Résumé
- In Rwanda, the Patriotic Front is said to have agreed today to discuss a truce with the government troops. A decision announced as rebel forces continue their offensive against Kigali.
- In a hospital in Kigali, the poor, sick and often injured people are certainly the last inhabitants in this city where everything now breathes death. After the capture of the airport and the Kanombe military camp, the government troops are somewhat routed. They also evacuate their wounded.
- The only hospital that is still functioning, that of the Red Cross, is the target of shells. As if the belligerents wanted to scare away the last witnesses.
- The Patriotic Front opposes the participation of French soldiers in the United Nations mission in Rwanda: it blames France for being too involved with the government army, in particular by providing it with weapons and logistics for years.
- The accusations against French policy in Rwanda are indeed severe: according to its detractors, France sided too soon with the majority Hutu government against the Tutsi opposition. In October 1990, France intervened militarily to prevent the Tutsi rebels of the Rwandan Patriotic Front from seizing Kigali, the capital. President Habyarimana, a personal friend of François Mitterrand, benefited for four years from support deemed to be excessive. Last April, after the assassination of Juvénal Habyarimana in an attack on his plane, his family was immediately evacuated to Paris. The French Ambassador and French soldiers leave the country, leaving moderate government officials behind, who were reportedly massacred in the days that followed. France is also accused of having encouraged the flight of dignitaries responsible for Tutsi massacres.
- For Régis Faucon, specialist in international issues, "France has for too long supported, including militarily, a regime whose tribal policy we know. Yes also because in its African policy, France has too often accepted relatively few interlocutors. frequentable. And this, in the name of a certain continuity. It should also be known that Africa is really a continent apart where it is difficult to judge according to our criteria to us, Westerners. France, which has always boasted to be the main Western country still helping Africa massively economically, is ultimately reaping the poisoned fruits of decades of dubious relations. But Africa is the continent of all violence, there is even conflicts that we do not even talk about any more. But it is of course the scale of the abominable Rwandan massacre which once again cruelly highlights what we will modestly call the ambiguities of French policy".
Citation
[Patrick Poivre d'Arvor :] L'actualité à l'étranger avec, euh, une fois encore, la priorité donnée à la situation au Rwanda. Le Front patriotique aurait accepté aujourd'hui de discuter d'une trêve avec des troupes gouvernementales. Une décision annoncée alors que les forces rebelles poursuivent leur offensive contre Kigali. Elles se sont en effet emparées aujourd'hui d'un quartier de la ville et sont sur le point d'en prendre un autre.
Marine Jacquemin, Thierry Froissart et Gilles Tuban reviennent du Rwanda avec un reportage, vous allez le voir, sur un hôpital où dans des conditions extrêmement difficiles, on essaie comme on le peut de sauver ce qui peut être encore sauvé.
[Marine Jacquemin :] L'enfant blessé cherche de l'aide dans l'hôpital désert [gros plan sur la main mutilée d'un enfant]. Le directeur, fatigué, presque indifférent nous montre ce qui reste de ses deux blocs opératoires [ils sont partiellement détruits].
[Le directeur de l'hôpital, un homme noir :] "- [Inaudible] des malades, là, qui étaient sur les tables, là. Heureusement, ils n'ont pas été blessés". Question de Marine Jacquemin : - "Qui vous a bombardé ?". Réponse : - "Je ne sais pas".]
À l'extérieur, classique de l'Afrique, ils attendent tranquillement que l'on veuille bien s'occuper d'eux.
[Un infirmer noir : "Donc nous sommes en train d'évacuer les blessés… de guerre et la population qui ont…, qui sont fui ici [sic]".]
La main de Christophin, amputée de trois doigts à la machette, est en train de s'infecter faute de soins [gros plan sur la main de Christophin dont une jambe a également été amputée].
[Marine Jacquemin, face caméra devant l'hôpital, équipée d'un gilet pare-balles : "Ces gens pauvres, malades et souvent blessés, qui ne peuvent plus bouger sont certainement les derniers habitants dans cette ville où tout à présent respire la mort".]
Après la prise de l'aéroport et du camp militaire de Kanombe, les troupes gouvernementales sont un peu en déroute. Elles évacuent aussi leurs blessés.
Dans la foule, cet homme : il a reçu une balle qui lui a transpercé le visage [on le voit couché sur un brancard, le visage ensanglanté], explique sa femme. Un crime commis par le FPR et qui se multiplie, dit-elle, dans les zones sous leur contrôle.
Tous ces blessés essaient de rejoindre Gitarama, ou Butare au Sud. Mais la route est scabreuse [on voit des soldats des FAR blessés]. 300 ont déjà pu passer. Les autres remplissent les salles bondées du seul hôpital qui fonctionne encore, celui de la Croix-Rouge.
[Un homme blanc parlant dans un talkie-walkie : - "TF1, journal du dimanche, souhaite te rencontrer tout à l'heure après la visite de l'hôpital, c'est OK ?". On entend un homme répondre : - "Aucun problème". L'homme au talkie-walkie : - "Terminé". Puis, s'adressant à Marine Jacquemin : - "Bon ça sera bon, hein". Marine Jacquemin : - "Eh bien, dites-moi, ça…, la trêve n'a pas l'air d'être respectée ?". Réponse : - "Ça va dans des sens qui ne nous concernent pas. Mais ce matin, ça venait comme ça [l'homme fait des gestes de la main] et vers 13 heures, quand, euh, ça arrivait dans ce sens, ça passait juste dessus. Il est tombé à 50 mètres derrière cette voiture rouge. Moi j'étais juste derrière le camion, je…, je n'ai que cette éraflure". Marine Jacquemin : - "Vous avez eu des blessés ou…". Réponse : - "Pas sur ce tir".]
