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Ce mardi 15 octobre 2019, Bangui va accueillir, en grandes pompes, le président Paul Kagame, qui reste un des rares soutiens du président Touadera en Afrique centrale
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Cette visite du président rwandais en Centrafrique est une première. C’est surtout la première visite officielle d’un chef d’État africain, depuis que Faustin-Archange Touadera a pris ses fonctions de chef d’Etat, le 30 mars 2016.
Paul Kagame s’est fortement impliqué dans la recherche de la paix en Centrafrique qui avait jadis accueilli de nombreux réfugiés rwandais. En revanche, ses relations avec
l’ex-président Bozize étaient loin d’être aussi bonnes.
Entre Kagame et Bozize, rien n’allait!
Il est loin le temps où l’ancien président Bozize avait pris comme conseiller Fabien Singaye. Ce Hutu rwandais était très proche de la famille et du président Juvénal Habyarimana, qui décéda dans l’attentat du 6 avril 1994, point de départ du génocide qui fit plusieurs centaines de milliers de morts.
Le sulfureux Fabien Singaye fut aussi un interprète engagé du juge français Jean-Louis Bruguière qui enquêta sur le drame du 6 avril 1994 et qui mit en cause le Front patriotique rwandais de Paul Kagame. Gendre de Félicien Kabuga, surnommé le « financier du génocide » toujours recherché par la justice internationale, Fabien Singaye, basé à Genève, avait comme tant d’autres un passeport diplomatique centrafricain qui attend aujourd’hui son renouvellement. Évidemment Faustin-Archange Touadera, ancien premier ministre de l’ex-président Bozize, connaît bien Fabien Singaye mais évite de le rencontrer en public, lors de ses voyages à Genève ou à Bruxelles, car il est désormais beaucoup trop compromettant.
La présence de Fabien Singaye aux côtés de François Bozize avait été très peu appréciée par Paul Kagame. La réplique ne tarda pas avec la constitution de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR) de Michel Djotodia, à Kigali le 14 septembre 2006. On connaît la suite avec le renversement de Bozize par l’ex-Seleka, le 23 mars 2013. Le président Touadera n’a pas la mémoire courte.
Kagame, un allié constant
Le président centrafricain est très reconnaissant envers son homologue rwandais. Il le rencontre plusieurs fois par an, au gré des rencontres internationales comme dernièrement à New York. Il avait fait le déplacement de Kigali, en juillet 2019, pour le 25ème anniversaire de la création du régime rwandais actuel.
Dès l’élection de Faustin-Archange Touadera, Paul Kagame a immédiatement apporté son aide, notamment dans un premier temps dans le domaine sécuritaire. Après le départ de Sangaris et avant la présence de mercenaires russes, ce furent des militaires rwandais qui assuraient sa protection. Plusieurs centaines de militaires rwandais font actuellement partie de la MINUSCA et agissent avec un grand professionnalisme, loué par la population.
En sa qualité de président de l’Union africaine, en 2018, Paul Kagame a joué un rôle majeur dans la préparation de l’Accord de Khartoum, signé à Bangui le 6 février 2019, afin de mettre un terme à une crise qui ébranle les fondements de l’État centrafricain et menace l’unité nationale. Le Rwanda est un exemple pour de très nombreux Centrafricains et Paul Kagame y est probablement le chef d’État le plus apprécié.
Le dossier des droits de l’homme en bas de la pile
La visite de Paul Kagame sera ponctuée par une commission mixte de coopération dans de nombreux domaines où le Rwanda peut utilement contribuer au développement du pays. Les missions de Centrafricains vers Kigali s’intensifient. Évidemment les questions de droits de l’homme et de démocratie ne seront pas prioritaires mais elles pourraient bien néanmoins être dans l’agenda caché du président Touadera qui a en perspective sa prochaine réélection de 2020.
Alors que le président Touadera est de plus en plus mis à l’écart en Afrique centrale, la visite de Paul Kagame est pour lui un incontestable réconfort pour l’avenir.