Citation
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Face A de la cassette # 60.
MD -Je sais plus où on en est rendu... des. alors on est au ruban...
PD -Numéro 60. A 14 heures 1 minute.
MD -60, 14 heures 1 minute.
PD -Nous allons poursuivre l’entretien relativement à, aux informations de Madame Pauline.
MD -Alors, c'était. avant de. avant de se faire interrompre par les gardes, on était à discuter de, du
cas de Pauline, vous dites dans votre, ici dans la déclaration, vous écrivez que vous étiez accompagné par
elle dans, dans vos déplacements. Est-ce que c’était à chaque fois que vous vous rendiez dans ce secteur
que vous vous faisiez accompagner par elle ? Quand, quand vous vous rendiez dans la région de Butare,
elle était toujours là ? C’est ça que vous...
K -Ça je ne peux pas préciser parce que je n’ai pas en mémoire toutes les fois que je me suis rendu
à Butare, mais la plupart du temps elle était avec moi.
MD -La plupart du temps elle était avec moi quand vous étiez dans cette région-là.
JK -Oui.
MD -Est-ce qu'elle était aussi avec vous quand vous fai. lors d’autres voyages, dans d’autres régions
du pays ?
JK -Heu... elle est demeuré là où je demeurais tout le temps. Pendant, pendant tout le temps que je suis
resté premier ministre, que ce soit à Gitarama ou à Gisenyi, la visite dont je sais qu’elle m’a accompagné
c’est à Kigali, une fois.
MD -A Kigali, une fois. Vous vous souvenez pas d’autres visites ailleurs dans le pays ?
JK -Non.
MD -Oùelle…. où elle était présente... Vous avez quand même voyagé de façon assez régulière dans le
pays ?
JK -Oui, j'ai.
MD -Comme premier ministre ?
JK -J’ai voyagé de façon assez régulière dans le pays.
MD -Est-ce que c'était commun d’avoir toujours quand vous vous rendiez dans une région, d’avoir le,
le ministre responsable de cette région qui était avec vous ?
JK -La plupart du temps, oui, quand je me rendais dans une région je voyais ou j’étais avec le ministre
responsable de la région.
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PD -Est-ce que vous pourriez nous décrire la barrière que vous avez vue devant l’hôtel, chez Madame
Pauline ?
JK -De quelle manière voulez-vous que je la décrive ?
PD -La décrire physiquement, c’était quoi, c’était comment exactement, c’était quoi, c’était, est-ce qu’il
y avait des gens qui étaient là, est-ce que... est-ce que c’était une barricade faite de bois, faite de vieilles
voitures ou...
JK -Ce n’était pas une barricade faite de bois, il y avait, je sais pas comment on appelle ça, mais je crois
ça devait être du matériel qui venait de l’école, de l’école des sous-officiers. J’ai, je n’ai pas été
physiquement, personnellement sur la barrière, pour constater Le, les gens qui étaient là. Mais je voyais que
ils étaient en treillis militaires, la plupart d’entre eux étaient en treillis militaires, ce qui laissait supposer
que ça pouvait être heu. soit des, des militaires, ou alors des Interahamwe. Et il y en avait, on pouvait
apercevoir qu’il y avait des gens qui, qui étaient en tenue civile.
PD -Ok. Donc c'était une barrière anarchique celle-ci ? Si on prend la même qualification qu’on avait
auparavant.
JK -Je ne la qualifierai pas de cette manière, dans la mesure où il est très fort probable que il y ait eu
des militaires assez régulièrement sur cette barrière-là, et qui la contrôlaient aussi. Je ne peux pas la
qualifier d’anarchique.
MD -Mais est-ce que... elle n’était pas contrôlée nécessairement par les militaires ?
JK -Mais les militaires étaient là. Je ne peux, je ne sais pas qui contrôlait en fait la barrière, si c’est les
civils ou les militaires. Ça je ne peux pas préciser.
MD -Combien de personnes approximativement étaient, étaient sur la barrière pour contrôler ?
JK -Je ne peux pas savoir puisque ils sont... il y avait un roulement et ça dépendait des périodes de la
journée. Il y avait des périodes où il y avait plus de monde, des périodes où il y avait moins de monde, en
fonction de, de la circulation dans la ville.
MD -Mais c’est, ça peut aller, approximativement, est-ce que ça peut aller de, de 5 à 25, mais heu...
JK -Non, je n’ai pas...
MD I] y avait, il y avait plusieurs personnes ?
JK -Je n’ai absolument aucune idée sur le nombre de personnes...
MD -Mais on peut dire qu’il y avait plusieurs personnes ?
JK -Il y avait plusieurs personnes, il n’y avait pas une personne, il n’y avait pas que deux personnes,
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il y avait plusieurs personnes oui.
MD -Et cette barrière-là, est-ce que ça contrôlait toute la circulation qui se faisait dans, dans, sur cette
rue-là ?
JK -De toutes façons...
MD -Les voitures, là, les voitures là, les piétons, les gens.
JK -Oui.
MD -Tout le monde devait absolument, forcément.
JK -Oui.
MD -.… passer par là ?
JK -Oui.
PD -Le matériel que vous dites qu’il provient de l’école des sous-officiers probablement, c’est ça que
j'aimerai que vous me décriviez. La barrière était constituée comment ?
JK -C’est, c’est une sorte de barre, avec des, des piquets qui ressortent de la barre, que les gendarmes
mettent habituellement dans la, dans la rue pour régler la circulation, quand ils ont fermé une route.
PD -Ok. Ça est-ce que c’était sur un principe de levier, ou si c’était quelque chose qu’on déposait sur
le sol ?
JK -C’est quelque chose qu’on déposait sur le sol.
PD -Est-ce qu’il y avait des sacs de sable qui pouvaient servir de, de barricade ?
TK -Non, je n’ai pas vu de sacs de sable.
PD -Ok.
MD -Est-ce que la plupart des barrières étaient constituées de la même façon ?
JK -Non. Parce que la plupart des, des barrières c’était [inaudible] qu’on mettait dans la route ou alors
les, des pneus, des choses comme ça, mais. là c’était du matériel approprié.
MD -Approprié, du matériel qui était fait pour ça.
JK -Oui.
MD -C'est ce qui vous fait dire que ce matériel pouvait, pouvait, provenir...
JK _- [inaudible], aucun civil n’a le droït de posséder un tel matériel. Ça ne pouvait être que du matériel
de l’armée.
MD -D’accord.
PD -A ce moment-là, heu, le fils de Madame Pauline, Monsieur Shalom, c'était quelqu’un qui allait
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travailler sur cette barrière-là ?
JK -D'’après ce qu’on m'a dit, oui, mais moi je ne l’ai pas vu physiquement travailler sur la barrière,
puisque, à l’époque, quand j’allais là-bas, lui était à l’hôtel de son papa.
PD -Vous l’avez vu à l’hôtel. Est-ce que les informations qui vous ont été fournies c’est lors des
enquêtes que vous avez demandées relativement à cette barrière-là ?
JK -Oui, et d’autres conversations que j’ai eues avec d’autres personnes.
PD -Des conversations. Monsieur Shalom était associé à quel groupe ?
JK -Il était considéré comme un Interahamwe.
PD -Est-ce que c'était considéré comme un des chefs des Interahamwe de Butare-ville ou si c’était un
membre, un... quelqu'un de non-influent ?
JK -Je ne peux pas mesurer son influence mais c’était quelqu’un qui était connu comme Interahamwe
dans la ville de Butare.
PD -Ok. A l’époque où vous vous êtes allé à l’hôtel, est-ce que c'était connu que c’était un
Interahamwe?
JK -Oui, c'était connu.
PD -C’était connu. Ok. Est-ce que la famille entière était représenté comme ça, est-ce que c'était les,
le, les qualificatifs qu’on donnait à cette famille-là ?
JK -Ils étaient connus pour être du MRND oui.
PD -Oui. Est-ce qu'ils étaient, est-ce que tous les membres de la famille étaient reconnus pour être des
Interahamwe ?
JK -Tous les membres, je ne parle. je ne vois pas ce que vous voulez dire par tous les membres de la
famille parce qu’il y a des, ils avaient des cousins, ils avaient des soeurs, ils avaient des frères, ils avaient
des oncles, tous les membres. il y avait beaucoup de monde de leur famille à cette époque-là. Tous les
membres de la famille, non.
