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Voilà… Ben, écoutez, Mesdames et Messieurs, et surtout Mesdames, euh…, Isabelle [Kalihangabo] à ma droite et Chantal [Morelle] à ma gauche, euh, je veux vous remercier pour vos excellents discours. Euh…, Isabelle, un discours improvisé, hein, faut…, faut le savoir. Parce que y'a cinq minutes, y'a dix minutes, elle ne savait pas qu'elle devrait parler. Euh, normalement c'était donc une représentante de la Première dame qui devait conclure. Mais apparemment elle est…, elle est en retard. Et…, et honnêtement, ce que vous avez dit, c'est…, c'était complet. Euh…, dans la forme, dans le fond, euh, en plus ça venait du cœur. Et…, et je pense que ça résumait, euh, ben l'essentiel de…, de ce pourquoi on est là. Euh…, ça répondait…, ça faisait écho aussi, euh, au discours de Chantal. Chantal a consacré, euh, deux années de son existence, euh, non-stop, euh, avec les autres membres de la commission Duclert, à travailler sur ce rapport de 1 200 pages. Alors qui n'est peut-être pas parfait, y'a eu, euh…, hein, y'a…, y'a eu une séquence qui est…, a été entièrement consacrée -- une séance plutôt -- à ce rapport, hier [18 septembre]. Mais qui honnêtement a complètement changé la donne. C'est-à-dire si on est ici, euh, c'est parce que y'a eu les membres de la commission Duclert, nommés par le président de la République Emmanuel Macron, euh, qui ont abattu un travail formidable dans des conditions difficiles à partir des archives officielles françaises. Et ce qui…, c'est ce qui fait la force du rapport. Alors ça fait peut-être ses limites aussi parce qu'effectivement, y'a les aspects qu'on trouve dans [le rapport] Muse et qu'on peut pas trouver dans [le rapport] Duclert. Euh, mais en même temps, du coup c'est incontestable parce que la plupart de ces archives, elles ont été écrites en fait par des gens qui pensaient que notre allié… -- c'est pas qui pensaient, d'ailleurs, c'était la politique officielle de la France à l'époque --, notre allié c'était Habyarimana et son régime. Et même pour certains, hein, leurs frères d'armes c'étaient les Forces armées rwandaises. Alors c'était pas leur choix, c'était…, c'était quelque chose qui a été dicté au plus haut niveau. Et qui a eu des conséquences absolument catastrophiques, en dépit de toutes les alertes effectivement qu'ont pu être données. Simplement on a été traité…, on avait les opinions je dirais divergentes et on a été traité comme des dissidents. Hein, c'est…, c'est la réalité. Ceci dit ce qu'on a vécu c'est rien par rapport à ce que les victimes ont vécu. Je veux dire, nous c'est…, hein, on est d'ailleurs…, la preuve c'est qu'on est là. On n'a…, on n'a pas vraiment souffert. Simplement on a un sentiment de gâchis, euh…, incommensurable. Et puis aussi un sentiment un peu de honte, faut le dire parce que…, euh, parce que la France est quand même en principe un…, un grand pays démocratique. Et donc un grand pays démocratique avec des…, des institutions dignes de ce nom, euh, qui en principe, la patrie des droits de l'Homme, n'aurait jamais dû se commettre, euh, dans ce…, cet épisode… -- c'est pas un épisode, je veux dire --, dans…, dans cette, euh…, dans cette séquence absolument abominable qui a abouti effectivement à la mort d'un million de personnes. Alors maintenant effectivement on va pas les…, on va pas les ressusciter, ça c'est pas possible. Euh…, mais faut essayer de réparer ce qui peut l'être. Et ce colloque, ben finalement il s'inscrit dans le cadre de cette réparation, euh…, s'inscrit aussi dans la durée : c'est-à-dire qu'il y a une première session, y'aura une deuxième session, y'aura les actes du colloque qui seront publiés chez Armand Colin. Hein, ça c'est absolument essentiel. Euh, et moi en tant qu'ambassadeur ici, j'y vois finalement…, enfin ce colloque et ce que vous faites, c'est-à-dire le…, le mémoriel, qui est fondé sur l'histoire, et le judiciaire, c'est la base de la reconstruction de la relation franco-rwandaise, hein. C'est-à-dire que le Rwanda effectivement est devenu, euh, un petit… -- enfin, pas "est devenu" -- est un petit pays avec de…, de grandes ambitions. Avant c'était un petit pays avec de petites ambitions et même des ambitions meurtrières. Maintenant il a de grandes ambitions, hein, il joue un rôle à l'échelle continentale. Euh, donc la France a compris que si elle voulait rénover sa politique africaine, fallait qu'elle se réconcilie avec le Rwanda. Et cette réconciliation, elle passait par cet exercice de vérité que l'on fait, de responsabilité aussi. Peut-être même plus, hein, ça c'est…, c'est l'avenir qui le dira. Et en tout cas c'est absolument essentiel puisque si ça n'était pas fait, on progresserait pas dans les autres domaines, hein. On progresserait pas dans le domaine culturel, dans le domaine de la coopération, dans le domaine du développement, dans le domaine militaire, dans le domaine de…, de la coopération policière, etc. C'est-à-dire que c'est pour ça que… ce…, ce que vous tous et vous toutes avez fait ici c'est très important, que c'est là-dessus qu'on rebâtit une nouvelle relation. Mais pas une nouvelle relation qui ne regarde pas le…, le…, le passé, je veux dire, au contraire, qui…, qui fait toute la lumière sur le passé. Et cette lumière, ben il faut continuer à la faire. Euh…, qui…, qui tire toutes les conséquences, euh…, bah des…, des horreurs qui ont pu être commises et des…, des…, des…, des erreurs d'analyse finalement criminelles, en tout cas aux conséquences criminelles qui ont pu avoir lieu. Et c'est sur cette base là, effectivement, euh, qu'on peut construire une relation nouvelle entre, euh, entre le Rwanda et la France. Et qui a des conséquences au-delà : c'est-à-dire on fait quelque chose en fait de…, d'assez grand, euh, à la fois pour les victimes du passé mais aussi pour le futur. Voilà, donc je voulais remercier… Pour l'instant les…, les…, les dieux du ciel sont encore avec nous, donc, euh, je pense qu'il faut se dépêcher de manger et de boire et puis on…, sans doute que… quand y'a une grosse pluie, on ira un peu à l'intérieur [sourire] et ce sera la…, la fin du colloque. Mais en tout cas merci beaucoup à Vincent Duclert et à son équipe. Merci beaucoup à l'université du Rwanda, hein. Et il faut que cette coopération franco-rwandaise, qui fait que Kigali a été au cœur de la recherche scientifique, euh…, sur le génocide des Tutsi, euh, pendant neuf jours, ben il faut que ça perdure, euh, et il faut que ça prospère. Voilà, merci [applaudissements de l'assistance].