Fiche du document numéro 13725

Num
13725
Date
Jeudi 2 juin 1994
Amj
Taille
61274
Titre
Avec un zeste
Cote
Nº1543
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Appel de John Major à la répression contre les mendiants: ils sont
« inesthétiques » et « nuisent au tourisme ». Appuyant son leader, un
député conservateur a ajouté qu'ayant voulu un jour offrir un sandwich
à un de ces mendiants, celui-ci ne pouvait pas se lever tellement ses
poches étaient lourdes de pièces de monnaie. C'était ma rubrique
« Encore une tasse d'humour, mon Anglais ? ».

Trois enseignants marocains,
qui avaient lancé un appel pour l'adoption du berbère comme autre
langue officielle, ont été condamnés par le tribunal d'Er-Rachidia à
des peines d'un et deux ans de prison ferme. Ils auront le temps de
perfectionner leur berbère. C'était ma rubrique « Encore un verre
d'humour, mon Français ? ».

Rwanda. Combien de victimes de la guerre
civile? Deux cent mille? Cinq cent mille? Dans le lac Victoria, on
retrouve des cadavres mutilés, des têtes sans corps, des corps sans
jambes. Craignons qu'on ne nous exagère l'horreur de ces massacres en
comptant pour trois morts une tête d'un côté, des mains d'un autre et
une paire de pieds d'un troisième, alors qu'il ne s'agira que d'un seul
et unique massacré. C'était ma rubrique « Encore un coup de machette,
mon Tutsi? Non merci, c'est ma tournée, mon Hutu ».

Berlusconi vole au
secours de ses ministres néo-post-fascistes qui ne savent plus comment
dire du mal de Mussolini tout en chantant ses louanges. Sa mise au
point, vendredi dernier, s'est voulue définitive: « Mussolini doit être
condamné. Après une période initiale où il a fait des choses positives,
il a supprimé la liberté et entraîné le pays dans la guerre. Ce sont
les faits historiques. » Les faits historiques, bien sûr, rappellent les
historiens, sont en réalité que si les marais Pontins ont été asséchés
et si les trains sont jamais arrivés à l'heure, cela vint en second
lieu et que Mussolini commença par supprimer les libertés. C'était ma
rubrique « On s'est pris les pieds dans les spaghettis, mon Berlusconi ».

Quach Vinh Nien était depuis seize ans dans les prisons du Viêt Nam.
Son crime? Avoir tenté de publier des articles antigouvernementaux. Sa
femme et sa fille, exilées en Australie, devenues citoyennes
australiennes, ont obtenu du gouvernement australien qu'il fasse
pression sur Hanoi pour que Quach Vinh Nien obtienne sa liberté. Il l'a
obtenue et vient de les rejoindre en Australie. Cette liberté, font
cependant remarquer des gens qui ne sont jamais contents, a été la
liberté de débarrasser le Viêt Nam de sa présence, pas celle de pouvoir
enfin y publier ses articles antigouvernementaux. C'était ma rubrique
« C'est un point de vue, mais reconnaissez que le gouvernement
vietnamien donne à Quach Vinh Nien la possibilité de publier en
Australie tous les articles qu'il voudra contre le gouvernement
australien ».

Le Conseil de Sécurité des Nations unies vient de lever
l'embargo sur le commerce des armes fabriquées en Afrique du Sud. Les
clients ne manquent pas dans la région et on s'attend, dès cette année,
à la création de vingt mille emplois. C'était ma rubrique « Enfin des
armes africaines pour les Africains ».

D. D. T.

Post-scriptum qui n'a rien à voir. Mise en vente dans les kiosques du
numéro 6 de « Maintenant » consacré à la censure, ses scandales, ses
dessous affriolants. Envoi de sacs-poubelles à tous les députés par
l'association Avis de Recherche (BP 53, 75861 Paris Cedex 18) pour
qu'ils y jettent les textes de lois archaïques qui condamnent les
insoumis au service militaire à de la prison ferme, alors que les
prisons sont déjà pleines sans eux et que la plupart des délits,
maintenant, peuvent faire l'objet de peines de substitution.

Delfeil de Ton

Le Nouvel Observateur

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