PD -Ok. C’est ça, tous les membres de leur famille n’étaient pas des Interahamwe ?
JK -Non.
PD -Alors, est-ce que Monsieur Maurice était un Interahamwe, reconnu comme un Interahamwe ?
JK -Si on prend Interahamwe comme les, la jeunesse du parti, non, puisqu’il n’est pas jeune.
PD -Ok. Est-ce qu'il était Interahamwe dans le sens large, dont on a fait la définition précédemment
dans la déclaration, comme quelqu'un actif dans les massacres, quelqu'un actif dans les pillages, quelqu’un
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actif...?
JK -Je n’ai pas entendu parler de son nom dans l’activité des massacres.
PD -Ni Interahamwe ?
JK -Interahamwe comme tel.
PD -Ok. Madame Pauline était-elle reconnue comme une Interahamwe ?
JK -Elle était reconnue comme une membre du MRND.
PD -Mais comme Interahamwe, c’est ça que je vous demande ?
JK -Le, je crois que le, le, Interahamwe comme tel non, puisque elle était ministre et les ministres
Interahamwe... si on considère les ministres du MRND comme Interahamwe, oui. Mais Interahamwe
comme jeunesse du parti, non.
PD -Vous savez, on va, on va pas à la définition jeunesse du parti, on va aller à la définition large qui
a été donnée, comme vous, comme on l’avait expliqué par la suite, qui était heu les gens de la défense
civile, les gens, les gens qui se sont affairés à tuer l’ethnie Tutsi au Rwanda. Est-ce qu’elle était reconnue
pour ça elle ?
JK -Non, elle n’était pas connue pour ça.
PD -Ok. Est-ce qu’il y avait d’autres membres de sa famille rapprochée que vous connaissiez vous, est-
ce que vous connaissiez, première des choses, d’autres personnes de cette famille-là ?
JK -Non.
PD -Vous connaissiez Monsieur Shalom, Monsieur Maurice et Madame Pauline ?
JK -Oui.
PD -Ce sont les trois personnes que vous connaïissiez ?
JK -Oui.
PD -Est-ce que vous savez aujourd’hui s’il existe d’autres membres de cette famille-là dans les, dans
les très près ?
JK -Oui, je le connais aujourd’hui, parce que j’ai eu l’occasion de les connaître.
PD -Vous avez eu l’occasion de les connaître à quelle occasion, de quelle façon avez-vous eu l’occasion
de les connaître, serait-ce pendant la fuite que vous avez faite, les deux familles ensemble ?
JK -La plupart d’entre eux je les ai connu au moment de l’exil.
PD -Au moment de l’exil ?
JK “Oui. D’autres, je les avais déjà aperçus quand, quand je me rendais à leur hôtel.
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Et j'ai, j’ai appris à les connaître quand nous étions en exil.
PD
-Est-ce que ces autres personnes-là ont été identifiées comme étant des Interahamwe dans les, les
discussions et les... les enquêtes que vous avez menées ?
TK
PD
MD
JK
MD
JK
MD
JK
MD
XK
MD
-Je n’en... je n’ai pas entendu leur nom associé aux Interahamwe.
-Parfait.
-Est-ce que, est-ce que Monsieur Maurice habitait, habitait le, la même maison que Pauline ?
-Oui, c’est lui qui était là en permanence.
-Ïl était là en permanence, il était toujours là, quand vous êtes allé là est-ce qu’il était présent ?
-Il était présent.
-Vous l’avez vu là ?
-Il était toujours, il était toujours là.
-Shalom était là ?
-Shalom était là.
-Et on a établi que de l’hôtel, ici on écrit que de l’hôtel c’était impossible de ne pas savoir ce qu’il
se passait sur la barrière, c’est ça, on est d’accord là-dessus ?
JK -Oui, puisque la barrière n’était pas loin de l’hôtel.
MD -Etune barrière c’était, c’est reconnu, une barrière c’était fait pour contrôler les identités ?
JK -Oui.
MD -Etsurles barrières aussi, on exécutait les gens ?
JK -Ça c'était, ça restait à vérifier.
MD -Est-ce que entre, est-ce que durant les massacres les barrières avaient une autre, d’autres usages
que ça ?
JK -Non, les... je, les barrières ont été mises en place effectivement pour contrôler les identités, mais
l’exécution sur les barrières, ça reste à vérifier dans la mesure où toutes les exécutions n’ont pas été
nécessairement faites au niveau des barrières.
MD
XK
MD
JK
-Est-ce qu’il y a eu des exécutions sur les barrières ?
-Il y a eu des exécutions sur les barrières.
-Est-ce qu’il y en a eu beaucoup ?
-]l y en a eu beaucoup. Mais il y a eu des régions où les gens n’ont jamais été exécutés sur les
barrières, tout en étant exécutés. Donc où on les exécutait ailleurs que sur les barrières.
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PD -Alors, pour être précis, dans le cas de cette barrière-là, est-ce que vos informations que vous avez
eues vous ont permis d’apprendre qu’il y avait eu des gens d’exécutés sur cette barrière ?
JK _-A partir de cette barrière, donc directement qu’on ait trouvé des têtes sur cette barrière non, mais
que les gens ont été... pris sur cette barrière pour être exécutés, oui.
PD -Ok.
MD -De l’hôtel, les gens, les gens qui demeuraient à cet endroit ne pouvaient d'aucune façon ne pas
savoir ce qui se passait là ?
JK -Non.
MD -Ok.
JK -Moi je... si je vivais dans cet hôtel, si je l’ai vue, en, en, en tant que visiteur, les gens qui y vivaient
ne pouvaient pas ne pas voir.
MD -Shalom, d’après son comportement, il devait avoir une certaine influence ?
JK -Probablement parmi les jeunes de son, de son âge.
MD -Si.. s’il pouvait se. utiliser une camionnette, la camionnette qu’on, dont on parle dans votre
déclaration, heu, c’était sûrement pas. tous les Interahamwe qui pouvaient avoir un véhicule, avoir accès
à un véhicule de cette façon-là ?
JK -Ce n’était pas un cas isolé. Les Interahamwe se sont appropriés des véhicules pendant les
massacres. Donc les, les Interahamwe avaient beaucoup de véhicules.
MD -Les Interahamwe avaient beaucoup de véhicules. Les Interahamwe qui avaient un véhicule devaient
avoir un certain statut ?
JK -Je ne dirais pas... je ne ferais pas cette alliance-là, donc cette liaison, en disant puisqu’un
Interahamwe avait un véhicule donc il avait un statut, dans la mesure où il y en avait beaucoup, que je ne
connaissais pas avant et qui avaient des véhicules et que je n’ai pas revus après, que je n’ai pas entendus,
dont je n’ai pas entendu parler après et qui avaient pourtant des véhicules.
MD -Le véhicule que Shalom avait particulièrement, appartenait à un commerçant de Butare ?
JK -C'est ce qu’on m'a laissé entendre, moi je n’ai pas vérifié, je n’ai pas eu de, la confirmation que
c'était ça mais d’après les informations que moi j’ai reçues c’est ça.
MD -On vous a laissé, aussi laissé entendre que ce commerçant-là aurait été tué ?
JK -Oui.
MD -A quel moment avez-vous appris ça, le. ?
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JK -Ça j'ai appris quand j'étais en exil.
MD -Vous avez appris ça après ?
JK -Oui.
MD -Est-ce que vous avez vu vous-même Shalom au volant de ce véhicule ?
JK -Oui.
MD -Alors, vous... sans voir, sans avoir été un témoin, vous, vous nous dites que vous avez quand même
fait, le fait qu’il se promenait avec ça, un véhicule, que cette personne avait été assassinée, qu’il pouvait
avoir un véhicule...
JK -C’est, c’est... en tous cas moi je n’oserai pas me promener dans un véhicule de quelqu’un qui a été
assassiné. Parce que c’est... j’aurai peur qu’on me dise que c’est moi qui l’ai assassiné pour prendre son
véhicule.
MD -Est-ce que vous avez déjà appris, est-ce que quelqu'un vous a déjà dit que Shalom était
effectivement impliqué dans des, heu, dans des, dans des tueries, dans des assassinats ?
JK -Dans les... il était, en tous cas, il faisait partie du groupe de jeunes Interahamwe qui opéraient dans
Butare, oui.
MD -Qui opéraient dans Butare...
