Fiche du document numéro 34286

Num
34286
Date
Jeudi 23 mai 2024
Amj
Auteur
Fichier
Taille
245553
Pages
10
Titre
La reconnaissance internationale du génocide commis contre les Tutsi au Rwanda et obligation des Etats de répression du négationnisme
Sous titre
Intervention du Dr Bizimana Jean Damascène, Ministre de l’Unité Nationale et Engagement Civique Au Parlement Fédéral du Canada, Ottawa
Nom cité
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Source
Type
Conférence
Langue
FR
Citation
La reconnaissance internationale du génocide
commis contre les Tutsi au Rwanda et obligation
des Etats de répression du négationnisme

Intervention du Dr Bizimana Jean Damascène
Ministre de l’Unité Nationale et Engagement Civique
Au Parlement Fédéral du Canada
Ottawa, 23 Mai 2024

Mon premier propos est, naturellement, celui d’adresser ma sincère reconnaissance aux organisateurs de cette conférence dédiée à la mémoire des victimes du génocide commis contre les Tutsi au Rwanda il y a de cela 30 ans. C’est un travail de très haute importance car ces victimes furent tuées dans des conditions extrêmement atroces avec une impitoyable cruauté. C’est donc un devoir d’humanité de les honorer. Leur mémoire est d’autant plus nécessaire du fait que les concepteurs et exécutants de ce crime abominable, en tuant les tutsi, ils niaient tout simplement leur humanité. Plus grave encore, une fois le crime consommé, il y a des négationnistes qui se hasardent à nier la spécificité du génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda entre avril et juillet 1994.

Le Canada ne fait pas malheureusement exception de ce phénomène criminel qui rend les victimes auteurs du crime qui a anéanti les leurs. Qu’il suffise de rappeler le cas le plus scandaleux, celui de la prétendue journaliste Judi Rever qui dans depuis quelques années, s’est installée dans la nébuleuse des faussaires de l’histoire du génocide commis contre les Tutsi. Son dernier livre, In Praise of Blood / Rwanda, l'éloge du sang, ne fait que reprendre en leur grande majorité des allégations sans fondement de personnes condamnées par la justice pour leur rôle dans le génocide. Judi Rever ose affirmer que pour prendre le pouvoir, le président rwandais, son Excellence Paul Kagame, avait besoin du génocide des siens, qu’il aurait donc planifié et déclenché ce terrible génocide dans le but d’y mettre un terme, afin de se poser en sauveur aux yeux du monde et d’asseoir sa domination sur le pays. C’est une grossière insulte aux victimes et au Front patriotique rwandais qui fut le seul à se battre pour mettre fin au génocide au moment où tous les acteurs internationaux avaient abandonné le Rwanda.

Selon les très nombreux travaux du Professeur Yves TERNON, l’un des meilleurs connaisseurs du phénomène génocidaire, chaque génocide est suivi de son négationnisme. Pour ce qui est du génocide des Tutsi, son négationnisme prend des formes mouvantes et novatrices selon les époques.

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Dès les premières semaines de sa consommation, le déni du génocide commis contre les Tutsi avait la forme d’un rejet absolu du Crime et de ses spécificités. Au fil du temps, les tenants de cette thèse ont échoué à cause de sa reconnaissance par le TPIR et par les Nations unies. Dès lors, ils ont adopté de nouvelles pistes d’action et de nuisance en fabriquant la thèse d’un autre génocide imaginaire, celui qui aurait été commis par le FPR sur des Hutu. En outre, ils inversent les responsabilités en accusant le FPR d’être l’auteur du génocide des Tutsi. Ce faisant, et pour mieux réussir leur plan, ces négationnistes ont inféodé les institutions de certains Etats, les ONG et les organisations internationales et les instrumentalisent à l’accréditation de leurs mensonges.

