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KIGALI, 30 mai, Reuter - L'armée rwandaise et le Front patriotique du
Rwanda (FPR) ont entamé lundi leurs premières négociations directes,
sous l'égide des Nations unies à Kigali, pour tenter de mettre fin aux
violences qui ont coûté la vie à un demi-million de personnes.
Les armes ne se sont pas tues pour autant. Les combats ont repris à
l'aube dans la capitale rwandaise, après une nuit relativement calme.
Selon des témoins, un obus de mortier a explosé près de l'hôtel
Méridien, fréquenté par des journalistes, dans un quartier tenu par les
rebelles.
Les représentants des deux factions rwandaises se sont rencontrés à
10h30 locales (08h30 GMT) au quartier général de l'Onu.
Le principal objectif des entretiens est de parvenir à un
cessez-le-feu afin d'améliorer le sort du peuple rwandais et de
permettre à l'aide de lui parvenir
, a déclaré à Reuter le général
Marcel Gatsinzi, chef de la délégation militaire gouvernementale.
Je n'ai d'autre option que de croire en la bonne volonté du FPR
,
a-t-il ajouté.
Le colonel Franck Mugambage, chef de la délégation du FPR, a souligné
qu'il négocierait avec l'armée mais pas avec le gouvernement
provisoire, dont les membres sont tous de la majorité hutue et que le
Front refuse de reconnaître.
En ouvrant les travaux, le vice-commandant de la Mission d'assistance
des Nations unies au Rwanda (Minuar), le général Henry Anyidoho, a
espéré que les belligérants mettraient à profit l'élan donné au
processus de paix par l'émissaire de l'Onu, Iqbal Riza, lors de sa
visite la semaine dernière.
Le début des pourparlers a été légèrement retardé par une panne du
camion blindé qui transportait le général Gatsinzi. Le véhicule s'est
arrêté à 250 mètres du QG de l'Onu et a dû être remorqué jusqu'au siège
de la Minuar.
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Echange de réfugiés suspendu
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Peu avant le début de la séance, des rafales d'armes légères émanant du
FPR ont crépité aux abords de l'immeuble de l'Onu, situé dans un
quartier tenu par les rebelles dans l'est de Kigali, en dépit d'un
appel au cessez-le-feu lancé par l'Onu pour la durée des négociations.
Si les discussions portent leurs fruits, l'Onu entamera l'application
de certains points du plan de paix adopté par le Conseil de sécurité.
L'un d'eux prévoit l'évacuation des civils pris au piège par les
combats, une opération que la Minuar a commencer vendredi et samedi
mais a dû suspendre pour des raisons de sécurité.
Des officiers de l'Onu ont fait savoir que l'évacuation ne reprendrait
pas lundi car les belligérants n'avaient pas donné suffisamment de
garanties sur la sécurité des convois.
Les forces du FPR ont renforcé au cours de la nuit leur pression sur
les troupes gouvernementales. L'enjeu des combats est le contrôle de la
dernière route encore utilisable par l'armée, celle qui conduit au
sud-ouest de Kigali dans une zone connue sous le nom de Coin de
Kadhafi.
La radio du FPR a dimanche soir imputé au gouvernement la
responsabilité de l'arrêt d'un échange de réfugiés hutus et tutsis en
plusieurs points de la ligne de front à Kigali. Radio Muhabura a ajouté
que cela pourrait nuire aux négociations.
La radio a laissé entendre que le gouvernement avait violé un accord
portant sur l'échange d'un Hutu contre un Tutsi, en demandant que tous
les 5.500 réfugiés du stade Amahoro, dont beaucoup sont hutus, soient
envoyés en territoire gouvernemental en échange de seulement 175
civils, en majorité tutsis, bloqués à l'hôtel des Mille Collines.
Selon le Haut commissariat de l'Onu aux réfugiés (HCR), environ un
demi-million de Hutus qui ont fui l'avancée du FPR sont bloqués près de
Gitarama, à une quarantaine de kilomètres au sud de Kigali.
Cela devient très grave
, a dit un porte-parole du HCR. Ils ont peu
d'eau et peu de vivres et la situation médicale est très sérieuse
. /DR
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