Commentaire
Jean Hélène questions an official of the United Nations Observation Mission in Uganda and Rwanda (MONUOR) who declares that he has not seen weapons cross the border since August 1993. But, continues Jean Hélène, in 1993 UNOMUR had to wait two weeks before the Ugandan army authorizes him to inspect a supposed crossing point for arms destined for the RPF. It is therefore the RPF, which does not seem obvious in the title and gives it another light: it is the RPF which is responsible for the massacres, this title tells us. It was really necessary to strike hard, this June 18, 1994, because of the accusation of the newspaper Le Soir of Brussels relegated to page 4 with a title in smaller characters. The long-awaited information, that describing the military commitment alongside Hutu Power, will only appear on June 23, 1994. But, continues Jean Hélène, there is no Ugandan political will to "padlock the border". Thus, the RPF violates the embargo with the complacency of Museveni. Where do the weapons come from? He gives an example of a Nigerian plane carrying weapons for the rebels of South Sudan hijacked for the benefit of the RPF by Entebbe. There would be weapons taken from the enemy and "possible support from the Burundian army". Jean Hélène talks at length about relations between Uganda and the RPF. Museveni reportedly distanced himself from the RPF because of the massacre of the bishops in Kabgayi. "Cordial relations have been established between the RPF and UNOMUR". He ends by talking about these refugee camps controlled by the RPF "where observers wonder about these education sessions which recall, rightly or wrongly, 'a certain Cambodia'". Jean Hélène fully embraces the Khmer Noirs (a theme dear to French military circles in Africa). What is this arms embargo?
Citation
« A ma connaissance, aucune arme n'est passée d'Ouganda au Rwanda depuis
la mise en place de la mission d'observation des Nations unies en
Ouganda en août 1993 », déclare le colonel Asrar, officier bangladais,
responsable militaire de la MONUOR (Mission d'observation des Nations
unies en Ouganda et au Rwanda). Il ajoute : « Nous avons des postes de
contrôle sur toutes les voies d'accès au Rwanda et nos patrouilles à
pied y établissent aussi des barrages itinérants. De plus, les
opérations au sol sont appuyées par une surveillances aérienne par
hélicoptères. »
Quatre-vingts observateurs pour surveiller 170 kilomètres d'une
frontière qui traverse collines, bois et marécages, est-ce suffisant ?
En privé, les officiels de l'ONU reconnaissent vite qu'avec un
contingent aussi réduit, même bien équipé, le dispositif ne peut pas
être hermétique. En outre, les observateurs de l'ONU se heurtent de
temps à autre à des contretemps qui les laissent perplexes. Par exemple,
le fait qu'il leur arrive de patienter plusieurs jours avant d'obtenir
l'aval des forces ougandaises, l'Armée de résistance nationale (ARN),
pour inspecter une nouvelle zone ; ce que le colonel Asnar appelle
joliment « délais de procédure ».
Ainsi, en 1993, les hommes de la MONUOR ont du attendre pendant deux
semaines avant de pouvoir contrôler les environs du poste frontière de
Kakitumba par où passerait, dit une rumeur jamais vérifiée, tout
l'approvisionnement du Front patriotique rwandais et aucun convoi
humanitaire n'a pu emprunter avant le 16 juin cette route asphaltée qui
descend de Kakitumba, bien qu'il s'agisse de la voie la plus directe
pour acheminer des secours en zone FPR. Autant de questions qui restent
sans réponse et donnent l'impression que ni le FPR ni les autorités
ougandaises ne jouent la transparence.
Certes, le président Museveni explique à qui veut l'entendre que, dans
la région, il n'est pas difficile de convoyer des armes clandestinement.
Son propre exemple, qu'il ne manque pas de citer, est éloquent :
lorsqu'il était chef d'une petite rébellion au centre de l'Ouganda, au
début des années 80, ses hommes sont allés récupérer des armes libyennes
au Centre culturel islamique de Bujumbura, qu'ils ont ramenées par
camion à travers le Rwanda et l'Ouganda de Milton Obote, présentant à
chaque contrôle de faux certificats mentionnant une cargaison de thé
burundais !
Interrogations sur la provenance des armes
Pour les diplomates en poste à Kampala, il est évident que l'armée
ougandaise pourrait cadenasser la frontière « avec vingt hommes au
kilomètre », s'il y avait une volonté politique. L'Ouganda paraît, en
effet, la seule voie d'approvisionnement des rebelles, le nerf de la
guerre pour le FPR, celui par lequel il peut détourner aisément
l'embargo décrété par le Conseil de sécurité des Nations unies, même si
certains n'excluent pas que le trafic puisse, aussi, passer par la
frontière zaïroise.
La provenance des armes suscite aussi quelques interrogations. Difficile
de savoir, par exemple, ce qu'il est advenu du chargement d'un appareil
nigérian, bloqué quelques jours à Chypre après une escale en Israël le
mois dernier, et qui a finalement atterri à Entebbe. Mais il est
possible qu'une partie des armes, destinées aux rebelles du Sud Soudan,
aient été détournées au profit du FPR.
Dans la capitale ougandaise, les débats portent sur le degré
d'implication de Joweri Museveni dans le soutien ougandais au FPR, un
soutien qui s'explique logiquement quand on sait que de nombreux exilés
rwandais se sont engagés dans la guérilla de Museveni et l'ont aidé à
prendre le pouvoir en janvier 1986. Pour ceux qui le mettent hors de
cause, c'est surtout les membres de son entourage (dans les cercles
militaires et politiques du pouvoir) qui collaborent étroitement, à
l'insu du président, avec les dirigeants du FPR, soit parce qu'ils sont
d'origine tutsie ou hima (l'ethnie ougandaise proche des Tutsis, dont
est issu le président), soit en souvenir de leurs années de brousse.
