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Les génocides sont souvent planifiés et mis en
œuvre par les Etats. Au Rwanda, s'ajouterait à cette
caractéristique, selon l'historien rwandais Jean-Paul
Kimonyo, la participation massive de la population.
Les milices interahamwe auraient notamment
bénéficié de l'aide des habitants « ordinaires » pour
capturer et séquestrer les victimes. C'est pourquoi le
nombre des inculpés est très élevé : huit cent vingt mille
personnes en 2005 pour une population d'environ sept millions.
Comment expliquer cette complicité, cette participation
populaires au crime de masse ? Aux explications traditionnelles
(dégâts de l'idéologie coloniale, rouages autoritaires de l'appareil
d'Etat), Kimonyo ajoute la mise au jour du maillage intellectuel et
institutionnel qui a permis de briser les résistances au génocide
sur le terrain. Au début des massacres, en effet, des communes se
sont opposées aux milices. Le consensus créé par les génocidaires
au travers d'une stratégie d'élimination systématique des
opposants, dans un climat de peur, a eu raison de ces résistances.
Appuyé sur des exemples précis, le travail de Kimonyo aide à
décortiquer la mécanique infernale du génocide sans minimiser la
responsabilité des milices interahamwe.
ANNE-CÉCILE ROBERT
Karthala, Paris, 2008, 540 pages, 29 euros.