L’autre nouveauté se trouve au niveau des propagateurs de ce négationnisme. Au départ, ils se situaient dans le clan des tueurs et des lobbies rwandais ou étrangers amis de l’ancien régime auteur du génocide contre les Tutsi. Désormais, les négationnistes se trouvent également au sein des groupes non impliqués directement dans le génocide qui se cachent derrière le libre exercice des droits civils et politiques pour prêcher l’idéologie du génocide et l’incitation publique et directe à renverser l’Etat rwandais et promouvoir la haine ethnique.

Les thèses de ces individus sont répandues régulièrement dans la presse, dans les ouvrages, dans les colloques et séminaires en Europe, en Amérique et ailleurs.

Pour mieux comprendre la gravité et la dangerosité de ces thèses, il est mieux de rappeler certains faits clés ayant conduit à la reconnaissance internationale du génocide commis contre les Tutsi que ces négationnistes tentent de bafouer. Rappelons d’abord un fait souvent ignoré, celui du plaidoyer de culpabilité du premier ministre du Gouvernement génocidaire, Jean Kambanda qui, le 1er mai 1998, plaida coupable devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda. Il a clairement reconnu sa responsabilité pénale individuelle et celle de l’Etat rwandais dans ce génocide en précisant que sa préparation date d’avant le 7 avril 1994 et que son exécution a été perpétrée de façon généralisée et systématique à partir de cette date sur instructions du Gouvernement qu’il dirigeait.

De fait, la période allant d’octobre 1990 à début 1994 contient des preuves évidentes du plan du génocide qui sont unanimement établies par toutes les instances internationales habilitées.

En octobre 1990, une série de dépêches adressées à sa hiérarchie par l’ambassadeur de France au Rwanda, Georges Martres et l’attaché de défense, le colonel René Galinié, font clairement état d’une situation de génocide au Rwanda. Leurs rapports destinés à six institutions clés : la présidence de la République française, le Ministère des affaires étrangères, le ministère de la coopération, Le ministère de la Défense, la Direction Générale de la Sécurité Extérieure et la

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Direction des Renseignements Militaires utilisent l’expression Génocide et évoquent un plan de son extension sur tout le territoire. Par exemple, la dépêche du 13 octobre 1990, signé conjointement par le colonel Galinié et l’ambassadeur Martres, note, je cite: « Les paysans hutus organisés par le Parti au pouvoir ont intensifié la recherche des Tutsi dans les collines, des massacres sont signalés dans la région de Kibilira. Le risque de généralisation parait se concrétiser. »

Ensuite, le Télégramme du 15 octobre 1990, adressé par l’ambassadeur Martres au ministère des affaires étrangères et à l’Amiral Lanxade, chef d’état-major particulier du Président Mitterrand évoque clairement un génocide contre les Tutsi en ces termes : « La population rwandaise d’origine tutsi compte sur une victoire militaire, même partielle, [qui] lui permettrait d’échapper au génocide. »

Enfin, la Dépêche du 19 octobre 1990, signé par le Colonel Galinié confirme le constat de l’ambassadeur Martres en notant, « Il existe des possibilités de déclenchement de graves exactions à l’encontre des populations tutsi de l’intérieur, directement encouragées par les plus durs du régime actuel, jouant ainsi leur va-tout ».

Quatre ans après les faits, en 1998, l’ambassadeur Martres était auditionné par la Mission parlementaire française et a réaffirmé le même constat d’évidence des signes avant-coureurs du génocide contre les Tutsi en 1990: « le génocide était prévisible dès cette période. Certains Hutus avaient d’ailleurs eu l’audace d’y faire allusion. Le colonel Serubuga, Chef d’Etat-major adjoint de l’armée rwandaise, s’était réjoui de l’attaque du FPR, qui servirait de justification aux massacres des Tutsis. Le génocide constituait une hantise quotidienne pour les Tutsis. Dès le début du mois d’octobre 1990, plusieurs milliers de personnes ont été emprisonnées à Kigali, la plupart en raison de leur appartenance à la minorité tutsie ou parce qu’elles avaient des sympathies ou des communautés d’intérêts avec les Tutsis. »

