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GENEVE, 26 mai, Reuter - Le Service international des droits de l'homme
(ISHR) a réclamé jeudi la création d'un tribunal international pour
juger les responsables des massacres au Rwanda.
Il a accusé les Etats membres de la Commission des droits de l'homme de
l'Onu de manquer de courage en ne considérant pas les massacres du
Rwanda comme un génocide.
Les tragédies du Rwanda exigent qu'un tribunal pénal international
soit constitué dès que possible pour juger les auteurs de violations
des droits de l'homme
, a-t-il déclaré dans un communiqué.
Il a formulé ses critiques à l'issue d'une réunion extraordinaire de
deux jours des 53 membres de la Commission. Celle-ci a nommé un
rapporteur chargé d'enquêter sur les massacres et s'est bornée à
déclarer que des actes de génocide s'étaient peut-être produits
.
La Commission des droits de l'homme de l'Onu, où siègent notamment les
Etats-Unis, la Russie et plusieurs pays africains, a décidé de laisser
au système judiciaire national
le soin d'engager d'éventuelles
poursuites contre les auteurs des massacres. Ceux-ci auraient fait
500.000 victimes selon certaines estimations.
Si les Nations unies tiennent sérieusement à protéger les droits de
l'homme, elles doivent maintenant montrer au monde qu'aucune impunité
ne sera tolérée pour les auteurs de violations des droits de l'homme au
Rwanda et dans tout autre pays du monde
, ajoute l'ISHR.
Le communiqué, qui reprend des critiques déjà formulées par d'autres
associations non gouvernementales, a été publié après que le secrétaire
général des Nations unies Boutros Boutros-Ghali eut lui-même qualifié
d'échec et de scandale la réaction du monde à la crise du Rwanda.
A New York, il a déclaré à la presse que les événements vécus depuis
sept semaines par le pays constituaient un génocide
auquel la
communauté internationale aurait pu s'opposer davantage.
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Rapporteur spécial sur le Rwanda
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Mercredi, après de longues discussions en coulisses entre délégations,
la Commission a adopté une résolution condamnant les tueries et
exhortant les deux parties à y mettre un terme.
Elle a également nommé l'universitaire ivoirien René Degni Ségui
rapporteur spécial sur le Rwanda, avec un mandat d'un an.
Il se rendra dans la région et, dans un délai de quatre semaines,
remettra à Boutros Boutros-Ghali un rapport sur les causes et les
responsabilités fondamentales des atrocités
, dont la responsabilité
est en grande partie imputée à l'armée et aux milices du gouvernement
intérimaire rwandais.
Celui-ci est essentiellement composé de Hutus. Un de ses représentants
à déclaré à la Commission que la plupart des massacres étaient l'oeuvre
des rebelles du Front populaire du Rwanda (FPR), dont les effectifs
sont en majorités tutsis.
Les Tutsis sont les principales victimes des tueries, qui ont commencé
lorsqu'un avion transportant les présidents hutus du Rwanda et du
Burundi a été abattu le 6 avril.
La résolution de la Commission demande au gouvernement intérimaire de
condamner publiquement les massacres et de mettre un terme aux
violations des droits de l'homme. Elle enjoint également au FPR
d'empêcher ses combattants de commettre des meurtres.
Le nouveau commissaire des Nations unies aux droits de l'homme,
l'Equatorien Jose Ayala Lasso, a déclaré au cours d'une conférence de
presse que la Commission avait fait tout ce qui était en son pouvoir et
manifesté son autorité morale en émettant un signal aussi fort que
possible
.
De son côté, l'ISHR considère la nomination de Ségui comme un strict
minimum. Elle estime qu'il devrait faire plusieurs visites au Rwanda en
compagnie d'experts et enregistrer les noms des responsables du
génocide et, plus généralement, des auteurs de violations des droits de
l'homme. /SEW
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