des livres sur le Rwanda, sur le Burundi, je pensais que tout le monde connaissait cette histoire. Mais en fait, il n’y aura jamais assez de livres pour faire le tour de la question. La forme joue pour beaucoup. Je pense que jamais il n’y avait eu un petit garçon qui avait tenu la main de ses lecteurs en leur disant : « Tiens, je ne sais pas non plus, je ne connais pas, mais on va apprendre cette histoire ensemble. »
C’est la magie de la littérature. Par exemple, j’avais entendu parler des harkis, mais jamais je n’ai ressenti ce que j’ai ressenti lorsque j’ai lu L’Art de perdre d’Alice Zeniter. Tout à coup, c’est toute une famille qui me raconte son histoire. Et je me sens harki. Je comprends les paradoxes, les tensions, et les trahisons. Je ne les intellectualise pas, je les éprouve.
Vous n’êtes jamais désespéré ?
G. F. : Au Rwanda, au Burundi, je côtoie tellement de gens qui ont tout perdu et qui, malgré tout, restent debout. Ils n’ont eu aucune oreille pour les écouter. Vis-à-vis d’eux, je ressens de la pudeur et du respect. Je suis tellement privilégié que la moindre des choses, c’est d’offrir la lumière et l’espérance. Ça ne veut pas dire être optimiste, ou positiver. C’est plutôt se dire que chaque matin est une offrande. Et recommencer.
Dans ma chanson Petit pays, je dis être parfois entre le suicide et le meurtre, entre ma colère et mon désespoir. Mais je me dois de donner à cette vie qui continue. Parce qu’il y a des générations qui arrivent. Il y a des vieux qui ne se laissent pas tomber. Et puis il y a des gens qui en ont besoin, pour qui les mots sont des bouées. Rejoindre l’espérance, c’est juste une politesse à l’égard de la vie.
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Gaël Faye en aparté
♦ Ses dates
1982. Il naît à Bujumbura, au Burundi, d’une mère rwandaise et d’un père français.
1995. Il quitte son pays pour rejoindre la France, en plein cœur de la guerre civile qui a éclaté deux ans plus tôt. Sa famille s’installe dans les Yvelines.
2005. Il obtient un master en finance et commence à travailler pour un fonds d’investissement à Londres, où il restera deux ans.
2009. Il quitte la capitale britannique pour se consacrer pleinement à sa passion, le rap et le hip-hop, et sort un premier album avec son groupe Milk Coffee and Sugar.
2013. Il sort son premier album solo, Pili Pili sur un croissant au beurre, pour lequel il reçoit le prix Charles-Cros des lycéens de la nouvelle chanson francophone.
2016. Il publie Petit pays, aux éditions Grasset, inspiré de sa propre enfance, qui reçoit notamment le prix Goncourt des lycéens.
2018. Aux Victoires de la musique, il remporte le prix dans la catégorie révélation scène.
2021. Il sort son dernier album, Lundi méchant.
♦ Une qualité
L’écoute
« Parce que c’est le plus difficile. Écouter l’autre, écouter le monde, c’est dur. Ça en fait une qualité très rare. Quelqu’un qui sait écouter, on le sent tout de suite. Tout comme quelqu’un qui sait s’écouter lui-même, chose qui est peut-être encore plus dure. »
♦ Le premier instrument que j’ai touché
Un tambour du Burundi
« J’étais plus petit que le tambour, qui doit peser 30 kg ! Les tambourinaires du Burundi sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Ils s’entraînaient pas loin de chez moi, à Bujumbura, j’allais à leurs répétitions. Ils se mettaient en arc de cercle et il y avait un tambour au milieu, c’était impressionnant. Parfois je tapais avec des baguettes sur les tambours. J’étais tout petit, les musiciens me portaient, j’avais 3 ans. »
♦ Le dernier instrument que je tiendrai dans mes mains
Un stylo