Un autre témoignage allant dans ce sens fut rapporté à la mission parlementaire française par le général Jean Varret, qui était chef de la coopération militaire en France d’octobre 1990 à avril 1993. Le général Varret rapporta que lors de sa visite au Rwanda en 1991, le colonel Pierre Célestin Rwagafirita, chef d’état-major de la gendarmerie rwandaise lui a révélé le projet du Gouvernement rwandais d’extermination des Tutsi en ces termes: « Ils sont très peu nombreux, nous allons les liquider.» Le Général Varret l’a confirmé dans un ouvrage qu’il a publié en 2023 sous le titre « Souviens-toi. Mémoires à l’usage des générations futures ».

Outre les avis des diplomates en poste au Rwanda entre 1990 et 1994 qui ont été
témoins de la préparation du génocide contre les Tutsi, les organisations

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internationales non gouvernementales avaient à leur tour recueilli maintes informations dans ce sens.

Deux exemples:

En mai 1992, Amnesty International, a fait un bilan des violations des droits humains au Rwanda entre 1990 et 1992, et a noté : « des représentants du gouvernement rwandais ainsi que des membres des forces de sécurité appartenant à la majorité ethnique hutu, continuent à cautionner et à commettre impunément des violations des droits de l’homme dirigées essentiellement contre la minorité tutsi, parmi lesquelles l’exécution extrajudiciaire de 1000 Tutsi ; le recours généralisé à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements; des dizaines de disparitions; enfin l’emprisonnement dans la plupart des cas sans inculpation ni jugement de plus de 8000 personnes parmi lesquelles de nombreux prisonniers d’opinion. »

En janvier 1993, une Commission internationale d’enquête sur les violations des droits de l’homme au Rwanda créé par cinq organisations internationales non gouvernementales, sous la conduite de la fédération internationale des ligues des droits de l’homme, a effectué des enquêtes au Rwanda, et a publié son rapport le 07 mars 1993. La Commission, conduite par Jean Carbonare, a établi un constat accablant mettant en évidence l’implication des plus hautes autorités de l’Etat dans la préparation et l’exécution des massacres ethniques contre les Tutsi et a insisté sur un risque de génocide qu’encouraient les Tutsi.

Ces rapports des ONG Internationales ont conduit la Commission des Nations Unies pour les droits de l’homme à agir. Ainsi, en avril 1993, elle dépêché au Rwanda le rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Bacre Wally Ndiaye. Au bout des ses enquêtes menées au Rwanda du 8 au 17 avril 1993, le Rapporteur a apporté des éléments tout autant terrifiants, précisant que les massacres ethniques visant les Tutsi et autres violations des droits humains étaient massivement commises par les milices organisées par le parti au pouvoir, les autorités locales et des membres de l’armée ou de la gendarmerie.

Le rapport de Mr Ndiaye publiait le 11 août 1993 avertissait clairement l’imminence d’un génocide contre les Tutsi: « Il ressort très clairement des cas de violences intercommunautaires que les victimes des attaques, des Tutsi dans l’écrasante majorité des cas, ont été désignés comme cible uniquement à cause de leur appartenance ethnique, et pour aucune autre raison objective1. »

Le 11 janvier 1994, le général Dallaire, chef de la Mission des Nations Unies pour
l’Assistance au Rwanda (MINUAR), a envoyé un télégramme au siège de l’ONU
dans lequel il faisait état d’informations montrant que l’entourage du président

1- E/CN.4/1994/7/Add.1, paragraphe 78

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Habyarimana projetait l’extermination des Tutsi de Kigali dont la liste exhaustive avait été dressée. Ces informations révélaient l’existence d’une milice de 1700 hommes capable de tuer 1000 Tutsi en vingt minutes. Le télégramme signalait également l’existence d’une très importante cache d’armes à Kigali et informait l’ONU qu’il comptait lancer un raid pour faire échec à ce plan. Le chef du département des opérations de maintien de la paix, Koffi Annan, interdit à Dallaire de mener son opération.