PD -Précisément, dans le cas de Monsieur François Semanzi [phonétique] , le commerçant, est-ce que
les informations que vous avez eues vous permettent de dire que Shalom était du groupe dont... tel qu’il
est dit dans votre déclaration, qui ont assassiné cette personne ?
JK -D’après les informations que j’ai reçues, oui.
MD -Et ces informations-là vous viennent de quel...
JK -Non, je l’ai.. j’ai dit que j’ai, j’ai parlé avec tellement de gens, que j’ai fait mener des enquêtes,
que je ne peux pas dire voilà untel m’a dit ça, untel m’a dit ça, surtout que certaines déclarations même,
au niveau des enquêtes on les a faites de façon anonyme, pour que les gens puissent accepter de parler.
MD -Mais on vous a dit ça, c’est quelque chose qu’on vous a dit, que, que, quelqu’un vous a dit à un
moment, vous avez appris ça ?
JK -Je ne peux pas avancer un nom comme ça...
MD -[inaudible], c’est ça.
JK -Puisque je, je n’étais pas à Butare, je ne peux pas m’aventurer à dire voilà, untel a été tué, et le
groupe de gens qui l’ont tué, il faisait partie, sans, sans savoir que, effectivement, j’ai entendu ça quelque
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part. Sinon j’aurai pu dire, le dire de tant d’autres personnes qui ont été tuées à Butare.
MD -Alors il en va de même pour les heu, pour les gens qui avaient trouvé refuge à la préfecture, et qui
ont été extraits de nuit, ça c'était le même groupe, c'était le même groupe qui était responsable ?
IK -Là, je n’ai pas de précisions, mais je sais que effectivement des gens s’étaient réfugiés à Butare,
ça c'était une donnée, ça je le sais. Je sais que des gens, qui étaient, parmi les gens qui étaient réfugiés à
Butare, certains sont morts. Et que les groupes qui tuaient, il y avait en partie des soldats, de, en particulier
de l’école des sous-officiers, et des jeunes Interahamwe de la ville. C’est donc les trois informations qui
me laissent penser que personne d’autre de toutes façons n’a pu aller prendre les gens pour les tuer à part
les groupes qui opéraient déjà dans cette ville.
PD -Est-ce qu'au cours des discussions que vous avez eues, il a été porté à votre connaissance par des
témoins que Madame Pauline avait participé à des exactions la nuit là ?
JK -Non.
PD -Ily a jamais personne qui vous a mentionné ça à vous ?
XX -Non.
MD -C’était une famille influente, on peut quand même dire que cette famille-là était influente, la
famille de Pauline était déjà à Butare, c’était une famille bien connue, influente.
JK -Oui c’était une famille influente et bien connue.
PD -Dans le cas de Monsieur Shalom, est-ce que il aurait participé, selon les informations que vous
avez reçues, est-ce qu’il aurait participé à... à ces exactions à la préfecture ?
TK -Je ne peux pas l’associer directement à une opération donnée, mais je peux l’associer au groupe
qui aurait pu faire ces exactions au niveau de la ville.
PD -Il y avait aussi, tout près de leur hôtel, il y avait aussi un endroit où les gens avaient trouvé refuge
avant d’être déplacés vers la préfecture, qui était une école presbytérienne ou je sais pas quoi, quelque
chose comme ça, juste. le même côté que l’hôtel si on revient un peu vers la sortie nord, il y a aussi eu
des exactions qui ont été commises là, est-ce que ça a été porté à votre connaissance ?
JK -Çaaété porté à ma connaissance mais c’était dans le cadre global des déplacés de Butare, donc
c’est, ça a pas été spécifique pour ce groupe-là puisque c’est. ça se faisait de la même, je crois c’est le
même groupe en fait qui se déplaçait de la préfecture à [inaudible].
PD -Ça c'était vraiment à proximité de l’hôtel ?
JK -Oui.
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PD -Çac’est, c’est. on peut même entendre les gens parler pratiquement à l’hôtel, de la distance qu’on
est, on est peut-être à quoi, 150 mètres, pas plus ?
JK -C’est tout près, oui.
PD -C'est tout près. Vous, est-ce qu’il vous a été donné de passer devant cette école-là pour vous rendre
à... ?
JK -Non, ça ne s’est jamais fait.
PD -Vous avez jamais vu les gens qu’il y avait là ?
JK -Non.
PD -Ok. Est-ce que vous avez déjà discuté de la présence de ces gens-là avec Madame Pauline ?
JK -Oui. Parce que les... quand les. le cardinal Etchegaray [phonétique] est venu à Butare, il, on les a présentés au niveau de la ville de Butare pour montrer qu’on les avait protégés.
PD -Qui a décidé de faire cette présentation ?
JK -Je ne sais pas parce que je n’étais pas parmi... je n’étais pas à Butare, je n’étais pas parmi les, ceux
qui ont organisé l’accueil de l’évêque. Je ne sais pas par qui ça a été fait. Je sais que ça a été organisé au
niveau de la préfecture, que certaines communes ont fait des défilés et que à cette occasion ils ont montré
des gens qu’ils avaient protégés.
PD -Des gens qu’ils avaient protégés... Est-ce que... dans quel, dans quel cadre Madame Pauline vous
a parlé de ça ? C’est elle qui vous a informé de ça ? On... |
JK -Je ne sais pas si c’est elle toute seule ou... mais dans tous les cas l’information, elle, celle-là, je l’ai eue. Donc que le cardinal Etchegaray est passé à Butare, qu’on lui a montré les, les rescapés qui étaient, les rescapés Tutsi qui étaient sur place et qu’il y a eu une cérémonie d'accueil à partir de la frontière avec le Burundi jusque dans la ville de Butare, donc c’était plutôt quelque chose de connu [inaudible] de tout le pays. Parce que sa visite était médiatisée.
PD -Mais, est-ce que vous vous souvenez d’avoir eu une discussion avec Madame à propos de ça ?
JK -Je ne... on a parlé pratiquement de tous les sujets qui se passaient à Butare, donc il n’était pas
impossible qu’on ait discu.….. il est normal qu’on ait discuté de cet, de, de, de cette situation.
PD -Ok.
JK -Il y a pas, il y a pas un événement qui a pu se passer à Butare dont on n’a pas parlé. Et cet
événement-là était important.
PD -Vous aviez fait un rappel dans votre déclaration où vous marquez que le général de brigade
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Gatsinzi était le commandant de l’école des sous-officiers, pourquoi c’est important pour vous de faire ce rappel-là ?
JK -Parce que je trouve que le, l’enquête telle qu’elle est menée aujourd’hui me semble un peu partiale, dans la mesure où Gatsinzi est aujourd’hui le chef d’état major de la gendarmerie au Rwanda. Si je dis que j'ai vu des soldats à Butare, sur la barrière, c’était sous la responsabilité du commandant de la région qui était le général Gatsinzi à l’époque. Et le fait que lui il soit considéré comme quelqu’un qui aurait mené des actions de courage ou de... ou qui aurait sauvé des gens, et qu’on associe d’autres aux massacres qui ont eu lieu pratiquement sous sa responsabilité, je trouve que c’est, c’est pas tout à fait correct, et donc ceci doit être souligné pour que peut-être l'Histoire retienne.
MD -Pour vous Gatsinzi a une part de responsabilité dans les événements ?
JK -Pour moi Gatsinzi a une part de responsabilité.
MD -Etant, étant l’homme en autorité ?
JK -Dans la respon.. au niveau de la responsabilité. Je n’ai pas dit que je ne l’ai pas. je l’ai vu, mais
en tant que responsable il devait contrôler, savoir où se trouvaient ses soldats.
PD -Ok. Quelles fonctions occupaient Monsieur Gatsinzi ?
JK -Ilétait le commandant de la région militaire de Butare, donc pas seulement de, de l’'ESO, l’'ESO
c'était avant avril 94, mais après il a eu, il a dirigé toutes les opérations militaires dans la région de Butare.
PD -A compter de quelle date ?
JK -À compter de, d’avril, donc, 94.
PD -Là il était responsable des actions militaires ?
JK -Oui.
PD -Vous personnellement, est-ce que vous avez vu des militaires agir, tuer des gens dans Butare ?
JK -Non, pas de visu, mais d’après les enquêtes que j’ai menées je sais que les militaires sont
intervenus dans.
