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AU moins 70 personnes, dont 9 religieux, ont été massacrées par des membres de la milice présidentielle dans le quartier de Nyamirambo (sud-ouest de la capitale), considéré comme le bastion des extrémistes partisans de la dictature d'Habyarimana. La Mission des Nations unies pour le Rwanda (MINUAR) avait reçu le 5 juin une lettre d'un responsable d'un ordre religieux, les frères Joséphites, disant qu'ils étaient en danger, a indiqué le porte-parole de la MINUAR, le commandant belge Jean-Guy Plante. Deux jours plus tard, une organisation humanitaire informait la MINUAR que 9 religieux et 63 autres personnes avaient été tués.
La radio du Front patriotique rwandais (FPR) a fait savoir, mercredi soir, que 13 religieux, dont l'archevêque de Kigali et deux évêques, avaient été tués au sud de la capitale par quatre soldats du FPR. L'archevêque de Kigali et ancien membre de la direction du MRND (ancien parti unique au pouvoir), Mgr Vincent Nsengiyumva, le président de la Conférence des évêques catholiques, Thaddee Nsengiyumva et l'évêque de Byumba, Mgr Joseph Ruzindana, ont été tués par les gardes qui étaient chargés de leur surveillance. Ils soupçonnaient les trois prélats d'avoir pris part au massacre de leurs familles. Quand les autres gardes ont découvert les corps des ecclésiastiques, ils ont abattu un des soldats impliqués dans l'exécution. Les trois autres ont réussi à s'échapper mais sont recherchés pour être déférés devant un tribunal. Les autorités françaises se sont déclarées « émues » par l'assassinat des 13 religieux. Par ailleurs, Paris demande la libération du père André Sibomana, président de l'Association des journalistes rwandais et défenseur des droits de l'homme, arrêté début juin à Butare par des soldats gouvernementaux.
Au total, ce sont près de 80 prêtres et religieux qui ont été tués depuis le 6 avril dernier. L'envoyé spécial de « l'Humanité » avait donné une liste des premiers ecclésiastiques massacrés par les hommes de main de la dictature. Le bilan s'avérera certainement plus lourd car la hiérarchie catholique est toujours sans nouvelle de dizaines d'autres prêtres. La direction de l'Eglise catholique, principalement Hutu, se voit ainsi décimée dans un pays considéré comme le plus catholique d'Afrique. Les principaux responsables en étant les milices présidentielles.
Les derniers événements et notamment la mort des deux plus hautes personnalités de l'épiscopat rwandais risquent de relancer les extrémistes et les massacres. Un règlement politique s'en trouverait ainsi retardé.
CHRISTOPHE DEROUBAIX.