Ces quelques faits précurseurs du génocide, pris parmi des milliers d’autres, montrent avec une évidence indiscutable, que le génocide des Tutsi consommé entre avril et juillet 1994, relevait d’un plan bien connu et soigneusement élaboré. Les élucubrations des négationnistes, fabriquées de toutes pièces pour leurs intérêts morbides, ne devraient plus vous induire en erreur, même lorsqu’elles sont véhiculées par des personnes comme Judi Rever qui s’habillent de leur notoriété journalistique pour, en réalité, mener une campagne mensongère sur un génocide internationalement établi.

Puisque les 30 ans qui viennent de s’écouler après la perpétration du génocide
contre les Tutsi sont logiquement en mesure d’entraîner des oublis compréhensibles,
permettez-moi de rappeler des étapes essentielles de la reconnaissance
internationale de ce génocide.

En date du 11 et 12 mai 1994, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme, Mr José Ayala LASSO (Equateur) qui venait de prendre ses fonctions, accompagné du rapporteur spécial de la sous-commission de l’ONU sur l’impunité, Mr Louis JOINET (France), a fait une visite au Rwanda. Constatant la gravité des massacres dont il a été témoin, il a convoqué dès son retour à Genève, une session extraordinaire sur le Rwanda qui s’est réunie les 24 et 25 mai 1994. A la fin de la troisième session spéciale sur le Rwanda, une résolution a été adoptée constatant ce qui suit : « des actes ressortissants au génocide se sont vraisemblablement produits au Rwanda ». La réunion a alors décidé de nommer un rapporteur spécial sur le Rwanda, en la personne du professeur René Degni SEGUI, doyen de la faculté de droit de l’université d’Abidjan en Côte d’Ivoire, en lui octroyant une équipe d’enquêteurs spécialisés.

Le Rapporteur a mené ses premières enquêtes au Rwanda du 9 au 20 juin 1994et a publié son premier rapport d’établissement des faits et leur analyse, le 28 Juin 1994. Il concluait sans ambages qu’au Rwanda se commettait un génocide contre la population tutsi, en le disant en des termes crus: « la qualification de génocide doit être d’ores et déjà retenue en ce qui concerne les Tutsi2. » Le Rapporteur précisa que « La Communauté internationale assiste à une tragédie humaine qui semble être

2- E/CN.4/1995/7, paragraphe 48

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bien orchestrée (…) les massacres sont d’autant plus horribles et terrifiants qu’ils se donnent pour programmés, systématiques et atroces3. »

Le 1er juillet 1994 le Conseil de sécurité des Nations Unies qui avait à plusieurs reprises débattu la question du génocide sans parvenir à adopter à temps des mesures efficaces pour y mettre fin, a finalement mis sur pied une commission de trois experts, dans sa résolution 935 composée de Mr Atsu Koffi AMEGA (président) originaire du Togo, Mme Haby DIENG originaire de Guinée et de Mr Salifou FOMBA du Mali. Dans le paragraphe 3 de la résolution 935, apparaît la mission claire de la Commission qui doit présenter des conclusions « quant aux éléments de preuve concernant les violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire du Rwanda, y compris d’éventuels actes de génocide. »

La Commission a mené un travail d’enquête au Rwanda du 29 août au 17 septembre 1994. Dans leur rapport préliminaire rendu public le 4 octobre 1994 les experts ont conclu à « l’existence de preuves accablantes attestant que des actes de génocide ont été commis à l’encontre du groupe Tutsi par des éléments hutus agissant de manière concertée, planifiée, systématique et méthodique4. » Ils ont aussi conclu à la nécessité d’établir une juridiction pénale internationale pour juger leurs auteurs et complices.

