Date
Friday April 3, 1998
Sur titre
Troops ignore killing
Titre
French 'turned blind eye' to Tutsi massacre
Sous titre
French troops sent to Rwanda on a humanitarian mission ignored the pleas of wounded Tutsis, leaving 1,000 people to be slaughtered by Hutu killers.
Traduction
LES TROUPES IGNORENT LES TUERIES
LES FRANÇAIS « FERMENT LES YEUX » SUR LES MASSACRES DE TUTSIS
Les troupes françaises envoyées en mission humanitaire au Rwanda n'ont pas répondu
aux appels de Tutsis blessés, laissant des tueurs hutus massacrer un millier de
personnes.
Photo : Les troupes françaises protègent des survivants Tutsis sortant de leurs cachettes dans
les buissons rwandais à la suite du massacre par des Hutus d'un millier d'entre eux en juin
1994 [on en voit une dizaine en haillons, armés de bâtons, souriants]
Les troupes françaises envoyées en mission humanitaire au Rwanda n'ont pas répondu à
l'appel de Tutsis blessés, laissant des tueurs hutus qui travaillaient comme guides pour les
Français massacrer un millier d'entre eux durant le génocide de 1994.
Les tueries, qui auraient pu être évitées si les troupes françaises avaient écouté les appels des
Tutsis, sont exposées en quelques phrases dans un rapport éprouvant publié aujourd'hui iar
Droits Africains, organisation humanitaire basée à Londres.
Les troupes, des commandos de marine sous le commandement du Capitaine Giilier, avaient
été informées de la situation désespérée des Tutsis à Bisesero, un petit village à flanc de
colline près du lac Kivu, par « Le limes », le jour de leur arrivée au Rwanda le 2 6 juin 1994,
dans le cadre de l'Opération Turquoise, mission humanitaire soutenue par les Nations unies.
Le but de la mission menée par les Français était d'empêcher la poursuite des massacres de
Tutsis et d'Hutus modérés. Mais des évènements survenus à l'époque et des révélations
ultérieures, qui ont poussé le gouvernement français à ouvrir une enquête parlementaire sur
les actions de ses troupes au Rwanda, révèlent un haut niveau de collusion avec les tueurs
hutus. « Le Times » a fourni aux Français les coordonnées cartographiques de Bisesero et
déclaré, après une visite effrayante de la région «Alors que nous parlons de grands nombres
de Tutsis sont en train de se faire tuer. Vous devez y aller et faire arrêter ces tueries ». Cette
rencontre a été enregistrée et diffusée sur CNN.
Les commandos français se sont bien rendus à Bisesero. Mais ils n'ont rien fait pour sauver
des vies. A la place de quoi, ils sont entrés dans la zone accompagnés de personnes identifiées
comme des membres dirigeants des Tnterhamwe, la milice génocidaire hutu, et ont tout
d'abord refusé de croire que les Tutsis étaient en danger. Les dirigeants hutus avaient dit au
Capitaine Gillier que les Tutsis étaient des «infiltrés » provenant des rebelles menés par les
Tutsis du front Patriotique Rwandais (RPF).
Selon Rakiya Omaar, directeur de Droits Africains, qui a interrogé les survivants des
massacres de Bisesero et a effectué un travail exceptionnel sur le génocide, les Tutsis de Bisesero n'étaient plus que 2000 le 26 juin. Il y avait 50000 Tutsis dans la région avant le début des massacres. Ils se
défendaient seuls depuis avril, lorsque le génocide a été déclenché par l'abattage sur Kigali de
l'avion transportant le Président du Rwanda Habyarimana, un Hutu, et le Président du Burindi
Ntaryamira. Selon des rapports publiés dans « Le Figaro » cette semaine les 16 missiles Sam
utilisés pour abattre l'avion provenaient des stocks français.
« Les troupes françaises sont arrivées à Bisesero et ont été hélées par un survivant, un
enseignant. Il leur a fait part de ce qui était en train de se passer et a argumenté
courageusement avec des personnes telles que Alfred Musema [traduit aujourd'hui devant le
tribunal Pénal des Nations Unies à Arosha] », a dit Mme Ommar hier. Les Français ne l'ont
pas cru jusqu'à ce qu'il fasse sortir de leurs cachettes dans les bois d'autres survivants avec
des blessures terribles, plus morts que vivants. Le professeur a été informé que les Français
reviendraient dans trois jours, signifiant effectivement aux tueurs de combien de temps ils
disposaient pour poursuivre les tueries », a-t-elle ajouté. Lorsque les Français sont revenus à
Bisesero quatre jours plus tard, selon le rapport de Mme Ommar, les Hutus avaient tué près de
mille survivants.
Mais même le 30juin, les Français n'avaient aucunement I' intention d'aider les Tutsis. Le
capitaine Gillier a dit au « limes » qu'il allait en mission pour sécuriser la région contre le
RPF ». Ses hommes sont allés à Bisesero, sont passés en voiture devant les Tutsis, et ont
rencontré les membres dirigeants des Interhamwe. Sur une colline surplombant Bisesero, où
les Tutsis gisaient morts et perdant leur sang, le Capitaine Gillier a appelé un hélicoptère pour
apporter des biscuits aux Hutus. Ce n'est que sous la pression d'autres journalistes qu'il a
accepté d'envoyer ses hommes secourir les Tutsis de Bisesero.