PD -Les militaires ont participé aux actions, puis c’est pour ça que vous dites ça, c’est parce que
Monsieur le général était responsable de ces, de cette région-là.
JK -De ses hommes, de cette région oui.
PD -Ok. Puis des militaires ont agi dans les tueries, ont tué des, ont tué des citoyens Hutu ?
JK. -Oui, plutôt les Tutsi.
PD -Les Tutsi.
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JK -Oui.
MD -Vous parlez, vous nous dites que, vous avez discuté, vous posiez des questions à Madame Pauline
concernant des gens, les Tutsi que vous connaissiez...
JK -Oui.
MD -Les gens à Butare que vous connaissiez, et elle vous répondait que [inaudible], les commerçants
de la ville avaient fui, c’est ce qu’elle vous disait comme, qu’elle donnait comme explication. Parce qu’ils
n'étaient plus là, vous, vous posez la question parce que vous ne voyez plus ces gens-là ?
JK -Non, c’est pas. c’est parce que les, sur le plan global les gens se posaient des questions sur
certaines personnes, notamment les personnalités connues dans une région, donc ces gens-là, les gens pour
lesquels je posais la question, c'était des gens connus...
MD -Que vous connaissiez vous ?
JK -Certains. non, que je connaissais. peut-être on ne se connaissait pas mais je le connaissais, de
réputation.
MD -Oui. C’est ça.
JK -Si quelqu'un est professeur d’université, nous, il ne passe pas inaperçu, surtout s’il a été membre
du comité central du MRND), encore parti unique. C’était quelqu’un de très important dans la région, vous
ne pouviez pas ne pas..c’est, s’inquièter comme vous ne pouviez pas ne pas poser la question sur la, la
reine-mère ou sur l’évêque de Butare, des choses comme ça, alors c’est à cette occasion-là que j’ai eu les
informations, les deux cas, ce n’était, ce n’était pas les seuls, mais c’est les deux cas que j’ai cités.
MD -Ok. Elle vous disait que ces gens-là avaient fui ?
JK -C’est la réponse globale qu’on donnait, en disant que les, les dignitaires, entre guillemets, de
Butare, étaient déjà passés au Burundi.
MD -Et vous, qu’avez-vous appris là-dessus ?
JK -J’ai appris que les deux dont j'ai cité sont donc été assassinés à Butare [sic].
MD -Ontété assassinés ?
JK -Oui.
MD -Alors ces gens-là ont été assassinés et Madame Pauline ne, ne pouvait pas ne pas savoir ?
TK -Ça.. c’est à elle de répondre, c’est à dire que moi je l’ai su et c’était des gens qui étaient connus
de moi, et j'imagine d’elle aussi, donc c’est...
MD -Est-ce que vous savez à quel moment et dans quelles circonstances ces gens-là ont été assassinés?
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TK
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JK -Le moment je ne peux pas le préciser, mais j’ai eu les. la... du moins pour le, pour Karenzi on m'a décrit comment il est, il a été assassiné et où il avait été assassiné.
MD
JK
MD
JK
MD
PD
MD -Et c'était où ?
JK -C’était devant l’hôtel Faucon à Butare. Et sa tête était restée pendant plusieurs jours sur la barrière.
MD -Sur la bar... sur quelle barrière ?
JK -La barrière à l’hôtel Faucon.
MD -À l’hôtel Faucon.
-Pour encore une fois, pour, pour la bonne compréhension des gens qui peut-être connaissent pas
Butare, l’hôtel Faucon est situé à quel endroit ?
JK
PD
JK
PD
-C’est, en venant de Kigali, il est juste sur le carrefour qui va à, au centre-ville et à Ngoma.
-Alors, si on circule l’axe nord-sud, le seul axe nord-sud qui existe dans Butare, c’est ça ?
-C’est ça. Ça c’est, c’est ce qu’on pourrait appeler le rond-point central de la ville de Butare.
-Ok. Si on arrive de Kigali ou si on arrive de Gitarama, est-ce qu’on doit franchir cette barrière-là
pour se rendre à l’hôtel de Madame Pauline ?
JK
PD
JK
PD
TK
-On doit la franchir absolument.
-Il y a pas d’autres moyens de s’y rendre ?
-Je ne connais pas d’autres moyens.
-Vous...
-Disons, il faut faire un détour de, par la campagne alors. On peut faire le détour par Save et puis
y arriver, mais ça c’est un détour que personne ne fait généralement.
PD
TK
PD
JK
PD
JK
PD
JK
PD
JK
-La route macadamisée…
-C’est celle-là.
-C’est celle-là. La route nationale du pays c’est celle là.
-C’est celle-là oui.
-Puis lui sa tête était exposée là ?
-C’est ce qu’on m’a dit.
-Donc c’était pas, c’était pas un secret...
-J’ai pas vu...
-...pour la population...
-J’ai pas vu sa tête, j’ai pas. j'ai pas assisté à ça, mais j’ai su que sa tête est restée au moins
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pendant 48 heures sur la barrière, que donc tous les gens qui le connaissaient, qui habitaient Butare, ont au
moins appris Ça.
MD -Avez-vous discuté de cette chose-là avec Pauline ?
JK -Après oui. Puisque les informations qui venaient après, oui, après...
MD -Et..elle..
JK -…. et elle a confirmé qu’elle savait que le député...
MD -Elle a confirmé qu’elle savait, elle le savait ?
JK -Oui.
MD -Alors, c'était, c’était après qu’elle vous ait eu dit que les gens avaient fui, avaient pu fuir, que les
intellectuels étaient fui [sic] ?
JK -Non, c’est que les, l’information sur la fuite des gens c’était, comme je... une information disons
générale, donc... si, si on parlait de Butare, on dit les professeurs d’université, les commerçants, que sont-ils
devenus ? Non, ils sont passés au Burundi. Et si on est précis on dira untel et untel est-ce qu’il est parti
aussi au Burundi ? Non, parce que il a été tué sur la barrière.
MD -Mais dans le cas, là, qu’elle dise que vous lui avez posé la question, est-ce que c’est un nom que
vous avez, que vous lui avez...
JK -Non, j'avais posé la question de façon générale.
MD -Générale.
JK -Et puis, les deux cas, c’est quand j’ai su qu’ils avaient été assassinés que j’ai posé la question
spécifiquement.
MD -A quel moment avez-vous appris que. les filles elles avaient été... avaient été cachées ? Par
Shalom à l’intérieur de l’hôtel ?
JK -C’est quand j'étais en exil.
MD -Quand vous étiez en exil ?
JK -Oui.
MD -Et qu'est-ce que c'était, l’histoire c’était. est-ce qu’il y avait plusieurs filles qui avaient été
cachées?
JK -Je crois que c’était la seule.
MD -C'était la seule, et.
JK -Je n’ai pas entendu d’autres noms.
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-Et elles... cette fille elle a été gardée pendant longtemps, est-ce que vous savez ?
-Oui. Je crois qu’elle [inaudible] pratiquement pendant toute la période de...
-Pendant toute la période ?
-Oui.
-Et pourquoi était-elle gardée là ?
-Je crois que c'était son ami.
-C’était son ami ? Son ami heu... son ami forcé ou son ami heu...
-Ça je ne peux pas préciser si c'était son ami forcé, de toutes façons ils se connaissaient bien.
-Est-ce qu’on vous a dit qu’elle était gardée de force dans cette, dans cette cave ?
-De force, je n’ai pas entendu dire qu’il l’aurait [inaudible] de force.
-I] la connaissait bien, alors c’était sa fille ça ?
Oui.
-Heu... elle, vous dites qu’elle devrait toujours être vivante ?
-Oui. Parce qu’on m’a dit que au moment de fuir, Shalom lui aurait laissé les clefs de la maison et
pour qu’elle puisse se libérer elle-même.
MD -Pourse libérer elle-même, ça veut dire qu’elle était surveillée avant ça ?
JK -Puisqu’elle était enfermée, que, pour qu’on ne la voit pas.
MD -Alors c’était une. on peut...
PD -Pourquoi devait pas t-elle, ne devait pas, ne devait-elle pas être vue ?
JK -Pour ne pas se faire tuer.
PD -Pourquoi ?
JK -Pourquoi ? Pourquoi les autres ont les tuait ? Parce qu’elle était Tutsi.
PD -Parce qu’elle était Tutsi.
