Citation
La notion d’acte de Gouvernement est au cœur de la séparation des pouvoirs, en interne, d’une part, et de l’incompétence du juge national pour connaître des relations internationales de la France, d’autre part.
Quoique remise en question à divers titres, cette notion a été réaffirmée par plusieurs décisions récentes du juge administratif.
Dans le domaine international, singulièrement, il peut y avoir des cas d’indemnisation sans faute du fait des relations internationales de la France.
Source : CE, Assemblée, 30 mars 1966, Compagnie générale d’énergie radioélectrique, n°50515, rec. p. 257 La postérité de cette décision n’est pas numériquement imposante mais elle ne manque pas d’intérêt (Sources : CE, Section, 29 octobre 1976, Ministre des affaires étrangères c/ consorts B., n°94218 et, surtout, CE, Assemblée, 8 février 2007, Gardedieu, n° 279522) ; au titre des principes généraux du droit de l’Union Européenne voir CE, 23 juillet 2014, Société d’éditions et de protection route, n° 354365).
Ce régime juridique vient même de connaitre une spectaculaire extension théorique (CE, 24 octobre 2024, Mutuelle centrale de réassurance (MCR), n° 465144, au rec.).
A ces sujets, voir notre article plus complet et récent qui nous a donné l’occasion d’effectuer une synthèse :
Un refus de protection diplomatique est bien un « acte de Gouvernement » qui, pour rupture d’égalité devant les charges publiques, pourra donner lieu à indemnisation par l’Etat sous de strictes conditions
Reste que la responsabilité continue de ne pouvoir être, en ce domaine, pour faute.
Dès lors est-ce sans surprise que le tribunal administratif de Paris a jugé ne pas être compétent pour indemniser de possibles victimes des décisions et agissements de l’Etat français entre 1990 et 1994 à l’égard de l’Etat rwandais, puis de l’Organisation des Nations Unies, puisque lesdits agissements ne sont pas détachables de la conduite des relations internationales de la France.
Les associations Rwanda avenir et Collectif des parties civiles pour le Rwanda ainsi vingt-et-une personnes physiques qui avaient demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l’Etat français à réparer les préjudices subis en raison de fautes commises par la France dans sa politique étrangère à l’égard du Rwanda entre 1990 et 1994, qui auraient — selon elles — favorisé le génocide des Tutsis, ont été donc déboutées par un jugement n° 2309845/4-1 du 14 novembre 2024.
Ce tribunal rappelle que les recours tendant, sur le terrain de la responsabilité pour faute de l’Etat, à la réparation des préjudices qu’une décision ou qu’un acte non détachable de la conduite des relations internationales de la France a pu causer, soulèvent des questions qui ne sont pas susceptibles, par leur nature, d’être portées devant la juridiction administrative.
Le tribunal en conclut que la requête tendant, sur le terrain de la responsabilité pour faute de l’Etat, à la réparation des préjudices que ces décisions et actes non détachables de la conduite des relations internationales de la France auraient pu causer, soulève des questions qui ne sont pas susceptibles, par leur nature, d’être portées devant la juridiction administrative et se déclare incompétent.
Source :
TA Paris, 14 novembre 2024, n°2309845