La Commission a réaffirmé le même constat dans son rapport final rendu au Conseil de Sécurité le 9 décembre 1994.

Le 8 novembre 1994, le Conseil de Sécurité a franchi le pas des paroles et a pris la résolution 955 créant un tribunal pénal international chargé de juger les auteurs de génocide et autres violations graves du droit international humanitaire commis en 1994 au Rwanda et sur le territoire d’Etats voisins.

Dans son premier jugement rendu le 2 septembre 1998, contre un ancien bourgmestre, Jean-Paul AKAYESU, le Tribunal a établi qu’un génocide a été commis au Rwanda contre la population tutsi en notant ce qui suit: « Il apparaît clairement que les massacres survenus au Rwanda en 1994 visaient un objectif déterminé : celui d’exterminer les Tutsis, choisis spécialement en raison de leur appartenance au groupe ethnique tutsi (…) C’est un génocide qui a été commis au Rwanda en 1994, contre les Tutsi en tant que groupe ».

Malgré cette qualification qui ne soulevait aucune ambiguïté, des négationnistes ont continué à prétendre, au sein même du Tribunal, notamment des avocats et des experts de la défense dont plusieurs canadiens tel Me John Philipot, qu’il n’y avait pas eu de génocide contre les Tutsi ou qu’il y avait eu un double génocide. Ces

3- Ibidem, paragraphes 24 et 25

4- S/1994/1125 (29 septembre 1994)

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dérives ont amené le Tribunal à dresser, le 16 décembre 2006, un constat judiciaire stipulant que le génocide commis contre les Tutsi en 1994 au Rwanda constituait désormais un fait de notoriété publique dont l’existence, factuelle et juridique, n’est plus une matière à contestation.

Poursuivant le même chemin pour mettre fin au négationnisme et à la déformation de la vérité historique et judiciaire, le Conseil de sécurité a voté, le 16 avril 2014, la résolution 2150 qui contient trois éléments essentiels suivants :

- Rappel de la matérialité du génocide commis contre les Tutsi au Rwanda ;

- Rappel aux Etats de leur obligation de poursuivre les auteurs de ce crime partout où ils se trouvent, les juger sur leurs territoires ou les extrader au Rwanda, y compris les membres du groupe criminel des FDLR (les forces démocratiques pour la libération du Rwanda), une appellation qui n’a d’ailleurs aucun sens puisque le Rwanda n’a pas besoin d’être libéré de quoi que ce soit ;

- Enfin, rappel du Conseil de Sécurité de l’obligation de tous les Etats à
réprimer le négationnisme du génocide perpétré contre les Tutsi.

Pour mieux saisir la portée et le contenu de cette résolution, votée il y a maintenant dix ans, je vais vous citer certains extraits. Ils sont tellement clairs qu’ils devraient occasionner l’action rapide de tous les acteurs pour l’appliquer aussi vite que possible:

- « Il existe des preuves accablantes que des actes de génocide ont été
commis à l’encontre du groupe tutsi
;

- La Chambre d’appel du Tribunal pénal international pour le Rwanda a dressé
le constat judiciaire concluant que génocide était un fait de notoriété
publique qu’entre le 6 avril et le 17 juillet 1994, un génocide a été commis
au Rwanda contre le groupe ethnique tutsi, plus d’un million de personnes
ont été tuées dans ce génocide
;

- Et prenant note en s’en inquiétant de toute forme de négation de ce
génocide
;

- Souligne qu’il importe de tirer les leçons du génocide perpétré en 1994
contre les Tutsis au Rwanda
;

- Condamne sans réserve toute négation de ce génocide et invite instamment les États Membres à se donner des programmes éducatifs pour graver dans l’esprit des générations futures les leçons du génocide, le but étant d’en prévenir d’autres dans l’avenir;

- Salue les efforts déployés par les États Membres pour mener des enquêtes et poursuivre toutes personnes accusées de ce génocide ;

- Demande à tous les États d’enquêter sur les faits, d’arrêter, de poursuivre ou d’extrader, en exécution de leurs obligations internationales en la matière, tous autres fugitifs accusés de génocide qui résident sur leur territoire, y compris les dirigeants des FDLR. »

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C’est ici où les Parlements des Etats devraient agir en mettant en application des lois et règlements sanctionnant le négationnisme du génocide commis contre les Tutsi.