MD -Elle était Tutsi ?
JK -Oui.
MD -Shalom était pas reconnu pour être, pour avoir un grand penchant pour les Tutsi, pour les protéger?
JK -Ça c’est. ça c’est pas à moi de déterminer si il n’avait pas de penchant ou pas. Je sais qu’il l’a
protégée.
MD Il l’a protégée. Maïs, en principe, les Tutsi, Shalom était pas reconnu pour les protéger, on est
d’accord là-dessus ?
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JK -Ce n’était pas le premier cas de quelqu’un qui n’était pas reconnu pour protéger les Tutsi et
pourtant qui en a protégé.
MD -Comme Interahamwe Shalom, comme Interahamwe Shalom, heu... a été assez actif contre, avec
les Tutsi, pour les éliminer ?
JK -C’est là la contradiction, parce qu’il y a d’autres qui ont été peut-être plus actifs sinon aussi actifs
et qui ont quand même protégé aussi des gens.
PD -On va arrêter l’enregistrement, on va changer le ruban de côté.
Fin de la face À de la cassette # 60.
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Face B de la cassette # 60.
MD -Non vas-y. C’était la première page. c’est la première page de... du texte de Pauline, qu’on
appelait 130-231. Au niveau du gouvernement, est-ce que Pauline avait de réputation d’être une femme
active au niveau des massacres ?
JK -Active, difficile à qualifier dans la mesure où on savait qu’elle parlait beaucoup et elle a parlé
beaucoup...
MD -Çaaété parlé ?
JK -Oui.
MD -Çaaété parlé qu’elle était active ?
JK -Nor.
MD -Ou qu’elle participait, qu’elle s’imp... qu’elle était impliquée ?
JK -Non. Ça a pas été dit comme tel. Donc, ce qui a été dit c’est que elle, c’était un sujet qui, qu’elle
faisait revenir tout le temps dans ses conversations, que les. les. les Tutsi et, et, et, et leurs infiltrations.
MD -Elle même ? Elle même ?
JK -Oui.
MD -Elle même a amené ça ?
JK -Oui.
MD -C’est à dire que toutes les gens [sic] avec qui elle discutait savaient exactement, connaissaient
exactement la ligne de pensée de Pauline ?
JK -Oui.
MD -Et sa ligne de pensée, pour elle la seule solution qu’elle voyait, pour mettre fin au problème c’était
d’éliminer les Tutsi au complet, c’était ça sa position ?
JK -L’ensemble des Tutsi pas au complet... non, éliminer les Tutsi peut-être oui mais au complet.
MD -Ben, éliminer les Tutsi.
JK -Oui. Parce que si, si je me mets à confirmer que sa ligne de pensée c'était éliminer les Tutsi au
complet... ce serait.
MD -Oui mais quand on parle d’éliminer les Tutsi, on peut, on peut peut-être garder heu... ceux qui font
notre affaire mais quand on parle d’éliminer une ethnie... on peut supposer que c’est. autant qu’on peut.
JK -Oui, c’est à dire ça c’est une interprétation que je laisse aux autres de faire, donc que moi je ne
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veux pas faire.
MD -Oui. Mais c’est un fait connu que la position de Pauline était à cet effet ?
JK -Oui.
MD -D'’éliminer les Tutsi ?
JK -Oui.
MD -Et ça mettait fin à le. de ce fait, on, on n’avait plus de problèmes au Rwanda, c’était la façon de
stabiliser le pays ? Est-ce que c’était comme ça qu’elle voyait ça elle ?
JK -Une façon de voir qui, qui ne correspondait pas nécessairement à la vérité mais à ce que les autres
pensaient.
MD -Oui, mais elle, là, dans, dans vos discussions là, c’était, c’était, c’était vraiment une façon de, de,
de régler, de, de, de ramener la stabilité du pays ?
JK -Oui.
MD -C’était comme ça qu’elle voyait ça, c’était la raison que.
JK -Oui.
MD -C’était sa raison à elle de se justifier, de justifier sa position ?
PD -As-tu autre chose toi ?
MD -Non, j'ai pas, j’ai pas autre chose...
PD -Oui?
MD -Est-ce que, est-ce que vous vous avez des choses, sur Pauline, est-ce que vous avez pu vous
souvenir de, de faits qu’on n’a pas traités, de. originalement dans la déclaration qu’on a ici ? Est-ce que
en réfléchissant, heu, vous pouvez heu.
PD -A ce jour, avez-vous autre chose ?
MD -.… vous souvenir de, de, d’un fait nouveau ?
JK -Ce que j’ai mis là c’est, j’ai essayé de faire la synthèse de toutes les discussions que j’ai eues avec
elle, de la connaissance que j’ai d’elle. Donc je n’ai pas à donner en détails, pour dire voilà à tel problème
précis..., si c’est peut-être une question bien posée je peux répondre oui, mais je ne peux pas, pour une
personne avec qui j’ai vécu pendant trois mois où on a certainement discuté de tout, de beaucoup de
problèmes, que je ne peux pas dire j’ai tout dit. J’ai tout résumé, j’ai.. j’ai, j’ai fait une synthèse de toutes
les conversations de la façon dont moi j’analyse la situation aujourd’hui.
MD -D'’accord.
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PD -Qui s’est occupé de l’exil de votre famille ?
JK -C’estelle oui.
PD -C’estelle ?
JK -Oui. C’est à dire qu’elle était partie à Butare pour visiter sa famille, quand elle est arrivée sur place
elle s’est rendue compte que la situation était, disons, à la limite. Alors elle a pris l’initiative d’aller
prendre, je ne lui avais pas demandé, et elle était partie comme d’habitude pour rendre visite à sa famille,
elle s’est rendue compte que le FPR s’approchait de la ville de Butare, et elle a pris l’initiative d’aller
prendre mes, les membres de ma famille et de les ramener. Certains membres de ma famille parce que...
les moyens de déplacements qu’elle avait étaient limités, elle n’a pas pu tout prendre. Les autres sont partis
à pied. Je vous ai expliqué ça. Si, si c’était moi qui avait organisé, j’aurai pu envoyer les moyens de
locomotion supplémentaires pour ramener tous les membres de ma famille. Mais elle, elle n’a pu prendre
que ma mère et puis les, les femmes de mes frères. C’est tout. Mes frères sont partis à pied avec tout le
monde.
PD -C’est comme ça que vous êtes venu à mieux la connaître encore, pendant cette période-là, ou si
déjà à cette période-là vous la connaissiez beaucoup ?
JK -Je crois que c’est, à cette période je, je, je, je n’ai, je n’avais rien de nouveau à apprendre. C'était
déjà au mois de juillet, donc, au moins vers la fin du mois de juin, de juin ou au mois de juillet, je n’avais
pas beaucoup d’autres choses à apprendre, je savais déjà ce qu’il [inaudible].
PD -Après, vos familles sont demeurées ensembles ?
JK -Dans le même camp, oui.
PD -Oui ? Quand vous avez fui vers, à partir de Butare, quand ils ont fui, ils se sont rendus jusqu’à, vous rejoindre jusqu’à Cyangugu ?
n
PD -Les deux familles ? Est-ce qu'il y avait d’autres gens aussi, à part les deux familles dans ce convoi- là ?
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JK -Il y avait beaucoup de gens.
PD -Beaucoup de gens ?
JK -Parce que nous, nous, nous ne vivions, je ne vivais pas avec elle à Gi... seul à Gisenyi, c’était en,
un endroit aménagé pour tous les ministres.
PD -Est-ce que ce sont tous les ministres qui se sont dirigés ensuite à Cyangugu ou si c’est à partir de
là qu’ils se sont divisés vers le nord et vers le sud ?
JK -C’est à partir de Gisenyi que certains sont. surtout ceux qui sont originaires du nord du pays, qui
avaient la plupart des membres de leur famille avec eux, sont directement rentrés par le nord du pays, et
puis nous qui avions certains membres de la famille qui étaient restés dans le sud, nous sommes partis au
sud pour les rejoindre.
PD -Ok.
MD -Est-ce que vous l’avez connue comme étant une personne qui était, qui était violente ?
JK -Violente. non. C’est à dire si on, si on ne la connaît pas ou qu’on entend ce qu’elle dit, on a
l'impression qu’elle est violente mais dans, dans le caractère je n’ai pas vu de violence.
MD _-Ses discours étaient violents ?