Personne, ici, ne conteste la thèse selon laquelle les rebelles rwandais
ont lancé leurs premières attaques en octobre 1990 dans le nord du
Rwanda, équipés de matériel militaire ougandais, mais ce matériel a-t-il
été subtilisé ou leur a-t-il été fourni ?
Et parmi les responsables de l'ONU à Kabale, on estime qu'un transfert
continuel d'armements (par livraisons discrètes) d'Ouganda au Rwanda a
eu lieu entre octobre 1990 et l'installation de la MONUOR en octobre
199O et août 1993. Le FPR aurait ainsi largement bénéficié des « surplus »
de l'ARN, qui est en train de démobiliser près d'un tiers de ses 90 000 soldats, sur les suggestions de la Banque mondiale, et dont
quelques-uns pourraient d'ailleurs être tentés par un nouveau
recrutement.
Deuxième source d'approvisionnement, les stocks pris à l'ennemi et
notamment ces caisses de munitions et ces armes lourdes d'origine
française aperçues dans tous les convois rebelles qui montent au front.
Le FPR s'est constitué un important « trésor de guerre » grâce aux fonds collectés auprès d'une diaspora rwandaise très sensible à « la cause », à savoir le retour au pays. Enfin, il ne faut pas non plus exclure un possible soutien de l'armée burundaise, à majorité tutsie, qui ferme les
yeux sur les récents recrutements opérés quasi ouvertement par le FPR
dans les camps de réfugiés rwandais ou burundais. Un soutien qui
s'explique, mais qui n'en permet pas moins au FPR de poursuivre son
offensive. « Le FPR a de longue date établi ses réseaux clandestins
d'armement, dit un diplomate rwandais, alors que nous-mêmes devons
trouver d'urgence d'autres sources d'approvisionnement. Nos fournisseurs
officiels, comme l'Afrique du Sud, ont reçu ordre de respecter
l'embargo. »
Est-ce que cet appui, au moins tacite, de l'Ouganda au FPR n'est destiné
qu'à payer la dette contractée par M. Museveni envers les réfugiés
rwandais ? Ou bien cherche-t-il, comme le clame le gouvernement
intérimaire du Rwanda, à « créer un empire tutsi dans la région » ? « Le président a d'autres soucis, explique un diplomate occidental, à commencer par le problème du Sud Soudan. »
L'arrivée imminente de l'armée soudanaise sur la frontière nord du pays,
jusque-là aux mains des rebelles sudistes (soutenus par Kampala), risque
fort d'accélérer la déstabilisation du Nord par Khartoum, qui y arme
déjà une petite guérilla plus proche du banditisme. Le président
chercherait plutôt à se « débarrasser » des exilés rwandais en les
renvoyant chez eux. « Dès 1988, j'ai dit à Habyarimana [le président
rwandais tué le 6 avril dernier et dont la mort a déclenché la reprise
de la guerre civile] qu'il devrait laisser rentrer les réfugiés »,
affirme M. Museveni, sans doute inquiet de ce que la xénophobie
anti-rwandaise devient un argument électoral de l'opposition assez prisé
par la population. En effet, les réfugiés rwandais (dont les premiers
sont arrivés en 1959) ont bien réussi en Ouganda et ont souvent servi de
bouc émissaire, notamment en 1982 lorsqu'ils ont été littéralement
expulsés par le président Obote vers le Rwanda, qui s'est obstinément
refusé à les accueillir. Les « baniarwandais » se sont alors tournés
vers M. Museveni, qui lançait sa rébellion. Mais, après la prise de
Kampala par l'ARN, le sentiment anti-tutsi a exacerbé l'émergence d'une
véritable « mafia rwandaise », mal supportée par les Ougandais.
Depuis le début du conflit, Joweri Museveni s'est efforcé d'expliquer
que la guérilla tutsie était un problème interne au Rwanda, se montrant
peu critique à l'égard du FPR, mais le ton a changé depuis quelques
jours. Il adressa de sévères critiques au FPR, à la suite du massacre
des évêques à Kabgayi, au moment où la presse ougandaise rapportait des
témoignages de rescapés des tueries attribuées au FPR.
Le chef de l'Etat ougandais semble prendre quelque distance et appelle
publiquement le FPR à accepter un cessez-le-feu puisqu'« il n'a pas les
moyens de gagner la guerre rapidement ». Il insiste, d'autre part, sur
la nécessité du passage du pouvoir, sur le modèle des accords d'Arusha,
s'ils sont modifiés pour écarter les responsables des massacres. On
rapporte que M. Museveni ne s'est pas attardé au sommet de
l'Organisation de l'unité africaine à Tunis, irrité par les reproches de
ses pairs sur son soutien aux rebelles, alors qu'il n'a pas ménagé ses
efforts, convoquant régulièrement à Kampala un « comité de crise »
composé des ambassadeurs des pays voisins et des représentants
américains, français et britanniques.
Si, à Kampala, il ne fait guère de doute que des relations cordiales se
sont établies entre la MONUOR et le FPR, il n'en va pas de même avec les
organisations humanitaires qui se pressent dans la zone rebelle. Le FPR
entend contrôler étroitement l'organisation des secours aux « six cent
mille déplacés des camps de la zone libérée », d'où la grogne des
organisations humanitaires, qui s'insurgent contre ces contraintes.
D'autres malaises se font jour, comme l'interdiction temporaire d'accès
à certains camps, toujours gérés conjointement par deux responsables,
l'un politique et l'autre militaire. Pour des « raisons de sécurité »,
il est difficile, voire impossible, de sortir de ces camps où les
observateurs s'interrogent sur ces séances d'éducation qui rappellent, à
tort ou à raison, « un certain Cambodge »...
DOC:AVEC CARTE