Fiche du document numéro 13414

Num
13414
Date
Mardi 12 avril 1994
Amj
Auteur
Taille
21357
Titre
Kigali : terreur et espoir de libération
Sous titre
Les rebelles du Front patriotique aux portes de la capitale du Rwanda. Ils contrôleraient déjà une grande partie du pays. La plupart des Français évacués.
Page
11
Cote
no 15445
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
« NOUS allons remettre de l'ordre à Kigali », avait prévenu samedi, Paul Kagame, chef militaire du Front patriotique (FPR) alors que les massacres se poursuivaient dans la capitale. Débutée dimanche soir, l'offensive des rebelles a en effet redoublé d'intensité dans la journée du lundi.

Deux bataillons de 600 combattants du FPR seraient aux portes de Kigali où des combats opposent des troupes rebelles
stationnées dans la place en vertu de l'accord de paix d'août 1993 - et les forces gouvernementales. D'ores et déjà, le FPR, qui dispose d'une armée de plus de 20.000 hommes, envisagerait d'y envoyer des renforts. Les échanges de tirs à l'arme lourde se sont intensifiés. On apprenait hier qu'un hôpital privé de la ville avait été touché, dimanche soir, par un obus, faisant 27 morts et une centaine de blessés. La Mission des Nations unies pour l'assistance au Rwanda (MINUAR) a précisé que l'origine du tir était pour l'instant inconnue.

L'étau se resserrant, un officier français a même conseillé aux journalistes de quitter la ville, « les rebelles n'étant plus qu'à une dizaine de kilomètres ». De son côté, le porte-parole militaire belge a indiqué que « les bandes armées tuent peut-être un millier de gens par jour » à Kigali. Un journaliste de l'AFP aurait ainsi vu deux jeunes blessés être achevés à la baïonnette par des militaires à l'intérieur de l'hôpital de la ville.

Signe, s'il en fallait un, de l'étape franchie dans ce conflit, les affrontements entre forces gouvernementales et insurgés gagneraient l'ensemble du pays. Dans le nord, les rebelles s'approcheraient de la ville de Byumba (50 km de Kigali). Les forces du FPR auraient coupé la route entre la capitale et la ville de Ruhengeri dans le nord-ouest et pratiquement fini d'encercler plusieurs autres positions gouvernementales. Ainsi, le FPR contrôlerait déjà une proportion importante du pays, rendant ainsi caduc l'appel - tardif - du prétendu gouvernement à négocier.

Si la guerre s'installe heure après heure, l'évacuation des ressortissants se poursuit à grande vitesse. Alors que les premiers 45 Français sont arrivés dimanche soir à Paris, tous nos compatriotes - à l'exception d'un tout petit nombre - avaient quitté lundi le Rwanda. Lors de ces vols, 130 ressortissants de diverses nationalités ont pris place à bord des Transall en partance pour le Centrafrique ou le Burundi. Seule inquiétude pour le Quai d'Orsay: trois coopérants militaires n'auraient pas donné signe de vie depuis plusieurs jours. Si tous les Nord-Américains ont pu être évacués, il reste sur place de nombreux Belges; en effet, seuls 250 d'entre eux - sur les 1.500 - ont pu partir. A Bruxelles, on estime à plusieurs jours le temps nécessaire à leur évacuation, ce qui n'est pas sans risque tant la situation se dégrade rapidement. Situation qui semble faire tache d'huile au Burundi voisin où des centaines de civils fuient vers la Tanzanie par peur que n'éclatent des troubles entre communautés, identiques à ceux du Rwanda.

En visite à Paris, le président sénégalais Abdou Diouf a demandé lundi « une mobilisation de la communauté internationale pour mettre fin à la tragédie rwandaise ». Non exempte de reproches sur le conflit en cours, il est à espérer que, au-delà des déclarations d'intentions, celle-ci répondra à cet appel.

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