Il faut aussi rappeler que le 26 janvier 2018, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté à l’unanimité une résolution désignant la date du 7 avril comme la « Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994. » C’est ce qui est fait chaque année par des Etats et des Organisations Internationales.

Il y a plusieurs Etats qui ont jugé au sein de leurs juridictions des auteurs du génocide commis contre les Tutsi. Citons la Belgique (11), Suède (2), Allemagne (3), Canada (2), Pays Bas (2), Norvège (1), Finlande (1) et France (5). D’autres ont extradé des suspects vers les juridictions rwandaises : Canada, USA, Uganda, Danemark et le TPIR.

Dans le même ordre de mesures, il y a des Etats qui ont adopté des lois de
répression du négationnisme de tout génocide internationalement reconnu.

Depuis 1995, la SUISSE réprime le négationnisme dans son code pénal comme suit:
« celui qui, publiquement, niera, minimisera grossièrement ou tente de justifier
un génocide ou autres crimes contre l'humanité; sera puni d'un emprisonnement
de trois ans maximum ou de 40.000 francs d’amende ».

Lituanie : code pénal de 2010 : « Toute personne approuvant publiquement le crime de génocide et les autres crimes contre l’humanité ou crimes de guerre définis par les lois de la République de Lituanie, le droit de l’Union européenne, les décisions définitives (exécutoires) des tribunaux lituaniens ou les décisions de tribunaux internationaux ; niant ou minimisant grossièrement ces crimes, dès lors que ce comportement a revêtu un caractère menaçant, abusif ou insultant ou bien a résulté en un trouble de l’ordre public. »

Autriche : « sera puni [...] celui qui [...] nie, minimise grossièrement, approuve ou cherche à justifier le génocide national-socialiste ou d’autres crimes contre l’humanité nationaux-socialistes ou y consent ou les justifie, ou lors d’une émission ou sous un autre support, ou de quelque autre manière accessible à un grand nombre de personnes ».

Espagne : « constitue une circonstance aggravante, le fait de commettre un crime pour des raisons racistes, antisémites ou d'un autre type, une discrimination de la victime en raison de l'idéologie, de la religion, les croyances, l'ethnie, la race ou la nation à laquelle elle appartient, son sexe, l'orientation sexuelle, le handicap physique ou la maladie dont elle souffre. La discrimination, la haine ou la violence contre un fond anti-sémite, ainsi que d'autres pratiques discriminatoires, sont des infractions passibles de peines d'emprisonnement de 1 à 3 ans. »

Allemagne, 1994 : « Celui qui, publiquement ou lors d'une réunion, nie, diminue, ou approuve un acte commis sous le régime du national-socialisme, du type décrit à

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l'article 220A, paragraphe 2, d'une manière susceptible de troubler l'ordre public est punie d’une peine de cinq ans de prison ».

LUXEMBOURG: «La contestation, la minimisation, la justification ou la négation de l’existence d’un ou de plusieurs crimes contre l’humanité ou crimes de guerre tels qu’ils sont définis par l’article 6 du statut du Tribunal militaire international annexé à l’Accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d’une organisation déclarée criminelle en application de l’article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction luxembourgeoise, étrangère ou internationale ».

MACEDOINE: «toute personne qui nie, minimise grossièrement approuve et justifie [...] les crimes visés aux articles 403 à 407 sera punie d’une peine de 1 à 5 ans. Si l’un de ces actes est commis dans l’intention d’inciter à la haine, à la discrimination ou à la violence contre une personne ou un groupe de personnes pour des motifs liés à leur race, nationalité, origine ethnique ou religion, leur auteur sera condamné à une peine d’au moins 4 ans ».

