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Les grilles qui protègent l'entrée de la maison sont fermées et tout a l'air endormi dans cette rue des faubourgs de Kigali. Mais à l'intérieur, il y a une femme. Très tendue et très inquiète. Elle est tutsi et son père est un homme d'affaires prospère.
Samedi soir, raconte-t-elle, les soldats rwandais sont venus chez nous. Ils ont demandé à mon père s'il cachait des rebelles ougandais ou des armes. Il a répondu « non ». Il n'y avait personne, et aucune arme à part quelques fusils de chasse. Ils ont fouillé partout, puis ils sont partis. On était plutôt soulagé. Mais, quelques minutes plus tard, ils sont revenus pour demander une autorisation administrative de routine. Mon père ne l'avait pas, mais il a donné le nom du fonctionnaire qui suivait le dossier. Ils l'ont emmené pour vérifier. Depuis, on ne l'a pas revu. Cela fait cinq jours maintenant. Mon père fait des affaires mais pas de politique. Ils n'ont vraiment aucune raison de le garder. On a eu de ses nouvelles, hier, de façon indirecte par un homme qui venait d'être relâché. Il était en prison avec lui dans des conditions épouvantables. Rien à boire, rien à manger. Des tas de prisonniers étaient battus. Il nous a aussi raconté une histoire horrible. Une femme avait été prise dans une rafle et emmenée à la prison. Elle avait un bébé de trois mois qu'elle nourrissait au sein et qui était resté à la maison avec son mari. Ne sachant que faire, le mari est parti à la prison avec l'enfant demander qu'on laisse sa femme le nourrir. Ils ont pris le bébé et l'ont emmené chez sa mère. Deux jours après, la mère et l'enfant étaient morts. De faim.
V. K.
