Citation
FICHE PARTICULIERE
N° 00155 du 2 ri 2071
RWANDA
POINT DE SITUATION POLITICO-MILITAIRE
Les perspectives de cessez-le-feu annoncées à Arusha se sont évanouies depuis le lundi 9 avril 1994. Les affrontements en cours dans la périphérie de Kigali ont en effet redoublé de violence depuis cette date. alors que les massacres interethniques se poursuivent.
Après une phase d'enlisement du conflit, due probablement à une résistance
gouvernementale plus forte que prévue dans la capitale, les rebelles du Front Patriotique rwandais (FPR) semblent avoir repris l'initiative et concentrent actuellement leurs efforts sur l'objectif stratégique que représente l'aéroport. Selon certains responsables du FPR le mouvement rebelle contrôlerait actuellement près de la moitié du territoire rwandais et s'apprêterait à augmenter sa pression sur la capitale, dont la prise représente un objectif majeur, mais non ultime.
Les troupes gouvernementales sont confrontées à un problème crucial de manque de
munitions que les délégations gouvernementales, en tournée à l'étranger, tentent de régler. Par ailleurs, les forces gouvernementales semblent bénéficier du soutien logistique zairois. Le gouverneur de Bukavu, connu pour ses sentiments anti-tutsi, et trafiquant notoire, soutiendrait la lutte gouvernementale. Enfin, des informations non recoupées montrent que le colonel Imbega, responsable des approvisionnements pour les Forces Armées Zaroises (FAZ). servirait d'intermédiaire au profit des forces gouvernementales rwandaises. Un lot important de munitions de tous calibres serait ainsi en transit au Shaba, en provenance, semble-t-il, d'Afrique du Sud.
À l'intérieur du pays, les massacres se poursuivent, bien que les bilans annoncés paraissent difficilement vérifiables. On avance parfois le chiffre de 150 000 morts, bilan qui pourrait s'accroître avec le début des épidémies occasionnées par la dégradation des conditions sanitaires. Après avoir systématiquement éliminé les représentants de l'opposition, la Garde
Présidentielle (GP) et les milices hutu proches de la Coalition pour la Défense de la République (CDR) s'en sont prises à tous les Tutsi du pays. Le FPR s'est également livré à des règlements de compte, mais dans une moindre mesure. De nombreux réfugiés affluent aux postes-frontières de Tanzanie, du Kivu, au Zaire, et à la frontière rwando-burundaise au risque de déstabiliser des régions traditionnellement sensibles.
Ce redressement de la situation militaire en faveur du FPR s'accompagne d'un net
durcissement de la ligne politique du mouvement. La nature réactionnaire du gouvernement rwandais l'a immédiatement rendu illégitime aux yeux du FPR qui refuse de négocier avec ce qu'il considère comme ''un rassemblement d'assassins''. Ce gouvernerment est effectivement confronté à un problème d'image qui le conduit à prendre de multiples contacts à l'étranger. Le ministre des Affaires étrangères, M. Bicamumpaka a récemment effectué une visite officielle en France afin de plaider sa cause et obtenir un éventuel soutien. D'autres délégations ministérielles effectuent le même genre de démarches en Afrique et au Proche-Orient.
La visite en France du ministre rwandais des Affaires étrangères, M. Jérôme Bicamumpaka, proche de la CDR, a été interprétée par le FPR comme un soutien
sans équivoque de la France au gouvernement rwandais. En recevant à un haut niveau M.Bicamumpaka accompagné du président de la CDR, le FPR estime que Les autorités françaises ont légitimé un gouvernement à l'origine d'un génocide et montré leur partialité sur le dossier rwandais. Le FPR considère comme fallacieux le prétexte avancé par le quai d'Orsay de maintenir le dialogue avec toutes les parties et s'étonne que les autorités françaises ne réagissent pas à la propagande du gouvernement rwandais.