MALTE, depuis 2009 : « quiconque justifie, nie ou banalise grossièrement en public tous génocides, crimes contre l’humanité et crimes de guerre visant un groupe de personnes ou un membre d’un tel groupe défini par référence à la race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique lorsque le comportement est exercé d’une manière qui : a) risque d’inciter à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes ou d’un membre d’un tel groupe; b) risque de troubler l’ordre public ou qui soit menaçant, injurieux ou insultant ».

République Tchèque, 1992 : « la personne qui nie publiquement, met en doute, approuve ou tente de justifier le génocide commis par les Nazi, ou d'autres crimes contre l'humanité des nazis ou communistes sera puni par emprisonnement de 6 mois à 3 ans ».

ROUMANIE, 1991 : « Les actions suivantes constituent des menaces pour la sécurité nationale de la Roumanie : l'ouverture, l'organisation, la Commission ou n'importe quel type de soutien apporté aux actions totalitaires ou extrémistes d'un communiste, fasciste, légionnaire ou de toute autre inspiration, des actions à caractère raciste, antisémite, révisionniste ou séparatiste susceptibles d’atteindre l'unité et l'intégrité territoriale de la Roumanie, ainsi que l'incitation à des actes pouvant mettre en péril l'ordre public dans le pays ».

La France réprime depuis 2017 la négation du génocide commis contre les Tutsi en
application du Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda.

Au niveau des juridictions régionales et internationales



La Cour européenne des droits de l'homme dans l’affaire Roger Garaudy du 24 Juin 2003: « Il y a des limites à la liberté d'expression, la justification d'une politique pronazi ne peut pas bénéficier de la protection de l'article 10 et le déni de faits historiques clairement établis, tels que l'Holocauste, sont enlevés par l'article 17

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de la protection de l'article 10. (…) dans son livre le requérant met en cause la réalité, le degré et la gravité des faits historiques relatifs à la Seconde Guerre mondiale qui sont clairement établis, tels que la persécution des Juifs par le régime nazi, la Shoah et le procès de Nuremberg. La contestation de crimes contre l'humanité est l'une des formes les plus aiguës de diffamation raciale envers les Juifs et d'incitation à la haine contre eux ».

Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies dans une décision du 8 novembre 1996 concernant Robert FAURISSON: « les dissertations prétendument historiques sur la négation ou la révision de faits tels que l’Holocauste ou l’existence des camps de la mort se verraient soustraites à la protection due à la liberté d’expression. Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies tient surtout à condamner le discours raciste, et relève en particulier que la négation de l’Holocauste est le principal vecteur de l’antisémitisme. »

Conclusion



C’est une nécessité impérieuse pour les Parlementaires canadiens de mettre en place un système juridique permettant de sanctionner tout auteur de déni d’un génocide internationalement établi. Des auteurs canadiens ou des Rwandais imbus de l’idéologie ethniste, ayant obtenu la nationalité canadienne s’évertuent à profiter de la facilité offerte par les réseaux sociaux pour diffuser des propos de négation du génocide commis contre les Tutsi ou de propagation de la haine ethnique ayant conduit à ce terrible crime.

Outre Judi Rever, il y a d’autres individus qui font des actes négationnistes similaires comme les frères John et Robin Philipot, Christopher Black, Me Philippe Larochelle, Bernard Desgnagné ou des extrémistes rwandais tel l’Abbé Fortunatus Rudakemwa qui propagent à outrance, à partir du Canada, des publications et récits de haine et de déni du génocide qui ne méritent pas leur place dans un Etat démocratique.

Le temps presse, d’user le droit, pour stopper ces manœuvres aussi criminelles que le génocide lui-même.

Je vous remercie de votre aimable attention.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024