L’hypothèse vraisemblable d’un attentat du FPR devra être confirmée par l’enquête.
convaincu de la culpabilité de Kagamé dans l’attentat contre l’avion, ce proche de François Mitterrand répond :
En 1995, on n’en savait rien. Avec les années, ma conviction s’est renforcée que c’est probablement Kagamé.
rien, à l’époque, sur cet attentat ? Les éléments auxquels ont eu accès la cellule investigation de Radio France et Mediapart démontrent le contraire. La DGSE (les services extérieurs de renseignement français) a multiplié les notes destinées au sommet de l'État jugeant la piste des extrémistes hutus comme
la plus plausible.
Confidentiel Défenseet datée du 22 septembre 1994 a été déclassifiée par le ministre de la Défense, le 17 septembre 2015, dans le cadre de l’enquête des juges Marc Trévidic et Nathalie Poux sur l’attentat contre le président Habyarimana.
les colonels [Théoneste] Bagosora, ancien directeur de cabinet du ministre de la Défense, et [Laurent] Serubuga, ancien chef d’état-major des Forces armées rwandaises (FAR), comme les principaux commanditaires de l’attentat du 6 avril 1994.
Le haut degré de préparation de cette opération
Le 12 juillet 1994, le Service [la DGSE] avait déjà émis une hypothèse qui, deux mois plus tard, lui semble toujours la plus plausible, insistent les espions français dans cette note, à savoir la responsabilité des
ultrashutus dans l’attentat, désireux d’éliminer un président rwandais jugé trop conciliant avec le FPR de Paul Kagamé.
cerveauxdu génocide des Tutsis (condamné à la prison à vie puis à 35 ans de détention, en appel, par le Tribunal pénal international, et de l’ancien chef d’état-major des armées, Laurent Serubuga, autre acteur clé du génocide, qui s’installe en France dans les années 90.
Tous deux natifs de Karago, à l’instar du défunt président Habyarimana, [Théoneste Bagosora et Laurent Serubuga] se sont longtemps considérés comme les héritiers légitimes du régime, écrit ainsi la DGSE.
Leur mise à la retraite, prononcée en 1992 par le président Habyarimana, alors qu’ils espéraient obtenir le grade de général, avec les privilèges afférents, a été à l’origine d’un lourd ressentiment et d’un rapprochement remarqué auprès de Mme Agathe Habyarimana, veuve du président et considérée souvent comme l’un des principaux cerveaux de la tendance radicale du régime.
Cette opération [l’attentat contre l’avion du président Habyarimana] aurait été préméditée de longue date par les extrémistes hutus, poursuit le renseignement français.
L’assassinat de ministres de l’opposition modérée et de Tutsis, moins d’une demi-heure après l’explosion du Falcon présidentiel, confirmerait le haut degré de préparation de cette opération.
Un complot politique soigneusement préparé
vaste programme de purification ethnique dirigé contre les Tutsis, dont les concepteurs seraient des proches du chef de l'État.
les évènements actuels sont à replacer dans un contexte d’affrontement entre Hutus du nord et Hutus du sud, avec
la possibilité d’un complot politique organisé et soigneusement préparé, comme le montre l’exécution de l’attentat, relativement complexe sur le plan technique.
de la bordure du camp militaire de Kanombe, contrôlé par la garde présidentielle. Les espions français écartent donc, a priori, la responsabilité du FPR dans l’attentat :
l’hypothèse selon laquelle ces roquettes pourraient avoir été tirées par des éléments armés du Front patriotique rwandais (FPR) n’est pas satisfaisante, analyse la DGSE.
