Fiche du document numéro 21335

Num
21335
Date
Dimanche 15 avril 1990
Amj
Taille
5955674
Titre
« Carcassonne », mercenaire devenu truand
Nom cité
Nom cité
Nom cité
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Mot-clé
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Un ancien bras droit de Bob Denard inculpé de vol aggravé et écroué
« Carcassonne », mercenaire devenu truand



Jacques Laffaille, ancien
lieutenant du chef mercenaire
français Bob Denard, a été
inculpé de vol aggravé et
écroué, vendredi 13 avril, par
M. Pierre Petriat, juge d'ins-
truction près le tribunal de
Nantes.

Au confluent du banditisme
et de la politique, Jacques Laf-
faille a une personnalité remar-
quable. militaire, garde du
corps du général de Gaulle,
comme des mercenaires sous
le nom de querre de « Carcas-”
sonne», il fut mêlé à l'enlève-
ment du trésorier de l'OAS,
Raymond Gorel, le 20 décem-
bre 1968 à Malakoff, qui sera
retrouvé assassiné. Au procès
en 1974, Jacques Laffaille fut
condamné à quatre ans de pri-
son.
Quand un ancien « chien de
guerre » de Bob Denard se recy-
cle dans le grand banditisme, il
jouit de protections particulières.
Au moment de son arrestation,
mercredi 11 avril, Jacques Laf-
faille était ainsi en possession de
faux papiers, réputés inimitables,
mais plus vrais que nature : sa
carte tricolore de policier, établie
au nom d'André Legoff, et son
passeport ont, semble-il, été
fabriqués par. des services offi-
ciels français. Il est vrai que l'an-
cien bras droit de Bob Denard a,
comme tant de mercenaires,
souvent travaillé main dans la
main avec les services secrets.

Quand les policiers de la PJ
nantaise et leurs collègues de
Pau interpellent Jacques Laffaille
au domicile de sa mère, près de
Tarbes (Hautes-Pyrénées), ils
découvrent tout un arsenal de
guerre. La chambre regorge de
munitions, de fusils-mitrailleurs,
d'armes de poing et de fusils
d'assauts, soigneusement entre-
tenus. Non pas que l'ex-barou-
deur soit, à cinquante ans, un
nostalgique des combats menés,
dans les années 60, aux côtés
de Bob Denard, du Congo au
Biafra, en passant par le Yémen.
Les enquêteurs pensent plutôt
que tout cet armement à servi
plus récemment lors d'attaques
à main arméee commises par
une bande de truands nantais.
D'ailleurs, dès 1969, Jacques
Lafaille avait été condamné à
quatre ans de prison, après un
hold-up commis à Marseille.

À l’arme de guerre

Surnommé « Carcassonne »
chez les « soldats de fortune »,
Jacques Lafaille a aussi cherché
la richesse en France. Dans
l'aventure toujours, mais du côté
du grand banditisme. C'est à
l'arme de guerre qu'un fourgon
blindé fut donc attaqué, le 2 jan-
vier 1979, sur le parking d'un
hypermarché de Nantes. Les
douilles des balles retrouvées
sur place étaient d'un calibre
OTAN 7,62, utilisé notamment
pour les Kalachnikov. Le « bra-
quage » avait rapporté plus de
trois millions de francs à ses
auteurs.

Jacques Laffaille et son équipe
pe eu » nantais - dont Lio-
nel Abgrall, dit « Yoyo », tué l'an
passé dans un règlement de
comptes — auraient à leur actif
d'autres attaques à main armée.
Une équipe dont certains mem-
bres sont soupconnés d'avoir
eu, dans le passé, des accoin-
tances avec l'ex-SAC (Service
d'action civique, dissous en
1982).

Le vent avait tourné pour les
« affreux » du Katanga. Avant de
se reconvertir, Jacques Laffaille
avait suivi son chef aux
Comores, au moment où celui-ci
participait au coup d'Etat de sep-
tembre 1975. Bob Denard a
depuis été expulsé de l'archipel,
en décembre 1989, à la suite de
l'assassinat, dans des circons-
tances mystérieuses, du prési-
dent comorien Ahmed Abdallah,
dont il dirigeait la garde prési-
dentielle. Le plus célèbre des
mercenaires français a toutefois
gardé suffisamment de protec-
teurs pour trouver refuge en
Afrique du Sud.

Jacques Laffaille paraît lui
aussi décidé à jouer cette carte.
A ceux qui l'interrogent, il
raconte qu'il a passé des
« contrats » avec les services
officiels français pour, notam-
ment, « descendre » les mem-
bres du commando responsable
de l'attentat de la rue Marbeuf,
commis en avril 1982 à Paris.
Coup de bluff, affabulation ? Le
soldat perdu n'hésite pas à citer
les noms de deux de ses protec-
teurs, un commissaire des Ren-
seignements généraux et un
colonel de la Direction générale
de la sécurité extérieure (DGSE).

ÉRICH INCIYAN

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