Fiche du document numéro 1708

Num
1708
Date
Mercredi 10 août 1994
Amj
Auteur
Fichier
Taille
129032
Pages
2
Sur titre
Rwanda
Titre
Paris propose le déploiement d'observateurs civils
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
A l'instigation de Médecins sans frontières, la France a proposé le
déploiement de quelques centaines d'observateurs civils des droits de
l'homme au Rwanda afin d'encourager le retour des réfugiés. Bien que la
proposition française ait été bien reçue par les membres du Conseil de
sécurité des Nations unies, pour l'instant seulement vingt observateurs
seront déployés car le coût de l'opération est exorbitant.

Selon des diplomates de l'ONU, l'envoi de chaque observateur civil pour
une période de six mois revient à plus de 100 000 dollars. Il faudrait
donc près d'un demi-milliard pour que quelques centaines d'observateurs
puissent se rendre au Rwanda. Le déploiement des vingt premiers revient
à 2,1 millions de dollars. Washington aurait accepté de financer la
moitié de l'opération.

« Comme au Cambodge »



Les observateurs, qui seront déployés dans chacune des dix préfectures
rwandaises, feront directement rapport au bureau du haut-commissaire
pour les droits de l'homme, José Ayalo Lasso. Ils seront chargés de
surveiller les conditions du retour des réfugiés et le respect de leurs
droits. Leur mission devrait aussi comprendre la recherche des
responsabilités dans les massacres, ainsi que l'assistance à la
réconciliation politique au niveau local.

Pour les auteurs de cette proposition, le nombre de vingt observateurs
est insuffisant. Au cours d'un entretien téléphonique, le secrétaire
général de MSF, le docteur Alain Destexhe, qui a très activement
approché les membres du Conseil de sécurité, explique qu' « avec
seulement vingt observateurs, on ne peut pas espérer créer des
conditions minimales de sécurité pour encourager les réfugiés au retour
 ». Selon lui, deux observateurs devraient être déployés dans chacune des
cent cinquante communes rwandaises.

Les réfugiés « ont peur de ce qui les attend au Rwanda ; seule la
présence d'observateurs internationaux dans leurs villages pourrait
éventuellement les inciter à rentrer
 », explique le docteur Destexhe.
Selon lui, l'effort humanitaire déployé « sème les germes d'un conflit
futur : comme les Khmers rouges au Cambodge, les FAR [ancienne armée
gouvernementale] exercent leur contrôle politique sur des centaines de
milliers de personnes pour légitimer leur pouvoir, leur guerre, leur
revanche
 ». « Ironiquement, un cercle vicieux, alimenté par l'aide
internationale, se forme.
 »

Pour les organisations non gouvernementales (ONG), la communauté
internationale devrait se concentrer non seulement sur le déploiement de
« casques bleus » mais aussi, « peut-être même plus urgemment, » sur
l'envoi des observateurs civils : « Sinon le monde devra assister
pendant des années deux millions de personnes, s'impliquer dans une
nouvelle guerre et venir en aide à de nouvelles victimes. Ce sera, comme
au Cambodge, un long cauchemar.
 »

A l'approche du départ des forces françaises du Rwanda (prévu le 22
août), Paris multiplie ses efforts au Conseil de sécurité pour faciliter
le retour des réfugiés. A la demande de la délégation française, le
Conseil devrait adopter cette semaine une déclaration « claire et sans
ambiguïté
 » à l'adresse du nouveau gouvernement de Kigali, l'enjoignant
de veiller à ce qu'il n'y ait pas de représailles.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024