Pour pouvoir approcher de l’aéroport, il est nécessaire de franchir plusieurs barrages militaires et la zone est strictement interdite aux civils. Par ailleurs, des patrouilles de gendarmes et de soldats de la Mission d’assistance des Nations unies (MINUAR) quadrillent le terrain. Les roquettes semblent donc avoir été tirées par des personnels bien entraînés et se trouvant déjà dans le périmètre de sécurité de l’aéroport.
zone de tir la plus probabled’où sont partis les missiles se situe sur le
site de Kanombe, quartier général de la garde présidentielle.
faucons du régime
les auteurs du tir sur l’avion ne seraient pas nécessairement le FPR qui est sur sa colline, mais pourraient bien être des militaires qui ne veulent pas la paix.
au Rwanda, chacun pense que c’est le colonel Bagosora qui est responsable de l’attentat contre l’avion présidentiel, ce que confirme, le 15 avril, un informateur du service belge pour qui
ce serait le colonel Bagosora qui se trouve derrière l’attentat contre l’avion présidentiel.
les accusations qui rendent le FPR responsable de l’attentat sont peu vraisemblables, privilégiant plutôt la piste des
faucons du régime.
Des affaires de terreur et d’argent
complotcontre le président Habyarimana qui « semblait décidé, cette fois-ci, à appliquer les accords d’Arusha », c’est-à-dire les négociations politiques aboutissant au partage du pouvoir avec le FPR.
tout fait croire maintenant que les auteurs [de l’attentat] font bien partie de la fraction dure des Ba-Hutus à l’intérieur de l’armée rwandaise. [...] Ce groupe gravitait dans l’orbite de Madame la présidente dont les frères et cousins étaient devenus hauts dignitaires du régime. Ils avaient trempé dans des affaires de terreur et d’argent et il était impensable pour eux de renoncer à leurs privilèges et passe-droits.
grandes oreillesaméricaines
indique à l’ambassadeur David Rawson que des militaires extrémistes Hutus (qui pourraient appartenir à la garde présidentielle) sont responsables de l’attentat contre l’avion qui transportait les présidents rwandais Habyarimana et burundais Ntaryamira.
Les extrémistes Hutus ont probablement abattu l’avion du président.
Il y avait des tas de notes
totalement anachronique, considérant que
la piste du Front patriotique rwandais a finalement été la seule retenue par le rapport de la mission parlementaire puis les juges d'instruction français.
dépistépar la CIA), je le charge. Et je pensais que je pouvais rester encore pour le troisième tour. Un autre courtier, qui était [bien] renseigné me dit : 'Si vous ne partez pas avec cet avion, on va vous arrêter.' Donc je suis rentré, avec l’avion. Le deuxième tour de l’avion, le 19 [juin], j’arrive à Goma, on décharge sur place. Je continue à Kinshasa avec l’avion vide. Les munitions vont être récupérées par le Rwanda après. »
cerveaudu génocide, actuellement détenu au Mali. Les autorités maliennes lui font cette réponse, le 14 février 2018 :
Théoneste Bagosora a indiqué qu’il ne souhaitait pas évoquer ce dossier avec nous, ni être entendu par le magistrat français, et qu’il ne répondrait pas à ses questions.
Il s'agit de la suite mécanique et obligatoire dans le cadre d'un dépôt de plainte de ce type. Cela ne constitue en aucun cas un développement nouveau. Ce sont des faits très anciens datant de 1994. La banque informe qu'elle n'a pas eu communication de la plainte annoncée par voie médiatique, et qu'elle n'en connait donc pas la substance. Dans ces conditions, il n'est pas possible de commenter plus avant.
poisson fraispour masquer des caisses d’armes
Nous avons pu constater qu’il s’agissait d’une transaction commerciale 'à l’africaine'. [...] [Le compte] CHEATA a opéré comme intermédiaire dans une vente de baraques préfabriquées entre l’Afrique du Sud et le Zaïre d’un côté, et l’achat de poissons frais entre les Seychelles et le Zaïre.
poissons frais, comme l’affirme à son gestionnaire de compte l’intermédiaire sud-africain… mais bien de 80 tonnes d’armes.
En 1994, lors de mes relations d’affaire avec M. Ehlers, je n’ai jamais eu le moindre soupçon qu’il pouvait s’agir en fait d’un trafic d’armes, explique Adriano Sala. Les fournitures de poisson pouvaient éventuellement masquer ce commerce d’armes.
bras financierdes génocidaires
la cellule de crisede la banque avec le Rwanda. Son témoignage est éclairant.
