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Après six semaines de combats qui ont totalisé des dizaines de
milliers de morts, le Conseil de sécurité a donné son accord de
principe au renforcement de la Mission des Nations unies au Rwanda
(Minuar) dans la limite de 5500 militaires et décrété un embargo sur
les armes. Bien que l?ONU exige des parties en conflit qu?elles
acceptent un cessez-le-feu et mettent fin «à la violence et au carnage
insensés dans lesquels est plongé le Rwanda», le nouveau mandat ne
prévoit à aucun moment une action de force en vue du rétablissement de
la paix. Les Casques bleus, dont les effectifs avaient d?ailleurs été
ramenés de 2700 à ?270 le mois dernier sur décision du même Conseil de
sécurité, auront entre autres missions de contribuer à la sécurité et
à la protection des personnes déplacées, des réfugiés et des civils en
danger au Rwanda, «y compris par la création et le maintien, là où ce
sera possible, de zones humanitaires sûres». 11 leur faudra aussi,
précise le mandat, assurer la sécurité et l?appui de la distribution
des secours et des opérations d?assistance humanitaire. Le seul
recours à la force envisagé par l?ONU se limite à des actions de
légitime défense dans le cadre de menaces contre des secteurs et
populations protégés, le personnel des Nations unies et les autres
personnels humanitaires. La France avait souhaité une opération rapide
avec un mandat contraignant - avec usage de la force- mais elle s?est
trouvée isolée. Les Américains, en particulier, traumatisés par leur
expérience en Somalie, imposent désormais de strictes conditions à
tout engagement et favorisent la notion de simple maintien de la paix,
A l?issue du vote qui s?est tenu après neuf heures de débats, personne
ne savait encore quels Etats participeraient à cette force
internationale. Selon TONU, le Ghana, avec 800 soldats au total, et le
Nigeria figurent parmi les pays «confirmés». Selon plusieurs
observateurs, le secrétaire général rencontrerait d?importantes
difficultés à mobiliser des troupes occidentales. Hier soir, le Quai
d?Orsay s?est félicité de «voir la communauté internationale prendre
ses responsabilités dans le conflit rwandais». La France, déclare le
communiqué, est prête à «examiner une contribution à l?équipement des
contingents africains appelés à participer à la Minuar renforcée» et à
apporter prioritairement « une aide humanitaire accrue aux populations
rwandaises réfugiées au Burundi». L?embargo sur les armes, quant à
lui, a été voté à l?unanimité moins une voix, celle du représentant du
Rwanda, qui a affirmé que cette mesure était «injuste» et allait
favoriser les rebelles du Front patriotique rwandais, toujours aidés,
selon lui, par l?Ouganda voisin. «Ce que nous utilisons, nous l?avons
pris à l?ennemi au cours de nos conquêtes», a répondu hier un
porte-parole de la rébellion. Par ailleurs, le FPR a été accusé par le
Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés de se livrer à
des massacres et des tortures dans les zones qu?il contrôle. Il s?agit
là, selon le FPR, de témoignages recueillis par le HCR dans des camps
de réfugiés en Tanzanie, où se trouvent «des militiens et des
déserteurs qui accusent évidemment le FPR».
A. F. (avec AFP)
Wed 18 May 1994