TK -Oui.
MD -Ousa, sa, ses paroles étaient violentes ?
JK -Oui. Mais elle n’est pas violente dans le caractère. Donc c’est pas quelqu’un qui peut prendre
quelque... je ne l’ai pas vue, je n’ai pas senti comme tel que c’est quelqu’un qui était violent dans les actes.
MD -Est-ce que c’est une personne qui était touchée, qui était, qui était bouleversée par les massacres,
par ce qu’il se passait dans le pays, et surtout dans la région de Butare ?
JK -C'est difficile à qualifier. C’est à dire que si on écoute ce qu’elle dit, et qu’on ne discute pas avec
elle, on dirait oui, elle n’était pas touchée. Mais si on discute avec elle, qu’on essaye de lui démontrer que
des gens sont morts pour rien, sans trop savoir pourquoi, alors on est plutôt étonné de sentir qu’elle-même..
MD -Sielle avait eu des sentiments, si elle avait été touchée, est-ce que vous croyez qu’elle aurait toléré
une, une barrière dans sa cour, sachant très bien pourquoi la barrière était là ?
JK -Toléré peut-être non, elle auraït pu demander qu’ils s’en aïllent ailleurs, mais le. qu’elle aurait
pu arrêter les, les événements qui étaient en cours, je ne crois pas.
MD -Est-ce qu’en aucun temps elle a fait des choses, des interventions pour qu’on mette fin à ces
massacres, puis qu’on mette fin à ces tueries ?
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JK -Il y a eu très peu d'interventions, à part, mise à part elle, il y en a eu très peu, à ma connaissance
il n’y a pas eu beaucoup d’interventions dans ce sens-là.
MD -Mais elle, elle, est-ce que elle en a fait ?
JK -Ellen’en a pas fait. Et je dirai comme tout le monde.
MD -Ok.
PD -Ok. Marcel as-tu terminé avec.
MD -Oui, terminé.
PD -Le chapitre suivant, alors ça nous amène à ?
JK -Ngeze Hassan. C’est la rencontre que j’ai eue avec Ngeze Hassan.
PD -Qui va porter le numéro de chapitre ?
JK -8.4.3.
PD -Si vous voulez nous faire la lecture s’il vous plaît.
JK -Ce journaliste, le rédacteur-en-chef de son journal, qui s’appelait Kangura, il avait une très grande
réputation et j’avais une image de lui très fausse, je le voyais dans la quarantaine avancée, alors qu’en fait
c'était un jeune de plus ou moins trente ans. Il avait une telle notoriété qu’il était difficile de croire que je
ne connaissais pas cet homme. Je crois l’avoir rencontré le jour de ma première visite à Kigali en avril 94,
après que le gouvernement fut évacué sur Gitarama. J’avais manifesté mon intention aux forces... aux
officiers de visiter certains quartiers de Kigali afin de constater de moi-même ce qu’il s’y passait. J’ai visité
le quartier de Kacyiru, en passant par la gendarmerie, et celui de Nyamirambo en passant par le stade. Je
suis parti du camp de Kigali pour Kacyiru, et de là, en passant par le Nyabugogo, heu et par la route dit de
Khadafñi, pour arriver au stade Nyamirambo avant de descendre vers le camp de Kigali. Juste après le stade,
devant l’église Saint Charles-Rwanda, j’ai vu un tas de cadavres avec des jeunes armés qui semblaient bien
amusés. Mes guides et mes gardes du corps n’ont pas voulu que je m’arrête à cet endroit pour ma sécurité.
Quelques mètres plus bas, au bar-restaurant Cosmos, un véhicule nous a dépassé et a fait signe que l’on
s’immobilise. Les véhicules de mon escorte se sont arrêtés, c’est là que Ngeze Hassan s’est présenté à moi
après être descendu de son véhicule 4*4 rouge. Il ne pouvait pas s’imaginer que je ne le connaissais pas.
Il m’a dit qu’il voulait me saluer. Je ne, je n’ai revu ce type qu’à Goma, en exil. Si je l’ai revu entre-temps,
je n’ai, je ne l’ai plus en mémoire. J’ai eu l’impression qu’il voulait me saluer pour me montrer qu’il était
là. A Goma, vers le mois de novembre 94, je l’ai rencontré [inaudible] avec une britannique qui se disait
journaliste de la BBC, qui s’appelait Elisabeth James [phonétique], je crois qu’elle avait demandé à
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Hassan Ngeze de servir d’intermédiaire pour me la présenter. Il m’a demandé si je me rappelais de notre
première rencontre à Kigali. Je lui ai dit que oui. La dame m’a demandé de l‘accompagner pour observer
la réaction des gens lorsque je visitais les réfugiés dans les camps. Tous les trois, Hassan Ngeze dans son
véhicule, elle et moi et mes gardes du corps dans un autre, nous nous sommes rendus au camp Kibumba
[phonétique] et j’y ai rencontré le responsable de ce camp, par l’entremise de Ngeze Hassan. La journaliste
s’est montrée sceptique face à cette première visite et m’a demandé de visiter un autre camp, de son choix,
celui de Katare [phonétique], la réaction fut la même que dans l’autre camp. Des photos de cette visite se
retrouvent dans mon album photo saisi. J’ai appris, avec l’aide du même Ngeze Hassan, qu’elle a pu
s’introduire dans le camp militaire de la rébellion du [inaudible, CNDD ?] au Burundi, de FTD, pour
pouvoir l’introduire dans ce camp Ngeze prétexta être porte-parole d’un message du général Bizimungu.
La femme y prit des images des combattants de la rebellion burundaise qu’elle passa à la BBC comme
témoignage de mes visites d’un camp militaire tenu par les Interahamwe. En décembre 1994, lors de ma
visite à Nairobi, je retrouverai Ngeze à mon hôtel qui m’introduisit chez un de ces amis rwandais, qui à son
tour m'’introduisit chez le président kenyan. Toujours dans la même période, lors du même séjour, je revis
cette même journaliste à qui Ngeze avait indiqué ma présence au Kenya. De retour à Bukavu, elle est venue
m'interroger relativement à mon voyage aux Etats-Unis, et au plan d’invasion du Rwanda à partir du Zaïre.
J'ai nié ma connaissance de ces faits. Lors de ma visite à Nairobi, en juillet 95, je fus introduit par Ngeze
Hassan auprès de journalistes étrangers dans un building où ils sont regroupés et lui-même occupait un
bureau. J’ai pu réaliser des interviews avec divers journalistes dont ceux de la Voix de l’ Amérique. Lors
de ses multiples voyages au Zaïre après 1995, il s’arrêtait pour me voir sans toutefois avoir d’entretiens
particuliers avec moi. Le 17 août 1996, je suis arrivé à Nairobi et je l’ai rencontré occasionnellement sans
toutefois avoir des entretiens particuliers, notamment de type politique, avec lui. Voila donc en ce qui
concerne Ngeze Hassan.
MD -Quelle, quelle réputation qu'il avait ?
JK -Non, c’est. peut-être pas lui directement mais c’est son journal qui avait une très grande
renommée, tout le monde connaissait le journal Kangura, ayant été l’un des premiers journalistes à créer
un, un organe indépendant au début du multipartisme et ayant connu la prison à plusieurs reprises pour des,
ses écrits, ayant écrit sur la, la mort probable du président Habyarimana, tout le monde connaissait Ngeze
Hassan. Parce que lui il avait écrit, je l’ai lu ça dans son journal, que le président Habyarimana serait tué
à la fin du mois de mars ou au début du mois d’avril, et que il ne pouvait rien faire pour qu’il ne soit pas
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tué. Il avait écrit avant.
MD -Aussi précis que ça ?
JK -Aussi précis que ça.
MD -Quel.… mais. dans, dans le pays quel, il devait sûrement avoir une réputation lui-même, son
journal bien sûr, mais de quelle façon qu’on croyait là, qu’il, qu’il obtenait son, sa nouvelle, ses
informations, qu'il faisait sa nouvelle ?
XK -On pensait qu’il était, il avait des soutiens dans le cercle restreint des responsables politiques du
pays. Que c’est par eux qu’il recevait les informations. D’autres disaient qu’il était l’agent de la CIA. Donc
il y avait clairement une supputation sur sa personnalité. Même aujourd’hui en prison, je sais que on, on
ne lui fait pas tellement confiance.
