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PARIS, 3 juil - Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, a justifié, dimanche soir, la création d'une zone de "sécurité humanitaire" dans le Sud-Ouest du Rwanda par l'intensification des combats et les risques de nouveaux massacres dans le pays.
"Depuis quelques jours, la situation se dégrade sur le terrain, les combats s'intensifient et cela risque de provoquer un nouvel exode de population, avec les risques de massacres qui en découleraient", a-t-il affirmé sur France 2.
"Si nous ne voulons pas voir les combats nous amener petit à petit à nous retirer vers la frontière entre le Rwanda et le Zaïre, il faut créer une zone humanitaire sûre dans la partie sud-ouest du pays (...), à faire en sorte que les populations soient à l'abri de toute menace d'où qu'elle vienne, et les forces franco-sénégalaises auront donc cette mission", a ajouté M. Juppé.
Le ministre a précisé que le recours à la force, prévu sous le chapitre 7 de l'ONU et qui couvre l'opération Turquoise, était autorisé "afin - et afin seulement - de protéger les populations. Donc dans la zone de sécurité humanitaire à fortiori".
M. Juppé a d'autre part affirmé que la "partie diplomatique qui se joue est extrêmement importante et d'une grande urgence", indiquant qu'un émissaire français "rencontrera aujourd'hui même M. Jacques Bihozagara (représentant du Front patriotique rwandais, FPR, à Bruxelles) pour le tenir informé des intentions françaises.
De bonne source à Paris, on indique que l'ambassadeur français Jacques Warin, chargé des contacts avec le FPR, rencontrera dimanche soir à Bruxelles M. Bihozagara.
(Le FPR s'est déclaré dimanche à Bruxelles hostile au projet français de création d'une zone de "sécurité humanitaire", estimant qu'une telle enclave permettrait de "protéger les auteurs de massacres", qui ont fait des centaines de milliers de morts et sont attribués aux forces et aux milices gouvernementales hutues.)
M. Juppé a également réaffirmé que l'objectif de l'opération française au Rwanda n'était pas "le statu quo", mais "le cessez-le-feu, la reprise du processus d'Arusha (de réconciliation inter-rwandaise), et le déploiement de la MINUAR (Mission des Nations Unies pour le Rwanda) le plus vite possible sur le terrain".
"Il faut que les grandes puissances, qui ont les moyens et qui ne veulent pas envoyer des hommes, puissent dégager les crédits nécessaires pour équiper ces troupes, pour les former et les transporter. Il y a maintenant une très grande urgence", a-t-il dit.
M. Juppé a cependant indiqué qu'à défaut d'une mobilisation de la communauté internationale, la France ne pourra pas "assumer indéfiniment la charge de cette opération".
"Nous avons un mois devant nous pour obtenir cette mobilisation internationale, qui est la seule à même de stabiliser définitivement la situation", a-t-il affirmé.
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