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Dans une vidéo diffusée dimanche 7 avril à l'occasion de la 30e commémoration du génocide des Tutsis, le président français n'a pas repris les paroles sur la responsabilité de la France que l'Élysée lui avait attribuées jeudi.
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Plus de trace, plus un mot dans le discours d'Emmanuel Macron diffusé ce dimanche 7 avril à l'occasion de la 30e commémoration du génocide perpétré contre les Tutsis, du passage qui avait tant fait couler d'encre depuis qu'il avait été défloré par l'Élysée, jeudi dernier. Dans une vidéo, pour compenser son absence à Kigali, il devait en principe dire : « la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n'en a pas eu la volonté », approfondissant la responsabilité de la France dans cette tragédie.
Marche arrière
Ces mots annoncés avaient aussitôt été interprétés comme tels par les spécialistes et les médias. Ce passage « va encore plus loin que le rapport Duclert et que la déclaration qu'il a faite à Kigali », avait ainsi analysé Marcel Kabanda, président de Ibuka France, principale organisation de mémoire, justice et soutien aux rescapés du génocide des Tutsis. « Je me félicite qu'il donne de la France cette image positive d'un pays qui reconnaît ses torts et qui grandit en reconnaissant son histoire », a-t-il poursuivi. « C'est un pas en avant, incontestablement », avait réagi Vincent Duclert, qui y voyait « une reconnaissance extrêmement forte » de « toutes les fautes » que « la France a commises à partir du début des années 1990 au Rwanda ».
Du côté des médias, La Croix titrait « Génocide au Rwanda : Emmanuel Macron approfondit l'examen de conscience de la France ». Libération écrivait « Génocide au Rwanda : Emmanuel Macron sauve l'honneur de la France ». Et Ouest France, « Rwanda : la France « aurait pu arrêter le génocide », reconnaît Emmanuel Macron ».
Le président français s'est finalement abstenu de dire cela. Pourquoi ce passage n'est-il pas dans la vidéo ? L'Élysée répond qu'on l'aurait mal compris, qu'il avait diffusé, jeudi dernier des éléments de langage qui, à ses yeux s'inscrivaient étroitement dans le cadre du discours d'Emmanuel Macron à Kigali, le 27 mai 2021. Il y était venu « reconnaître » les « responsabilités » de la France dans le génocide. « Nous avons, tous, abandonné des centaines de milliers de victimes à cet infernal huis clos », avait-il ajouté, précisant que Paris n'avait « pas été complice » des génocidaires Hutus. « Je n'ai aucun mot à ajouter, aucun mot à retrancher de ce que je vous ai dit ce jour-là », a déclaré dimanche la vidéo du président français.
Sous pression ?
Interrogé sur les pressions que le président français aurait pu recevoir de la part des responsables de la politique française en 1994 pour qu'il retire ce passage, l'Élysée répond que ce n'est pas la question. Certes, mais la déclaration prévue a fait des mécontents, comme en témoigne la « mise au point » publique du général Lafourcade, publiée samedi 6 avril. « En tant qu'ancien commandant de l'opération Turquoise je peux témoigner que la France a eu la volonté de rétablir la paix et d'arrêter le génocide au Rwanda », a-t-il écrit dans un communiqué en réponse aux propos qu'Emmanuel Macron n'a finalement pas prononcé.
On peut aisément imaginer que le premier ministre de l'époque, Édouard Balladur, son ministre des affaires étrangères, Alain Juppé, l'ancien secrétaire général de l'Élysée Hubert Védrine, le chef d'état-major des armées, l'amiral Lanxade, et bien d'autres figures françaises de premier plan ont peu goûté ce passage annoncé par l'Élysée.