PD -Les co-détenus ne lui font pas confiance ?
JK -Non.
PD -Pourquoi ?
JK -Parce qu’on le soupçonne d’être un agent, de. des forces, d’une force extérieure.
MD -Qu’est-ce que vous entendiez parler de lui quand il était, est-ce qu’il était effectivement près de,
du président, des autorités politiques ?
JK -Je ne peux pas confirmer puisque je ne le connaissais pas. Je connaissais son journal, mais son
journal révélait des, disons, donnait des informations que vous ne pouviez pas trouver ailleurs et qui étaient,
la plupart du temps, correctes. Le fait, par exemple, qu’il ait programmé la mort du président Habyarimana,
que ce soit, ce se soit passé exactement dans la période qu’il avait indiquée, n’a fait que confirmer ce que
tout le monde avait dit et redouté.
MD -Vous dites que ça lui amenaïit des embêtements ?
JK -Oui, il a été en prison plusieurs fois.
MD -Alors s’il était en prison, heu, s’il devait pas nécessairement être bien près du président ?
JK -Ça c’est une affirmation que je ne suivrai pas nécessairement. On peut être en prison sans... sans
être éloigné du président, parce qu’on a eu d’autres cas. De gens qui, qui ont été en prison sans qu’ils soient
nécessairement très loin du président. En tous cas la prison ne l’a pas affecté.
MD -Ça ne l’a pas affecté ?
JK -Non. Je crois que ça le rendait encore plus populaire.
MD -Et vous n’aviez jamais eu à rencontrer cet homme-là ?
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JK -Je ne l'avais jamais physiquement vu.
MD -I{ travaillait à partir de quel endroit ?
JK -Je ne sais même pas d’où il pouvait travailler, il était à Ki... il était supposé être basé à Gisenyi
maïs il était le plus souvent à Kigali, mais c’était quelqu'un qui, qui passait comme une ombre, on ne savait
pas exactement où on pouvait le trouver.
MD Son journal était publié à quel endroit ?
JK -Ilétait publié à Kigali, et on disait aussi qu’il y avait une publication à Gisenyi et à Bujumbura.
Donc on ne pouvait même pas savoir qui, où il était réellement publié.
MD -Est-ce qu’il y avait plusieurs journalistes qui travaillaient pour ce journal-là, à votre connaissance?
JK -La, la plupart du temps je crois que c’était plutôt les journalistes occasionnels.
MD -A la pige ?
JK -Donc, c’est plutôt par là qu’il travaillait, qu’il avait sa force. Plutôt que par la rédaction officielle,
dans la mesure où ce qu’il écrivait, de mon point de vue, dépassait ses propres capacités. Je pense,
connaissant sa formation etc, donc c’était des réflexions qui, qui me semblaient dépasser ses propres
capacités.
MD -Luiil en était le directeur, du journal ?
K -Il était le directeur, le propriétaire, le rédacteur-en-chef, c’est comme ça qu’il se présentait.
MD -Abprès la mort du président, quelle position a-t-il adoptée dans son journal ?
JK -Il est, la, la, la position n’a jamais été, n’a jamais changée, de son journal, il s’est toujours
considéré comme la, la voix du peuple Hutu. Il l’appelait.
MD -La voix du peuple Hutu ?
JK -I] l’appelait comme ça, oui. C’était, c'était le slogan que portait son journal.
MD -Alors c'était.
PD -L’idéologie, d’idéologie anti-Tutsi dès le début ?
JK -Lui,ilne s’en cachait pas, c'était, c’était écrit, donc ce n’était pas quelque chose qu’on peut dire
qu’on ne l’a pas entendu, on ne l’a pas vu puisque c’était écrit.
PD -Est-ce que lui-même disait ça ?
JK -Oui.
PD -Lui-même, lorsque vous.
JK -Non, c'était, c’était le porte parole des Hutu, il se présentait comme tel.
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PD -Les Hutu, est-ce que on parle des Hutu... les durs ou les Hutu..
JK -Je ne dis. en fait les Hutu durs, les Hutu non-durs, ça c’est une, une nuance que nous ne
connaissons en réalité pas. Donc tout le monde il est Hutu extrémiste, nous on ne connaît pas.
PD -Vous, pour vous il y a...
JK -Il y a des Hutu.
PD -Maisil y a différentes caté.., il doit quand même il y avoir différentes idéologies ?
JK -Probablement.
PD Puis?
JK -C’est à dire que lui, dans..., je n’ai pas vu, avant avril 94 quelque part où on parlait de Hutu
modérés et de Hutu extrémistes, et des choses comme ça.
PD -Non, c’est ça, c’est des notions qui sont venues après.
JK -Ce sont des notions qui sont venues non seulement après, mais qui sont venues de l’extérieur, donc
à l’intérieur de la politique de la rwandais vous aurez des difficultés à vous faire dire que vous êtes un Hutu
modéré ou un Hutu extrémiste, un, un Tutsi modéré, un Tutsi extrémiste... d’ailleurs le Tutsi extrémiste
n'existe pas. Il existe un Hutu modéré et un Hutu extrémiste et puis les Tutsi.
MD -Qu'’est-ce. comment il voyait la situation, il, comment... comment analysait-il le problème du
pays?
JK -Je crois qu’il a fait tellement d’écrits que les, les gens qui ont suivi son journal, pour lui il y avait
un combat entre les Hutu et les Tutsi, que les Tutsi étaient déjà prêts, que les Hutu devaient se préparer à
leur tour...
MD -Alors il demandait aux Hutu de se préparer ?
JK -Oui.
MD -De se préparer pour quoi, pour la guerre ?
JK -Pour la guerre contre les Tutsi. C’était précis, c’était clair, donc lui il n’a pas à dire ou, je, je, je
pense que non, il l’écrivait donc c’est... on peut lire ça même aujourd’hui dans ces journal [sic], je crois
que dans les journaux que vous avez saisi, il y a moins un exemplaire de son journal, et c’est... si vous
ouvrez la première page jusqu’à la dernière vous verrez ce que je viens de dire.
MD -Alors pour lui les Tutsi étaient de trop, les Tutsi devaient pas être là ?
K -Je ne sais pas s’il disait qu’ils étaient de trop, il disait que le, la, le pays appartient aux Hutu. Que
les, si les Tutsi veulent les chasser, les Hutu doivent se, disons, se préparer à les combattre. Donc c’était
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aussi précis que ça.
MD -Est-ce qu’il proposait des, des façons de le faire ?
TK -Je. je ne peux pas dire qu’il ne proposait rien, il a trouvé tellement de propositions que moi je ne,
je ne peux pas dire j’ai retenu telle ou telle autre proposition, il a, des propositions il en a faites oui.
MD -Est-ce que vous vous souvenez de quelques unes ?
JK -Oui, dont on parlera plus tard, il a décrété des règles pour les Hutu, dix règles que les Hutu devaient suivre, dont je ne me rappelle plus mais...
MD -Ila décrété dix règles ?
PD -Les dix commandements des Hutu.
JK -Pardon ?
PD -Les dix commandements des Hutu.
JK -Oui.
MD -Etces règles-là étaient, allaient dans quel sens, en général, sans être précis, sans, sans bien-sûr vous
souvenir exactement, mais ça allait dans quel sens ces règles-là ? Qu'est-ce que ça disait, qu’est-ce que ça
voulait dire ?
JK -C'’était des comportements que les Hutu devaient avoir par rapport aux Tutsi. Des... je crois quand
on parlait des mariages par exemple, qu’il ne fallait pas épouser les filles Tutsi, des choses comme ça, je
crois c’est dans ce sens-là.
PD -Est-ce qu’il y avait des... est-ce qu’il y avait des, dans ces commandement, est-ce qu’il y avait des
incitations à la violence envers les Tutsi ?
JK -Je crois que si on prend son journal, et qu’on le lit aujourd’hui, il n’y a pas une page où il n’y a pas
d’incitation. Si on le prend aujourd’hui et qu’on le lit, je ne vois pas la page, même, même la publicité peut-
être, que même dans la publicité qu’on, on retrouverait ça.
PD -Lorsque vous l’avez vu, heu... près des cadavres empilés là, c’était à quel, quelle date, est-ce que
vous avez la mémoire de la date ?
JK -C’est lors de ma première visite à Kigali, je n’ai pas la date en tête.