«Musema est venu et des survivants ont dit aux Français que cet homme était un tueur. Les
Français ont demandé à des personnes de témoigner et l'ont laissé partir », a dit Jean Magazi
[Muragazi} à Droits Africains. Cette façon de faire s'est reproduite dans tout le Rwanda ; à
Cyangugu, dans le sud, les troupes françaises ont relâché plusieurs centaines de tueurs
notoires avant de se retirer à la fin de l'Opération Turquoise.
***Kigali : des miliciens armés de couteaux ont tué neuf Hutus dans trois villages au centre
du Rwanda, a -1-il été rapporté hier. Un responsable a accusé des miliciens hutus repliés sur des bases dans la forêt. (Reuters)
Citation
Photo :
French troops guard Tutsi survivors emerging from hiding in the
Rwandan bush after a massacre of 1,000 by Hutus in June 1994
[on en voit une dizaine en haillons, armés de bâtons, souriants]
French troops sent to Rwanda on a humanitarian mission ignored the
pleas of wounded Tutsis, leaving 1,000 people to be slaughtered by
Hutu killers working as guides for the french during the 1994
genocide.
The killings, which could have been averted if the French troops had
heeded the appeals of the Tutsis, are disclosed in a few sentences of
a harrowing report published today by Africa Rights, a London-based
human rights organisation.
The troops, Marine commandos under the command of Captain Marin
Gillier, had been told of the plight of the Tutsis in Bisesero, a
hillside hamlet near lake Kivu, by ``The Times'' on the day they
arrived in Rwanda on June 26, 1994, as part of Operation
Turquoise, a humanitarian mission backed by the United Nations.
The aim of the mission led by the French was to prevent continuing
massacres of Tutsis and Hutu moderates. But events at the time and
subsequent revelations, which have prompted the French Government to
open a parliamentary inquiry into the actions of its troops in Rwanda,
indicate a high level of collusion with the Hutu killers.
``The Times'' gave the map coordinates of Bisesero to the French and
said, after a frightening tour of the area: ``Large numbers of Tutsis
are being killed as we speak. You must go in and stop them.'' This
encounter was filed and broadcast by CNN.
The French commandos did drive into Bisesero. But they did nothing to
save lives. Instead, they entered the area accompanied by people
identified as leading members of the Interahamwe, the genocidal hutu
militia, and at first refused to believe that the Tutsis were in
danger. Hutu leaders had told Captain Gillier that the Tutsis were
``infiltrators'' from the Tutsi-led rebels of the Rwandan Patriotic
Front (RPF).
Acccording to Rakiya Omaar, director of Africa Rights, who interviewed
survivors of the Bisesero massacres and has compiled the most
authoritative work on the genocide, the Tutsis of Bisesero numbered
only 2,000 on July 26. There had been 50,000 Tutsis in the
region before the killings began. They had been defending themselves
since April, when the genocide was triggered by the shooting-down over
Kigali of a plane carrying President Habyarimana of Rwanda, a Hutu,
and President Ntaryamira of Burundi. According to reports this week in
``Le Figaro'', Sam 16 missiles used to bring down the plane came
from French stockes.
``The French troops arrived in Bisesero and were flagged down by a
survivor, a teacher. He told them what was happening and bravely
argued with people such as Alfred Musema [now facing a UN war crimes
tribunal in Arusha],'' Ms Ommar said yesterday. ``The French did not
believe him until he called others out of the woods who emerged with
terrible wounds, more dead than alive. The teacher was told that the
French would return in three days, effectively telling the killers how
much time they had to continue killing'', she added.
When the French returned to Bisesero four days later, according
to Ms Ommar's report, the Hutus had killed nearly 1,000 of the
survivors.
But even on June 30th, the French had no intention of helping the
Tutsis. Captain Gillier told ``The Times'' that he was going on a
mission to ``secure the area against the RPF''. His men went to
Bisesero, drove past the Tutsis, and met up with leading members of
the Interahamwe. On a hill overlooking Bisesero, where Tutsis lay dead
and bleeding, Captain Gillier called in a helicopter to bring biscuits
to Hutus. It was not until he came under pressure from other
journalists that he agreed to send his men to rescue the Tutsis of
Bisesero.
``Musema came and survivors told the French that this man was a
killer. The French asked people to testify and then they let him go.'',
Jean Magazi [Muragizi] told Africa Rights.
This pattern was repeated throughout Rwanda; In Cyangugu, in the
south, French troops released several hundreds notorious killers
before they withdrew at the end of Operation Turquoise.
*** Kigali: Militiamen armed with knives have killed nine Hutus in
three villages in central Rwanda, it was reported yesterday. An
official blamed Hutu militiamen hiding in forest bases. (Reuters)