Après notre départ, au même endroit un deuxième obus. Comme si les belligérants voulaient faire fuir les derniers témoins. Bilan : deux morts, cinq blessés [on voit plusieurs personnes blessées, couchées sur des brancards].
Nous rencontrons enfin les Casques bleus, impuissants mais héroïques. Aux prises de cette ville en folie, les derniers combats ne les ont pas épargnés [on voit des Casques bleus à l'hôtel des Diplomates].
[Un premier Casque bleu s'exprimant en anglais : "Nous avons reçu beaucoup de bombes". Un autre : "Je ne sais pas où est la solution". Un troisième : "Les renforts vont arriver".]
Le soldat de la paix est positif : il ne doit pas savoir que les pays volontaires pour cette mission tardent à se faire connaître. À part le Ghana, personne ne semble vraiment décidé à sauver ce qui reste du Rwanda.
[Patrick Poivre d'Arvor :] Le Front patriotique, qui est opposé à la participation de soldats français à la mission des Nations unies au Rwanda : il reproche à la France de s'être trop impliquée aux côtés de l'armée gouvernementale…, euh, gouvernementale rwandaise, notamment en lui fournissant depuis des années armes et logistiques. Nahida Nakad.
[Nahida Nakad :] Les accusations contre la politique française au Rwanda sont sévères : selon ses détracteurs, la France a pris parti trop tôt pour le gouvernement à majorité hutu contre l'opposition tutsi [diffusion d'images d'archives montrant des soldats français en action ; une incrustation "Avril 1994" s'affiche à l'écran].
En octobre 1990, la France est intervenue militairement pour empêcher les rebelles tutsi du Front patriotique rwandais de s'emparer de Kigali, la capitale [on voit à nouveau des militaires français dans Kigali ; une incrustation indique à présent "Octobre 1990"]. Le Président Habyarimana, ami personnel de François Mitterrand, a bénéficié pendant quatre ans d'un soutien jugé immodéré [diffusion d'images d'archives de la visite officielle de Juvénal Habyarimana en France, le 2 avril 1990]. Tandis que le chef du FPR, Paul Kagame, se plaint de n'avoir jamais réussi à établir des contacts à haut niveau avec la France [on voit Paul Kagame à l'écran].
Avril, Juvénal Habyarimana est tué dans un attentat contre son avion. Sa famille est immédiatement évacuée à Paris. L'ambassadeur de France et les soldats français quittent le pays, laissant derrière eux les représentants modérés du gouvernement, qui auraient été massacrés dans les jours qui ont suivi [on voit notamment le colonel Poncet saluer l'ambassadeur Marlaud à son départ du Rwanda le 12 avril 1994].
La France est également accusée d'avoir favorisé la fuite de dignitaires responsables de massacres tutsi. La veuve du Président Habyarimana, que nous avions rencontré à son arrivée à Paris, confirme avoir été emmenée immédiatement en France mais dément l'évacuation d'autres personnalités politiques [on la voit dans un appartement parisien en compagnie de trois femmes noires].
Le Quai d'Orsay se dit surpris des attaques contre sa politique au Rwanda. Paris affirme que son seul but est de favoriser une solution politique et d'arrêter les massacres.
[Patrick Poivre d'Arvor s'entretient à présent en plateau avec Régis Faucon.]
Patrick Poivre d'Arvor : Alors il faut répéter qu'historiquement le Rwanda a longtemps, euh, été administré par la Belgique mais que la France a eu une sorte de magistère moral là-bas, Régis Faucon.
Régis Faucon : Oui alors, vous savez Patrick, ce sont des accusations gravissimes qui sont portées contre la France. Et des accusations que François Mitterrand et Edouard Balladur accepteraient assez mal comme on l'imagine. Alors la France est-elle…, a-t-elle sa part de responsabilité ? Je dirais : "Oui, mais". Oui parce que c'est vrai qu'au Rwanda même, elle a trop longtemps soutenu, y compris militairement, un régime dont on connaissait la politique tribale. Oui aussi parce que dans sa politique africaine, la France a trop souvent accepté des interlocuteurs, je dirais, assez peu fréquentables. Et ce, au nom d'une certaine continuité. C'est un peu, si vous le voulez, la politique du moindre mal. Euh, ça pourrait certes être mieux mais ça pourrait aussi être pire. Mais c'est vrai aussi que la marge de manœuvre de la France est très étroite : si elle ne fait rien, à ce moment-là on dit qu'elle abdique ses responsabilités. Si elle agit, on parle d'ingérence. Et je crois qu'il faut savoir aussi que l'Afrique est vraiment un continent à part où il est difficile de juger selon, euh, nos critères à nous, Occidentaux. La France, qui s'est toujours vantée d'être le principal, euh, pays occidental, euh, aidant encore massivement l'Afrique sur le plan économique, recueille finalement là les fruits empoisonnés de dizaines d'années de relations douteuses. Mais vous savez, l'Afrique, c'est le continent de toutes les violences. Il y a même des conflits dont on ne parle même plus. Mais c'est bien sûr l'ampleur de l'abominable massacre rwandais qui met à nouveau cruellement en lumière ce que l'on appellera pudiquement les ambiguïtés de la politique française.