Fiche du document numéro 27038

Num
27038
Date
Vendredi 25 septembre 2020
Amj
Taille
100157
Sur titre
 
Titre
BNP Paribas rattrapée par ses activités au Soudan auprès du régime d’Omar Al-Bachir 
Sous titre
 Une information judiciaire pour complicité de crimes contre l’humanité, de génocide, d’actes de torture et de barbarie a été ouverte à Paris. La banque a déjà été sanctionnée aux Etats-Unis.
Tres
 
Page
 
Lieu cité
Mot-clé
BNP
Cote
 
Résumé
The BNP Paribas bank, already condemned by the American justice for its actions in Sudan, is the subject of a judicial investigation for complicity in crimes against humanity, genocide, acts of torture and barbarism following the filing of a complaint by nine Sudanese activists, the International Federation for Human Rights (FIDH) and the League for Human Rights. It is recalled that BNP Paribas is also the target of an investigation in France for complicity in crimes against humanity during the genocide of the Tutsi in Rwanda.
 
Source
Extrait de
 
Commentaire
 
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Un an après le dépôt d’une plainte par neuf activistes soudanais, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme, la justice française va enquêter sur les agissements de la banque française BNP Paribas au Soudan, entre 2002 et 2008. Le tribunal de Paris a décidé, le 26 août, d’ouvrir une information judiciaire visant l’établissement bancaire pour complicité de crimes contre l’humanité, de génocide, d’actes de torture et de barbarie. « Nous ne disposons d’aucune information au sujet de cette procédure et nous ne sommes donc pas en mesure de commenter », a indiqué la banque au Monde.

Pour accéder illégalement aux marchés, financer ses exportations de pétrole et probablement pour soutenir sa sale guerre, le régime militaro-islamiste de Khartoum a pu compter sur la première banque de la zone euro et ainsi contourner l’embargo économique américain. Rien qu’entre juillet 2006 et juillet 2007, l’établissement bancaire a « délibérément mouvementé plus de 6,4 milliards de dollars [5,5 milliards d’euros] à travers le système financier américain », peut-on lire dans la plainte. BNP Paribas – notamment à travers sa filiale suisse – était devenue « la banque privée principale et seule correspondante en Europe du gouvernement soudanais et de sa banque centrale ».

Son client était une dictature accusée par Washington de soutenir le terrorisme et par la communauté internationale de massacrer son peuple. La banque française BNP Paribas ne pouvait ignorer que le régime soudanais orchestrait des massacres contre sa population, notamment au Darfour (ouest du pays) à compter de 2003. La situation était qualifiée, en 2004, de « plus grande catastrophe humanitaire actuelle » par les Nations unies. La Cour pénale internationale a plus tard accusé Omar Al-Bachir, le chef d’Etat d’alors (1989-2019), de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide.

Bien consciente de traiter avec des entités soudanaises visées par des sanctions américaines, BNP Paribas avait mis en place un « système sophistiqué de banques satellites » destiné à dissimuler l’origine des fonds transitant dans les tuyaux bancaires à travers le monde. Elle n’ignorait rien non plus des violations des droits de l’homme et des crimes perpétrés contre des civils par ce régime.

La plainte s’inspire de la procédure américaine



La banque française l’a reconnu devant la justice américaine. Le 30 juin 2014, elle a été sanctionnée d’une amende record de 8,9 milliards de dollars infligée par les Etats-Unis pour avoir réalisé des transactions financières illégales avec trois pays soumis à des sanctions économiques : le Soudan, l’Iran et Cuba. Si trois pays étaient concernés, les griefs les plus graves étaient bien concentrés sur le Soudan.

En mars 2007, un responsable de la conformité de BNP Paribas avait d’ailleurs écrit à d’autres hauts responsables du groupe pour leur rappeler que certains des établissements soudanais avec lesquels la banque était en lien « jouaient un rôle central dans le soutien d’un gouvernement qui a hébergé Oussama Ben Laden et refuse l’intervention de l’Organisation des Nations unies au Darfour », avait relaté le ministère américain de la justice après des mois d’enquête.


Sous la menace de poursuites, la banque avait fini par transiger avec les autorités américaines après avoir plaidé coupable d’avoir permis à des entreprises ou à des banques de ces pays de contourner les embargos américains.

La plainte à l’origine de l’ouverture de l’information judiciaire s’inspire de la procédure américaine, largement citée. « Si la banque a reconnu les faits devant les autorités judiciaires américaines, elle doit répondre, en France, de ces crimes qui sont imprescriptibles », dit Me Emmanuel Daoud qui défend la FIDH. Pour le président d’honneur de cette ONG, Me Patrick Baudouin, il est important de souligner que « des crimes commis par le régime soudanais ont été rendus possibles par l’aide ou la complicité de multinationales occidentales qui doivent rendre des comptes ». BNP Paribas est aussi visée par une enquête en France pour complicité de crimes contre l’humanité lors du génocide des Tutsi au Rwanda.

Isabelle Chaperon et Joan Tilouine 

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024