PD -Est-ce que c’est après la demande de Monsieur Gaillard pour...
JK -C’est après.
PD -C’est après ?
JK -Oui. Parce que j'étais, je venais de Gitarama et.
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PD -Ok. Donc.
JK -[inaudible]
PD -Comment se fait-il qu’il y avait encore des cadavres comme ça d’accumulés ? Est-ce que ça devait
être des cadavres récents, est-ce que.
JK -C’était récent oui.
PD -C'est des, des, des assassins ?
JK -Les massacres étaient en cours à l’époque à Kigali.
PD -Ok.
MD -Vous avez vu des jeunes qui, armés qui semblaient bien s’amuser ?
JK -Oui.
MD -Qu'est-ce qu'ils fais.
JK -Si, si les gens sont assis à côté des cadavres avec leurs fusils en main, leurs bières dans, c’est,
c’est. ça semble comme anormal que des gens s’assied [sic] juste à côté des cadavres et boivent leur bière
comme si de rien n’était.
PD -Pour prendre une bière...
JK -Ça, je les ai vus, mais on était là, dans la route, on n’a pas pu s’arrêter directement sur l’endroit
pour qu’on puisse constater exactement qui était là.
PD -Quand vous dites un tas de cadavres, c’est vague ça, est-ce que, est-ce que vous avez encore en
mémoire, parce que ça doit être quand même assez, assez marquant voir des, des. un amoncellement de
cadavres et des gens qui prennent la bière autour, est-ce que vous avez une idée, une approximation du
nombre de personnes qu’il pouvait y avoir là ?
K -Je ne peux pas préciser, dans la mesure où il devait certainement il y en avoir plus que ce que j’ai
aperçu sur le bord de la route. Parce qu’il y en avait sur le bord de la route mais certainement que d’autres.
puisque c’est une route où il y a un talus, puis en bas c’est là où se trouvaient ces bandes.
PD -Surélevée, la route est surélevée par rapport à la...
JK -Oui.
PD -Et vous ce que vous avez vu ce sont les cadavres.
JK -Les cadavres qui étaient sur le bord de la route.
PD -Sur le bord de la route.
JK -Oui.
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PD -Est-ce qu’il y en avait beaucoup ?
JK -Oui.
PD -Beaucoup ?
JK -Oui.
MD -Est-ce qu’il y avait beaucoup de jeunes ? Est-ce qu’il y avait beaucoup de monde autour ?
JK -Oui. Il y avait du monde, oui.
PD -Le but de votre visite c’était quoi ?
JK -C'était pour me rendre compte de ce qu’il se passait à Kigali.
PD -Est-ce que les gens qui ont, qui ont vu passer le premier ministre avec son escorte comme ça, il
n’était pas possible pour eux autres d’interpréter ça comme un, une incitation ?
JK -D’abord je ne sais pas si, si, s’ils ont vu passer le premier ministre puisqu’il y avait aucun attribut
qui pouvait leur faire dire que jӎtais premier ministre.
PD -Ben à tout le moins il y a quelqu'un qui était là qui vous a reconnu ?
JK -Oui. Je ne sais même pas si c’est moi qu’il a reconnu, j'étais dans un véhicule militaire, encadré
par des militaires, en treillis militaire, je n’avais pas d’attribut du premier ministre comme tel, je ne sais
même pas si, s’il était venu pour moi ou s’il était venu pour les militaires.
PD -Mais lorsqu'il s’est rendu à votre véhicule, il vous a reconnu ?
JK -Oui.
MD -Et c'était clair qu’il allait pour vous, il allait pour vous rencontrer à ce moment-là, quand il y a...
quand ils. quand il est passé à côté...
PD -Il voulait juste vous saluer, il vous arrête juste pour vous saluer ?
JK -Ilne fait rien. ce que je sais de lui c’est que il pensait que tout le monde le considérait comme un
homme important, que donc, qu’il s’étonne qu’on, que, que les véhicules passent sans, sans s’arrêter pour
discuter avec lui. Que lui... c’est comme ça que moi je le voyais. Donc de dire que ma visite était connue,
non, parce que j’ai, je m’organisais pour, je m'étais organisé pour faire cette visite de façon à pouvoir voir
nécessairement, sans être nécessairement vu. C’est pour ça que j'avais pris un véhicule tout à fait, une jeep
tout à fait militaire, que j'étais uniquement avec des hommes en treillis militaires.
MD -Vous êtes passé assez lentement quand même pour qu’il puisse vous reconnaître, vous passez très,
très lentement près des cadavres, près de l’amoncellement de cadavres ?
JK -Lentement.. je ne crois pas parce que les, les véhicules de l’escorte, quand ils arrivaient à des
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endroits qu’ils jugeaient dangereux, ils accéléraient plutôt que de, d’aller lentement.
MD -Par contre il vous a, il a eu, quand même eu le temps de vous reconnaître, il a eu le temps de
prendre son véhicule et de, d’aller, d’aller à votre rencontre ?
JK -Moi je n’aï... je, je ne sais même pas s’il était parti directement de là, si, si, d’où il est venu même.
Le fait est qu’il nous a dépassé, qu’il a klaxonné, que les gens se sont arrêtés. Donc de l’associer.. qu’il
soit dans le secteur oui, puisque c’était dans un même secteur, mais qu’il est venu quand, comment ila
démarré, comme... même aujourd’hui ça je ne peux pas préciser.
MD -Mais il vous a... qu'est-ce qu’il vous a dit quand il vous a abordé, qu’il vous avait vu passer, qu’il
vous avait reconnu, il vous a reconnu sur la rue ? Il vous a reconnu dans un, dans un...
JK -Non, on ne s’est pas parlé, il m’a juste dit bonjour et puis il s’est présenté, me dire que c’est lui
Ngeze Hassan. Donc j'étais censé le connaître donc...
MD -Vous mentionnez, c’est ça, il dit, “il m’a dit qu’il voulait me saluer”, alors pour vouloir vous saluer
il devait vous avoir reconnu forcément.
XK -Non. Sûrement qu’il m’avait reconnu.
MD -Alors il devait pas, il fallait qu’il soit très près pour pouvoir vous intercepter de cette façon-là ?
JK -Non, que, qu’il ait été près c’est sûr qu’il était tout près. Parce que de toutes façons il n’est pas
venu de, de plusieurs kilomètres, il devait être là quelque part.
MD -Mais il vous laissait pas... est-ce que c’est pas curieux que, vous êtes heu, vous êtes à l’intérieur
de l’escorte militaire, dans un endroit qu’on peut juger dangereux et on laisse quelqu’un comme ça
s’approcher de la voiture du premier ministre et de l’intercepter, on s’arrête sur la route pour quelqu’un sans
qu’on le reconnaisse, est-ce que c'était pas quelque chose de...
JK -C’est curieux mais je crois que je m’y prêtais dans la mesure où j’avais même demandé que l’on
puisse s’arrêter et eux ils avaient refusé. Personnellement j’avais souhaité m'arrêter là-bas pour voir, mais
eux ils avaient dit que ça n’était. pour les raisons de sécurité je ne pouvais pas m'arrêter là-bas.
MD -Est-ce que possiblement certaines personnes de votre escorte le connaissait, et c’est la raison, ça
serait l'explication pour laquelle on a accepté d’arrêter ?
K -Les gens le connaissaient. Il y a très peu de gens qui ne le connaissait pas comme je l’ai dis,
que c’était plutôt, c’était plus anormal de ne pas le connaître que de le connaître.
PD -Ok, quand son journal a-t-il cessé d’être publié ?
JK -Moi je ne sais même pas s’il a cessé, dans la mesure où il a continué à publier même quand
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j'étais à Naïrobi.
PD -Alors que vous étiez à Nairobi... Je parle pendant la période, pendant la période d’avril 94, est-
ce qu’il était possible pour vous d’avoir des.
JK -Je ne l’ai pas vu mais lui il se vantait de n’avoir jamais cessé de publier. Même en exil il
publiait, il, c’est le seul journal qui n’a jamais arrêté. Je n’ai pas vu des numéros pendant la guerre
d’avril 94 à juillet, mais dans le numéro que j’ai eu au Zaïre, il disait qu’il n’a jamais cessé de publier.
PD -Ok.
MD -Hein, tu as dit ?
PD -Fifteen hour and thirty seconds.
Fin de la face B de la cassette # 60.
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