Le gouverneur [de la Banque nationale du Rwanda] était une personne très impliquée politiquement avec le pouvoir, je pense à tendance Hutu power [les extrémistes hutus], ce sont des choses que l’on m’a dites à l’époque, explique Jacques Simal au juge Alexandre Baillon qui s’est déplacé en Belgique, le 6 février 2018. Il est à l’origine de tentatives de prélèvements de fonds à la BCR [Banque commerciale du Rwanda] au profit de la banque nationale. Il avait exigé que tous les fonds des banques privées soient rapatriés à la BNR puisqu’en fait, concrètement, le gouvernement intérimaire [soutien des génocidaires] estimait que la BNR était son bras financier. La BNR considérait que les devises détenues par les banques privées lui appartenaient. Pour ma part, je me suis opposé à ces tentatives de prélèvements, à partir du moment où j’agissais à Bruxelles.
Je sais qu’une expédition a été exécutée par l’armée rwandaise à partir de Gitarama vers Kigali, témoigne encore Jacques Simal. Ils ont voulu aller dans la banque pour prendre des fonds. Ils ont pris quelques liquidités, des malles dans lesquelles se trouvaient des traveller's cheques. (…) Quand la BBL [Banque Bruxelles Lambert] a appris ça, il a été décidé de fermer la BCR [Banque commerciale du Rwanda] et de bloquer tous ces traveller's cheques. Ils estimaient que cela contribuait à l’effort de guerre. Un message SWIFT a été envoyé au niveau mondial signalant que plus aucune transaction ne pouvait être acceptée de la banque BCR.
Un besoin crucial d’argent
Dès l’instant où il y a eu cet embargo, il y a eu une réunion au niveau du MAE [ministère des Affaires étrangères] belge pour les aviser des conditions d’application de cet embargo, affirme Jacques Simal. Quand le secrétaire général est rentré de réunion, il nous a communiqué les directives pour qu’aucun transfert de fonds suspects à la demande du Rwanda ne soit exécuté.
Le gouvernement rwandais avait un besoin crucial d’argent. Bien que la raison n’ait jamais été évoquée très clairement, il était évident pour tout le monde qu’ils devaient acheter des armes et des munitions. […] Je me rappelle même que pour forcer la BBL [Banque Bruxelles Lambert], le gouvernement rwandais a envoyé des émissaires pour nous convaincre de libérer des fonds.
Pour moi, il ne s’est rien passé
jamaiseu connaissance :
C’est un sujet qui n’est jamais venu en discussion au conseil restreint [de Défense, à l’Élysée], affirme Jacques Lanxade. Pour une raison simple : les livraisons d’armes étaient interdites par l’embargo décrété par les Nations unies. Pour le chef d’état-major français, que j’étais, il ne s’est rien passé, en tous cas, pas sous mon autorité. Les livraisons d’armes peuvent passer par différents canaux. Les livraisons d’armes, reconnues par la France l’ont été par le canal du ministère de la Coopération, à l’époque, qui n’était pas sous l’autorité du ministre de la Défense, ni du chef d’état-major des armées.
Nous ne contrôlions qu’une partie de ce terrain d’aviation, pour nos propres besoins, qui étaient des besoins militaires. Nous n’avons pas 'chassé' les zaïrois sur ce terrain. Libre à eux de faire ce qu’ils voulaient, dans le cadre des autorisations qu’ils avaient. De toute façon, il n’y avait pas un flux d’armes qui transitait par l’aéroport de Goma.
Ça ne me paraît pas impossible. Il n’y a aucune preuve, il y a peut-être des armes qui sont passées, je n’en sais rien. Je ne peux pas vous répondre là-dessus. Mais je peux vous dire que les forces armées françaises n’ont rien à voir avec ça.
Non, on ne s’est pas posé cette question parce que notre mission n’était pas celle-là. Notre mission c’était d’arrêter les massacres.
un acteur clé du génocide.
fgtquery v.1.9, 9 février 2024